C'est pour évoquer le drame des migrants lors des Rencontres méditerranéennes, que le pape François se rend à Marseille, les 22 et 23 septembre. Le sort des réfugiés est l'un des marqueurs de son pontificat. Quelle est la place de l'exilé ou du réfugié dans la pensée chrétienne ?
Le pape François se rend à Marseille du vendredi 22 au samedi 23 septembre. Il l'a redit à plusieurs reprises, il ne se rend pas "en France", mais aux Rencontres méditerranéennes. Le chef de l'Église catholique entend évoquer avec les évêques des pays méditerranéens le drame des migrants. Un sujet qui marque véritablement son pontificat. Quelle est la place de l'exilé ou du réfugié dans la pensée chrétienne ? Évêque d'Arras, Mgr Olivier Leborgne a pris la parole sur le sujet. Son essai "Prière pour les temps présents" (éd. Seuil, 2020) a fait grand bruit.
À 59 ans, Mgr Leborgne a redécouvert ceci : "Juste après la naissance de Jésus, Marie et Joseph doivent partir en Égypte." À peine né, Jésus, c’est-à-dire Dieu, est devenu un exilé. "Quel sens ça peut avoir que celui qui librement décide de s’incarner à ce moment-là de l’histoire, sur ce territoire-là de l’histoire ?" demande l'évêque. Car au fond, "Dieu n’est pas contraint par les événements !"
Pour l’évêque, cette redécouverte d’un Dieu fragile et exilé a été un véritable "coup de poing". "Il y a une profondeur de l’incarnation que je n’avais pas perçue. Une profondeur d’un Dieu qui choisit immédiatement d’entrer dans l’une des fragilités les plus décapantes qui soient, qui est celle de la migration."
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Évêque d'Arras depuis 2020, Mgr Olivier Leborgne est témoin du sort dramatique des migrants, en particulier ceux qui, à Calais, espèrent embarquer pour le Royaume-Uni. Le 24 décembre 2021, il a envoyé un signal fort : il a célébré la messe de Noël au beau milieu d’un camp de réfugiés érythréens. C’était en réponse à une invitation du prêtre jésuite Philippe Demeestère, ancien aumônier du Secours catholique du Pas-de-Calais, connu pour avoir fait une grève de la faim.
Cette messe de Noël avec les migrants de Calais, Mgr Leborgne avait reçu "des pressions" pour ne pas la célébrer. Pourtant, il est d’usage pour les évêques de fêter Noël avec des personnes en situation de précarité ou des personnes fragiles… "Surpris" et même "désarçonné", il y est tout de même allé. Il se souvient d'un "moment de fraternité extraordinaire !" "On était là, sur le terrain avec des migrants, une quarantaine d’Érythréens orthodoxes, chrétiens..." Il y avait aussi "des militants" et "des familles".
Célébrer Noël au milieu d'un camp de réfugiés : le message est d'autant plus fort que la fête est pour beaucoup vécue comme un moment hors du temps, réconfortant... Olivier Leborgne, lui parle du "drame" et du "tragique" de Noël. "Le drame de Noël, dit-il, c’est vraiment celui d’un Dieu qui rejoint tous les exilés." De quoi bousculer l'image idyllique de la fête et tout ce qui relève de "l’émotion" - certes il en faut, admet l’évêque. "L’émotion devant l’enfant, déjà, dit sans doute quelque chose d’une reconnaissance d’un Dieu qui plonge dans la fragilité. Mais il n’y plonge pas avec émotion, il y plonge dans le tragique des situations concrètes – peut-être qu’on est passés à côté, oui."
De quoi réveiller aussi les chrétiens. En qui croyons-nous ? En un Dieu merveilleux qui nous émeut ? "L’espérance que Noël annonce est rude et âpre", écrit l’évêque d’Arras. "L’espérance de Noël, ce n’est pas l’émotion du petit Jésus dans la crèche, c’est le tragique du Fils de Dieu qui plonge dans notre chair pour vivre l’exil immédiatement."
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