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Hommage au jésuite Paolo Dall'Oglio enlevé en Syrie il y a dix ans

Un article rédigé par Laurette Duranel avec Thierry Lyonnet - RCF, le 4 octobre 2023 - Modifié le 4 octobre 2023
L'Entretien de la semaineHommage au jésuite Paolo dall'Oglio enlevé en Syrie il y a 10 ans

Voilà 10 ans que le père Paolo Dall'Oglio n’a plus donné signe de vie depuis son enlèvement en 2013, en Syrie. C’est dans ce pays, qui était devenu le sien, qu’il œuvrait pour le dialogue et la paix entre les chrétiens et les musulmans. Une mission qu’il a conduit jusqu’au bout et qui lui vaut l’admiration de ses amis. René Guitton est l’un d’eux. Avant de mourir en mai 2023, il lui a rendu un dernier hommage dans un livre intitulé Paolo, la présence de l’absence, aux éditions Desclée de Brouwer. 

 

Paolo dall'Oglio en 2011. Crédit photo :  Cécile Massie.Paolo dall'Oglio en 2011. Crédit photo : Cécile Massie.

 

"Ta religion jamais rassasiée a toujours été le goût des autres", voilà ce que dit René Guitton de son ami disparu Paolo Dall'Oglio. Un "goût des autres poussé à l’extrême" même, selon l’historien et écrivain Patrick Girard, ami des deux disparus. Il faut dire que c’était la marque de fabrique de ce jésuite d’origine italienne, qui fut "l’une des figures phare du dialogue islamo-chrétien"

 

 

 

Faire cohabiter chrétienté et islam

 

Une marque de fabrique perceptible dans le monastère de Mar Moussa qu’il avait réhabilité. "C’est un lieu extraordinaire et impressionnant situé dans la montagne... qui comprend notamment des fresques murales d’une beauté à couper le souffle", décrit Patrick Girard. C’est dans ce lieu hors du temps que le père Paolo Dall'Oglio avait "voulu faire cohabiter à la fois la spiritualité chrétienne et la spiritualité musulmane". Un véritable défi, auquel s’ajoutait celui de la vie en mixité, qui posait elle-aussi problème en Orient.  

 

Une volonté de synthèse entre les deux religions tellement poussée que Paolo Dall'Oglio "pouvait aussi bien réciter le Notre-Père que la Fatiha, c’est-à-dire la profession de foi musulmane", raconte Patrick Girard. Un souhait de coexistence, proche de l’inculturation, qui n’était pas vu d’un bon œil par tous. Ces prières interconfessionnelles n’étaient pas "sans créer un certain nombre de problèmes avec la hiérarchie catholique syriaque locale qui était un peu plus réservée sur le dialogue interconfessionnel", ajoute l’historien.

 

 

 

Les autorités le trouvaient particulièrement encombrant

 

 

 

Prêt à se dévouer jusqu’au martyre

 

Très actif dès les prémices du printemps arabe en 2011, le père Paolo s’est investi en recevant dans son monastère de nombreux intellectuels opposants au régime de Bachar el-Assad. Au point de devenir persona non grata et d’être expulsé de la Syrie en 2012, "parce que les autorités le trouvaient particulièrement encombrant". Même à distance, Paolo Dall'Oglio est resté impliqué, avant de finalement retourner dans son pays de cœur en 2013. "C’était une attestation de sa fidélité à tous ceux qu’il avait rencontré", affirme Patrick Girard.

 

Son sens du sacrifice, le religieux l’a poussé jusqu’au bout, en allant à la rencontre du leader de Daech, l’émir Abou Bakr al-Baghdadi, fin juillet 2013. "Il savait très bien tous les risques qu’il prenait mais c’était sa particularité que de vouloir... prouver par une sorte de démarche sacrificielle, combien la solidité du dialogue interconfessionnel islamo-chrétien pouvait pousser du côté chrétien, un certain nombre de gens à se dévouer jusqu’au sacrifice et jusqu’au martyre."

 

Depuis cette date, Paolo Dall'Oglio est porté disparu, sans que l’on sache si c’est l’organisation État islamique ou le régime de Damas qui l’a enlevé. "Les dernières nouvelles que l’on a du père Paolo, c’est un article du Times en 2019 qui voudrait qu’il soit toujours vivant", rappelle Patrick Girard. Tout comme René Guitton, lui-aussi veut garder espoir. 

 

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