LA CHRONIQUE DE STÉPHANE VERNAY - Le Premier ministre est l’invité du 20h de TF1, ce mercredi soir. Et de quoi Gabriel Attal va-t-il parler aux Français, en direct à la télé ? Du déficit public de l’État, le grand sujet du moment. On savait depuis un moment que le compte n’y était pas. Depuis hier matin, avec la publication des chiffres de l’Insee pour l’année 2023, on a la certitude que la situation est bien pire que prévue.
Les oppositions, unanimes, crient toutes au scandale, à l’inconscience et à l’incompétence, mais n’en tirent pas toutes les mêmes conclusions.
À gauche, par exemple, on nous explique volontiers que le déficit, carabiné, de l’État serait facile à régler. Il n'y a qu'a effacer la dette d’un trait de plume, faut qu'on rétablisse l’impôt sur les grandes fortunes, et puisque tout cela est si simple, faudrait pas nous prendre pour des lapins de six semaines. On a bien compris qu’on nous a menti à dessein pour nous faire avaler une cure d’austérité, tailler dans les dépenses sociale (sur les retraites, la Sécu, le chômage…) et casser les services publics.
À droite, c’est le catastrophisme qui tient la corde. On parle volontiers de "dérapage incontrôlé", d’une dégradation de la note de la France sur les marchés financiers qui sera synonyme de honte, de déchéance et, à court terme, de ruine. Nous sommes les cancres de l’Europe et notre pays marche dans les pas de la Grèce, qui avait failli provoquer la banqueroute de l'Union européenne en 2008.
Que les comptes publics de la France ne soient pas à l’équilibre, c’est un problème, mais pas une nouveauté. Ils sont en déficits chaque année depuis 1975. Oui, il est fort possible que Standard & Poor’s dégrade la note de la France le 31 mai prochain. C’est certes une mauvaise nouvelle, parce que l’État devra emprunter à des taux d’intérêts plus élevés qu’aujourd’hui, mais les taux actuels sont relativement bas, et non, les banques ne vont pas décider d’arrêter de prêter de l’argent à la France d'un seul coup.
C’est d’autant plus vrai que l’État n’a pas dépensé sans compter, ou immodérément, en 2023. Ce qu’il a raté, ce sont ses prévisions en matière de croissance économique, et donc de recettes fiscales. Tout le paradoxe, c’est que c’est sans doute ce loupé-là qui inquiète le plus. Peut-être bien plus que les 154 milliards de déficits publics cumulés sur l’année.
Voici plusieurs années que ses budgets, et les prévisions de croissance qui vont avec, sont critiqués par les oppositions, déclarés fantaisistes, non conformes à ce qu’attendent certains experts, économistes ou agences spécialisées, mais, jusqu’à présent, le gouvernement était retombé à chaque fois sur ses pattes. Ce n’est plus le cas. Comme si le volontarisme, la relance par l’emploi et le travail, marque de fabrique du Macronisme depuis 2017, ne fonctionnait plus. Le hic, c’est que le gouvernement a promis, l’an dernier, de rétablir la situation financière de la France d’ici la fin du quinquennat, en ramenant le déficit public du pays sous la barre des 3% du PIB en 2027.
Comment pourrait-il redresser la trajectoire en partant si mal, avec une martingale en panne ? La chance des débutants n’est plus, et ce pouvoir donne l’impression d’avoir trouvé ses limites. Trois ans avant terme. C’est peut-être ce qui inquiète aujourd’hui le plus, ou rend tout le monde aussi fébrile, tout camp politique confondu, dans cette histoire.
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