L'Église catholique face aux abus sexuels sur mineurs, publié chez Bayard en 2019 propose un tour exhaustif de la douloureuse crise qui ébranle l'Église. Son auteure, Marie-Jo-Thiel, médecin, philosophe, théologienne, éclaire chaque semaine cette lecture de façon très pédagogique.
Au-delà des Abus, chaque lundi à partir de 19h10 sur RCF Alsace.
Pourquoi un enfant prend-il une part active à la disqualification ou au bannissement d’un parent (le parent ciblé) sous l’influence de l’autre parent (le parent aliénant) ? L’aliénation parentale ou Syndrome d’Aliénation Parentale (SAP) toucherait environ 10 % des enfants dont les parents sont séparés.
Invité de l’émission, Jean-Georges Rohmer évoque deux situations de sa pratique :
- Les expertises sur des présumés auteurs de violences sexuelles sur leurs enfants (que des pères dans sa pratique) et où est demandé le retrait des droits parentaux. Dans ce climat de conflictualité globale radicale, la mère se met subitement – après déjà tout un temps de conflits – à accuser le père de violences sexuelles… La parole des enfants est prise en otage.
- Des pères en obligation de soins pour suspicion d’agressions sexuelles dont on apprend plus tard le non-lieu (fausses accusations).
Le point commun de ces situations tragiques est la souffrance de l’enfant.
Cette émission est la dernière de la série « Au-delà des Abus »
Pour continuer la réflexion :
- Marie-Jo Thiel, L’Église catholique face aux abus sexuels sur mineurs, Montrouge, Ed. Bayard, 2019.
- Marie-Jo Thiel, Anne Danion-Grilliat, Frédéric Trautmann (dir.), Abus sexuels : écouter, enquêter, prévenir, Strasbourg, Presses universitaires de Strasbourg, Coll. Chemins d’Éthique, 2022.
En 2006, dans l’affaire dite de Joncquière, quatre enfants de cinq ans pratiquent des attouchements sur une petite fille dans la cour de l’école maternelle. Une plainte est déposée et le parquet des mineurs diligente une enquête de gendarmerie tandis que la presse se saisit de l’affaire… Mais peut-on parler pour autant d’agressions sexuelles à cet âge-là ? N’est-on pas en présence d’une projection de fantasmes relevant de la sexualité adulte sur des enfants ? Observer c’est une chose ; criminaliser en est une autre !
Juridiquement, un enfant plus âgé peut agresser sexuellement un autre, mais un jeune de moins de 15 ans ne peut donner pleinement son consentement. De jeunes enfants jouent à papa-maman ou au docteur, mais ce n’est pas une agression. De même quand ils jouent à la guerre, on ne les inculpe pas pour tentative de meurtre… Parfois c’est le bon sens qui manque…
La prise en charge des personnes âgées dépend de la manière dont on observe les violences sexuelles dont elles sont les auteurs : qualitativement ou quantitativement ? Le but thérapeutique en dépend (troubles à supprimer ou à diminuer). Mais il faut également examiner l’acceptabilité du traitement, le rapport bénéfice-risque, l’efficience…
Des médicaments spécifiques au comportement sexuel ne sont pas disponibles mais des antipsychotiques peuvent être efficaces, à condition de les adapter à l’âge, à la fonction rénale et hépatique, à la sensibilité cérébrale…
Le cerveau des personnes âgées est fragile : parfois c’est « simplement » son environnement qui dysfonctionne : une déshydratation, une hypoglycémie, une sous-nutrition chronique, le deuil d’un proche qui précipite dans la décompensation… Et dans ces cas, il faut remédier à la cause !
Des comportements sexuels inappropriés peuvent être le fait de personnes âgées en raison de leur structuration psychique et elles seront connues comme agresseurs de longue date. Elles peuvent également apparaître de novo alors que rien ne laissait augurer ces actes ou attitudes : langage obscène, masturbation en public, attouchements, agressions…
Ces comportements sexuels inappropriés doivent être différenciés des comportements appropriés car toute personne – et les plus âgées aussi – a besoin d’amour, de relations fraternelles, de caresses, etc. Or dans un EHPAD, cette requête de tendresse peut choquer. Elle pose aussi la question du consentement de l’autre personne, ce qui ne va pas toujours de soi… Cliniquement les comportements sexuels inappropriés sont fréquemment reliés à la démence et aux maladies dégénératives dont elles peuvent être le premier signe par désinhibition brutale.
À la semaine prochaine pour la prise en charge !
L’IRM fonctionnelle s’appuie sur des mesures de l’activité électrique et/ou métabolique. Conséquemment ne peut-on tenter de contrôler les violences sexuelles en agissant par ce biais ? Il n’est pas exclu en effet qu’on puisse modifier des comportements en agissant sur le cerveau soit par stimulation électrique extérieure, soit par des puces : on le fait déjà « accidentellement » en essayant de soigner certaines pathologies comme le Parkinson, ou certaines douleurs difficiles à traiter autrement, ou en utilisant cette stimulation pour améliorer des capacités sportives… Mais cela reste aujourd’hui un problème de société. Un autre lieu d’intervention porte encore les réactions au stress.
Plutôt que de parler de « violences sexuelles », il pourrait être plus pertinent de parler de « sexualisation de la violence ». Mais comment investiguer cette violence ?
Il y a bien sûr l’abord par les sciences fondamentales, les modèles animaux… Pour autant la recherche n’est pas facile car l’on ne saurait vouloir reproduire la violence pour l’étudier et il serait inadmissible éthiquement d’observer la violence sexuelle sur un.e mineur.e sans intervenir pour la stopper… Et puis peut-on dire comme dans l’expérience de Milgram : « Je n’ai fait qu’obéir aux ordres » ? Une issue se trouve dans la « violence virtuelle », via des photos et des enregistrements… Rendez-vous la semaine prochaine pour en savoir plus !
Les CRAVS – Centres Ressources pour les auteurs de violences sexuelles – apportent des ressources à différents types de publics, y compris aux justiciables.
Responsable du CRAVS Alsace, Jean-Georges Rohmer, invité de l’émission, rappelle que si les auteurs de violences sexuelles sont en général obligés par la justice, ils peuvent aussi directement s’adresser aux CRAVS, pour diverses raisons. D’autres fois encore, ce sont les familles de ces agresseurs qui proposent de ne pas rentrer en justice contre eux à condition que ceux-ci soient suivis au CRAVS. Ce qui est ni éthique ni légal. Parfois ce sont les victimes qui reprochent à la justice d’accorder aux justiciables un accès aux soins des CRAVS. Cela reste pourtant essentiel en raison de la dignité de tout être humain et pour éviter les récidives.
Les CRAVS – Centres Ressources pour les Auteurs de Violences Sexuelles – apportent des ressources à différents types de publics. Parmi eux les professionnels de la justice, et en particulier les conseillers d’insertion et de probation.
Responsable du CRAVS Alsace, Jean-Georges Rohmer, invité de l’émission, évoque les activités des conseillers d’insertion et de probation qui appartiennent à l’administration pénitentiaire mais aident à la réinsertion après (voire pendant) la prison. Le CRAVS est lié par convention au service d’insertion et de probation ; chaque mois une rencontre entre les deux instances y est organisée.
Les CRAVS – Centres Ressources pour les Auteurs de Violences Sexuelles – apportent des ressources à différents types de publics. Parmi eux les professionnels de la justice, et en particulier les magistrats et les avocats.
Responsable du CRAVS Alsace, Jean-Georges Rohmer, invité de l’émission, évoque l’importance des contacts avec les magistrats à la recherche d’outils de compréhension des passages à l’acte. Le centre ressources permet de répondre à des « étonnements » (par ex. devant la réitération des faits) mais aussi d’expliquer ce qui pourrait ou non être utile sur le plan thérapeutique, etc. Les avocats défendent d’abord leurs clients et sont plus distants de l’institution, mais ils peuvent également faire appel au CRAVS pour des activités de conseil.
Dans certaines familles, existe un « climat incestueux », une ambiance baignant dans le fusionnel et le transgressif, qui entraine inéluctablement au bout d’un moment un passage à l’acte sexuel.
Ce climat déstructure la jeune génération et facilite le passage à l’acte qui déstructure encore plus les victimes (cercle vicieux). À l’inverse si un enfant a une idée claire de sa place dans la famille, il pourra plus facilement repousser avec indignation la demande de faveurs sexuelles d’un beau-père par exemple, sauf s’il s’agit d’une agression brutale ou si l’enfant est très jeune.
Nouvelle publication : Marie-Jo Thiel, Anne Danion-Grilliat, et Frédéric Trautmann (dir.), ABUS SEXUELS. ÉCOUTER, ENQUÊTER, PRÉVENIR, Presses universitaires de Strasbourg. Voir contenu et formulaire de précommande à tarif réduit et franco de port (avant le 15 février) : http://ethique.unistra.fr/journees-internationales-detudes/
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