Petit à petit dans l'histoire de l'Église on a repris l'image du Carême comme un temps passé au désert. 40 jours avant Pâques comme Jésus dans l'évangile ou comme le peuple hébreu à sa sortie d'Égypte. Le désert c'est là où l'on découvre que Dieu nous donne tout...
Cela fait plus de sept ans que le dominicain Olivier Catel vit à Jérusalem. "Quand on arrive à Tel Aviv, on monte, c’est un petit peu comme la Provence, on s’installe à Jérusalem et puis un jour on prend sa voiture et dix minutes après on est dans le désert !" Un désert de rochers - rien à voir avec les dunes du Sahara - qui se trouve juste de l’autre côté du mont des Oliviers, vers l’Est, vers la vallée du Jourdain. "Cette expérience du désert, c’est l’expérience du silence. Il y a tout un tas d’imaginaires bibliques et personnels qui se fixent dessus." En Israël, le désert contraste avec des zones très vertes, comme Jéricho. "Et ce contraste entre la désolation et la richesse est sans doute qui marque le plus, et qui nous montre notre soif peut-être de tentations, de richesses, on a envie de vert… Le désert, on a envie d’y être et en même temps de le quitter assez rapidement pour aller vers les zones plus peuplées, de retourner là où sont les gens et la vie, finalement."
Le lieu où Dieu nous conduit, le lieu où il nous parle : ce sont les deux sens du désert dans la Bible. Le désert, c’est là où le peuple hébreu, à sa sortie d’Égypte, a été conduit par Dieu pendant 40 jours. Selon "un parcours que Dieu met en place pour guider son peuple et petit à petit le former", commente Olivier Catel. Le désert, c’est là où "le peuple hébreu va apprendre à être le peuple de Dieu", à "tout recevoir" de lui. Par exemple le pain, cette "manne", qui tombe du ciel dans le livre de l’Exode. Le désert, c’est le lieu de "la pédagogie divine", où les Hébreux apprennent à rendre grâce, nous dit le dominicain.
C’est au désert aussi que Jésus est conduit durant les 40 jours qui suivent son baptême. Les tentations de Jésus au désert, dans la tradition chrétienne, les tentations auxquelles le peuple hébreu a été soumis. "Jésus montre qu’il est capable de les surmonter, analyse Olivier Catel, et nous aussi, si nous recevons le baptême et que nous le suivons nous allons être capables de surmonter les tentations."
Ce que je découvre au désert, c’est que Dieu me donne tout
L’image du Carême comme un temps passé au désert s’est mise en place petit à petit dans l’histoire de l’Église. Comme dans le judaïsme, où il y a un temps de préparation avant une grande fête. "Il y a quelque chose de tellement profond, qui est tellement fondateur pour notre vie chrétienne qu’on a besoin de préparation." Le Carême est un temps d’intimité avec Dieu, explique Olivier Catel, où l’on se prépare à "ce grand événement qui est central dans notre foi : passer dans le tombeau avec le Christ pour sortir ressuscité avec lui".
Aller au désert, symboliquement cela signifie faire confiance à Dieu.
Se dire : "J’ai quelque chose à découvrir dans cet endroit. Et ce que je découvre c’est que Dieu me donne tout, ce que l’on appelle la Providence." Faire l’expérience du désert à la suite du peuple hébreu c’est aussi prendre conscience qu’on fait partie d’un peuple de croyants. "J’ai et besoin de Dieu et besoin des autres pour grandir." Olivier Catel compare le Carême à "un stage de recyclage de vie chrétienne où Dieu me prend à part pour me faire découvrir que c’est lui qui me donne tout, que je dois compter sur mes frères, vivre en Église, vivre en peuple de Dieu."
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On n’a pas tous la chance d’avoir 40 jours de congés ni même la possibilité de faire une semaine de retraite spirituelle… "Je pense qu’on peut essayer de prendre dix minutes avant de se coucher ou même dans son lit, de relire sa journée, conseille Olivier Catel, c’est la prière qu’on appelle d’alliance : qu’est-ce que j’ai vécu de beau aujourd’hui ? Y a-t-il eu un moment où j’aurais pu me comporter autrement ? Et puis envisager ma journée de demain en association Dieu : demain j’aimerais la force que ça se passe bien !"
Une prière qui peut se résumer ainsi : dire merci, demander pardon et envisager demain avec Dieu. Cela paraît très simple, ou peut-être difficile au contraire, si on se fixe de le faire chaque jour. Mais cela vaut la peine de s’obliger un peu, assure le dominicain. Même si l’on n’a rien à dire. "Ce n’est pas les mots qui comptent mais d’essayer de développer cette relation [avec Dieu]." Vivre un temps de désert ça peut être aussi simple que cela : "Il vaut mieux commencer par quelque chose qui semble humble et petit et s’y tenir pendant 40 jours que de se faire un super plan, un super planning de début de Carême et puis avant le premier dimanche de Carême, on a déjà arrêté… !"
Les piliers du Carême sont la prière, mais aussi le jeûne et l’aumône. "Ici, en Orient, les gens sont végétaliens pendant 40 jours. Ils ne mangent aucune protéine animale." Frère Olivier Catel invite surtout les auditeurs à donner du sens à leur jeûne : "Le jeûne est lié à la solidarité avec les pauvres. Une chose que je ne mange pas, que j’économise, je peux mettre dans une petite boite ce que j’économise pour ensuite à la fin du Carême la donner aux pauvres. C’est la plus grande tradition de l’Église des premiers siècles, les premiers chrétiens faisaient ça..."
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