La prière, contemplation du Christ

"Jérusalem c’est notre trésor !" Sœur Marie, supérieure du monastère du mont des Oliviers à Jérusalem, est venue ici plusieurs fois, avant de s’y installer en 2019. "Entre venir à Jérusalem et y habiter il y a un grand écart. On découvre la complexité de cette ville, son énorme richesse, c’est prodigieux et énormément compliqué... Pour moi nous sommes ici au cœur du monde. Tous les conflits du monde, ils se vivent en miniature ici. Oui, on est au centre." Vivre à Jérusalem, quand on est chrétien, c'est "comprendre ce Jésus juif", marcher dans les pas de cet homme pétri de la prière d'Israël. 

Le mont des Oliviers, le lieu de la prière

C’est ici qu’a été édifié en 1896 le monastère des bénédictines de Notre-Dame du Calvaire. Sur cette colline qui fait face à la vieille ville de Jérusalem, on aperçoit les remparts, le dôme du Rocher, et plus loin la basilique du Saint-Sépulcre. De l’autre côté, c'est le désert de Judée, le désert des tentations.

Le mont des Oliviers "c’est le mont de la prière", rappelle Sœur Marie. On l'appelle aussi le mont des Galiléens car pour se rendre à Jérusalem, quand on vient de Galilée, on arrive par le désert de Judée, la route de Jéricho et le mont des Oliviers. Au moment des fêtes de pèlerinage, "Jésus campait avec sa famille sur ce mont".

Jésus passait ses journées dans le Temple à enseigner ; mais ses nuits, il sortait les passer en plein air, à l’endroit appelé mont des Oliviers. Et tout le peuple, dès l’aurore, venait à lui dans le Temple pour l’écouter
Lc 21, 37-38

"Les derniers moments de la vie du Christ se sont joués là. Avec une tension extrême", décrit la religieuse. Après le Temple, "lieu de l’affrontement", Jésus "se repliait au mont des Oliviers pour souffler, pour respirer, pour prier son père et retrouver des amis qui l’accueillaient". 

Une méthode pour prier : la lectio divina

Depuis six ans, les bénédictines du mont des Oliviers proposent des temps de retraite autour de deux axes : la lectio divina et la contemplation, deux pratiques qui ne vont pas l’une sans l’autre, assure Sœur Marie. Qu’est-ce que la lectio divina ? C’est une façon de lire les Écritures. "Ce texte doit venir en vous et à la fin il habite en vous !" La lectio, "c’est un texte sec qui devient savoureux"... Quand on ne peut pas aller à la messe, "vous avez toujours la parole ! Faites cette expérience que la parole est une nourriture", encourage la religieuse.

Il y a quatre étapes pour la lectio divina. La première c’est de demander l’aide de l’Esprit saint. Une fois bien installé dans un endroit où poser sa Bible, on peut dire : "Seigneur je suis là pour toi, éclaire cette parole, viens Esprit saint !" Ensuite, lire simplement le texte une première fois. "Indispensables, les crayons de couleurs ! La bible doit être crayonnée, je suis désolée mais pour moi, la bible n’est pas un livre sacré c’est vous qui êtes sacré, pas la bible. Vous allez l’annoter, la crayonner." On peut souligner en jeune les passages qui concernent Jésus, en vert les paysages…

Vient ensuite l’étape de la relecture, meditatio, au cours de laquelle "je travaille" le texte, "je le triture". On peut par exemple lire ce qui est écrit avant le passage étudié et ce qui vient après.  Puis oratio : je prie le texte. "Ce texte il est pour moi, pour ma prière. Je vais en faire une prière." On laisse résonner un mot en particulier. Enfin, contemplatio, "c’est un peu comme quand vous savourez un bon plat. Quand on déguste, on s’arrête !"

La contemplation, du cerveau vers le cœur

La contemplation est "de plus en plus nécessaire" et "de plus en plus recherchée" remarque Sœur Marie. "La contemplation c’est ce moment où on est descendu de notre tête à notre cœur… En Occident surtout on est dans nos cerveaux. Et donc il faut descendre du cerveau au cœur. La vie spirituelle n’est pas une question de cerveau c’est une question de cœur mais de cœur physique et même d’entrailles, il faut descendre jusqu’au fond du fond, on appelle ça le tréfonds. Descendre encore plus bas que les émotions qui nous envahissent énormément ! Là où vraiment Dieu nous habite, nous sommes habités par la présence…"

Pour contempler, il faut s’asseoir, les pieds bien à plat, les mains sur les genoux, garder les yeux fermés ou regarder une icône. Et respirer. "Doucement vous accueillez le silence habité de là où vous êtes." Et vous pouvez dire : "Seigneur tu es là tout au fond de mon cœur. Ô toi qui es chez toi tout au fond de mon cœur, donne-moi de te rejoindre tout au fond de mon cœur. Je suis ton enfant bien aimé, Seigneur. Viens me soulager Seigneur, viens habiter cette détresse que je ressens viens habiter mon angoisse, tu es ma joie."

Finalement, la contemplation, "c’est se laisser contempler par ce Dieu qui m’habite". Cinq minutes peuvent suffire pour contempler. "La prière est avant tout cette connexion avec Dieu qui m’habite, décrit Sœur Marie, ce n’est pas parler beaucoup c’est être avec." Comme le dit saint Paul, "Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi." (Ga 2, 20)