3 novembre 2023
Répliques sur la Doctrine sociale de l’Eglise et les migrants
Je pense qu’on ne m’en voudra pas de faire ici sur RCF un peu de publicité pour une station concurrente, en l’occurrence France Culture et son émission Répliques plus que trentenaire, animée le samedi matin par Alain Finkielkraut.
J’ai envie de rendre hommage à ce dernier car, même s’il s’est peut-être un peu crispé en vieillissant et même s’il s’autorise, à juste titre à mon avis, à participer aux débats qu’il anime, il manifeste toujours la même qualité d’écoute et un vrai goût pour le dialogue entre les points de vue.
L’émission de samedi dernier était exemplaire. Deux jeunes philosophes, à peine trentenaires, Elisabeth Geffroy et Foucauld Giuliani, débattaient, à la lumière de la doctrine sociale de l’Eglise, qu’ils maîtrisaient parfaitement l’un et l’autre, du message du pape François à Marseille sur les migrants. La question était de savoir si le pape était bien resté dans son rôle, ce dont visiblement Alain Finkielkraut doutait.
Oui, lui ont cependant répondu les deux intervenants. Le pape et l’Eglise
doivent être attentifs aux drames humains et formuler une parole prophétique qui peut bien sûr déranger, pour briser le mur de l’indifférence, ne pas se résoudre à la banalité du mal. Le pape ne s’adresse d’ailleurs pas aux migrants eux-mêmes pour les encourager à quitter leurs pays, mais à ceux qui accueillent pour que soient mis en œuvre les moyens face aux situations de détresse.
Dans le débat, l’une a ensuite insisté sur le rôle des nations, en Europe, peut-être prises trop à la légère par le pape, pour faire régner la justice et offrir un cadre propice au développement des attachements humains afin de permettre à chacun passer du singulier à l’universel. A condition qu’une inspiration transcende la nation et sa tendance à nous ramener à nos particularités, a répliqué l’autre débatteur. La philosophe Simone Weil pointait l’enracinement comme l’un des principaux besoins de l’âme humaine et le modèle d’intégration à la française a sans doute toute sa valeur, expliquait l’une, si du moins les structures sociales telles que les syndicats ou les paroisses, par exemple, étaient encore assez fortes, alors qu’elles sont plutôt menacées d’affaissement. Tandis que l’autre insistait sur l’injustice structurelle de l’ordre économique mondial qui se caractérise par la surproduction, le pillage des ressources et une
transformation de la nature et des humains en marchandises, loin de servir le bien commun cher à la Doctrine sociale de l’Eglise. Les migrants en sont les premières victimes.
2
Dès lors, le pape paraît légitime à interroger le système et ses finalités, quitte à ébranler l’ordre établi. Il interroge ainsi la forme même de nos vies en prônant la sobriété heureuse et le don de nous-mêmes. Et les intervenants du débat semblaient en définitive s’accorder sur la nécessaire conversion de chacun de nous.
On peut retrouver cette émission en podcast en suivant ce lien :
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/repliques/le-message-du-
pape-francois-3999947
Droits image: ©Gerd Altmann de Pixabay