"Si quelqu’un dit : « J’aime Dieu », alors qu’il a de la haine contre son frère, c’est un menteur." (1 Jn 4, 20) Cet extrait de la Première lettre de Jean résume bien le passage de l’Évangile de ce dimanche. Un spécialiste en Écritures saintes vient demander à Jésus quel est le plus grand des commandements. Jésus lui explique alors que l’amour de Dieu et l’amour du prochain sont indissociables. Et qu'en vivant ce double engagement il s'inscrit dans la continuité de la loi qu'il désire honorer. Explications du Père François Lestang, bibliste.
Évangile du dimanche 29 octobre (Mt 22, 34-40)
Les pharisiens, apprenant que Jésus avait fermé la bouche aux sadducéens, se réunirent, et l’un d’entre eux, un docteur de la Loi, posa une question à Jésus pour le mettre à l’épreuve : « Maître, dans la Loi, quel est le grand commandement ? » Jésus lui répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement. Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »
Source : AELF
Les évangiles de ces derniers dimanches se succèdent et se ressemblent un peu car on y voit Jésus à chaque fois mis à l’épreuve par les autorités religieuses de son temps. Il se prête à la controverse avec les différents groupes qui fréquentent le temple de Jérusalem. Pour François Lestang, ces débats d'ordre théologique ou spirituel montrent "cette nouveauté qu’apporte Jésus, enracinée dans la tradition d’Israël."
Ce qui est en jeu ici, c'est "l’autorité de Jésus". Il faut alors imaginer un homme venu de Galilée à Jérusalem, "dans le cœur du lieu où Dieu se manifeste, c’est-à-dire le temple, là où on offre des sacrifices". Après les grands prêtres et les saducéens, Jésus discute avec les pharisiens puis les hérodiens… Les saducéens "sont un groupe qui est lié au temple, un groupe sacerdotal".
Les pharisiens, eux, sont laïcs et "finalement assez proches de Jésus", précise le bibliste. "Comme nous, ils croient à la résurrection, comme nous, ils pensent que l’important c’est d’accomplir cette loi. On les voit parfois comme les adversaires principaux de Jésus, reconnaît le Père Lestang, mais on a aussi dans le fond une assez grande proximité sur ce que ça veut dire que d’être à la suite de Dieu, du Dieu d’Israël dans un quotidien."
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"Souvent on a l’impression dans les controverses de Jésus avec les pharisiens ou d’autres, que c’est pour le prendre au piège, mais il y a une dimension de discussion." Dans la tradition juive, pouvoir débattre et confronter ses idées est essentiel. "L’idée n’est pas tant d’avoir une réponse mais du discuter." Jésus, qui, rappelons-le, est juif, est imprégné de la loi. Le docteur de la loi qui l'interpelle l'appelle "Maître". C’est donc une discussion entre experts qui se déroule dans cet évangile.
"Quel est le grand commandement ?" (Mt 22, 36) demande le docteur de la loi à Jésus. "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Voilà le grand, le premier commandement", répond Jésus (Mt 22, 37-38). Plus tard, Rabbi Akiva dira que : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même" est le principe fondamental dans la Torah selon. "Donc ce que Jésus va dire on le trouve aussi dans la bouche d’un rabbi parfaitement orthodoxe du IIe siècle !" souligne le bibliste.
Dans la Torah, il y a 613 commandements. "Pour les trouver, il faut faire de bonnes recherches", précise le bibliste. C’est Maïmonide au XIIIe siècle qui en a fait la liste. 613, c’est, dans la tradition hébraïque, la valeur du mot "j’ai créé", précise François Lestang. "Et donc l’idée c’est que l’homme est créé pour accomplir la Torah." Ce qui, pour le bibliste de tradition ignatienne, résonne comme : "L’homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu." Aimer, respecter et servir : voilà trois façon de déployer ce que signifie "aimer".
La Torah, dont on dit dans la tradition juive, qu’il s’agit de la loi écrite révélée par Dieu à Moïse, n’est pas un terme toujours bien traduit. "Ce n’est pas toujours une règle", précise François Lestang. Le mot torah "renvoie à un projet". "C’est quelque chose pour donner la vie la Torah est comparée à un arbre. Comprendre ce qui est le cœur de la Torah, c’est trouver la vie."
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