Avec Diognète, la théologie politique a son association à Lyon

La société doit-elle être neutre de toute conviction religieuse ? Dans un pays où la laïcité est considérée comme un pilier de la démocratie, l'expression de la foi dans la sphère publique ne cesse de générer des crispations. Pourtant, elle a aussi ses défenseurs, à l'instar des membres de l'association Diognète. Chaque mois, ils organisent des rencontres à Lyon, au Café Simone, au Collège Supérieur ou au Parvis Part-Dieu, lieu de vie spirituel et culturel ouvert sur le monde du travail, pour « relever le défi posé par la privatisation du religieux dans notre société » selon Jean Noël-Dumont, qui dirige le séminaire de Théologie politique proposé par Diognète.

Agrégé de philosophie à 23 ans, enseignant en classes préparatoires à Sainte-Marie Lyon pendant plus de quarante ans et formateur d'un grand nombre de professeurs de philosophie, il défend une philosophie accessible à tous et revendique sa foi catholique. « Une large opinion est d'accord pour dire que la religion, ça regarde la vie privée et qu'elle n'a pas à avoir d'incidence sur la vie commune, ce qui pour un croyant est une difficulté insurmontable parce qu'il ne peut pas se contenter d'une dévotion privée, il souhaite secourir ses frères, témoigner et donc il ne peut pas rester dans sa chapelle ». Pour lui, « on vit avec une mentalité schizophrène qui sépare complètement la sphère religieuse et la sphère publique » et cette distinction serait « mortifère pour la dimension religieuse qui perd complètement sa signification ». 

« L'Église est d'abord elle-même une réalité politique »

Le rapport entre religion et politique chez Simone Weil, le lien entre christianisme et démocratie, le concept de loi naturelle et de bien commun politique ou encore le rôle politique des chrétiens... Diognète propose chaque mois des rencontres avec des théologiens, des historiens et des philosophes dans des réunions « un peu savantes, il faut le dire, mais accessibles ».

Toutes ont l'objectif d'aider les chrétiens à se positionner « par rapport à l'exercice du pouvoir ». Une théologie politique qui ne cherche pas à « dire aux politiques ce qu'il faut faire » car « les croyants ne peuvent pas attendre de la loi civile qu'elle applique la loi religieuse » estime le passionné d'éducation et de transmission membre de l’Académie catholique de France, au risque de générer une situation de théocratie dans laquelle « on peut ne pas souhaiter revenir ».

En revanche, le créateur du Collège Supérieur, centre de réflexion et de formation au cœur de Lyon, veut aider « les chrétiens, qui sont des gens de bonne volonté, [à] retrousser leurs manches [pour] aller au devant de leurs frères dans les œuvres sociales, politiques, collectives » arguant que « c'est l'Église qui est d'abord elle-même une réalité politique. ll y a une vocation politique de la religion chrétienne. Elle se vit essentiellement comme communion fraternelle. La communion, c'est à la fois la communion à l'hostie, mais c'est la communion à la communauté ». 

Pour construire le programme, les administrateurs de Diognète revendiquent prendre « les meilleurs » des théologiens et philosophes « qui n'ont pas toujours accès à la place publique en tant que chrétiens ». Ainsi, les sujets sont choisis selon l'intérêt que présentent les intervenants, pour ne pas proposer une réunion qui serait « comme une dissertation avec une conclusion à la fin. On invite des amis. On choisit les orateurs et non pas les sujets. C'est ce qui nous permet de garantir qu'on rencontre à chaque fois des gens stimulants, compétents, imaginatifs, surprenants ».

La prochaine réunion, samedi 18 janvier, abordera le lien entre religion et politique chez Simone Weil avec Emmanuel Gabellieri au Parvis Part-Dieu.