Manche
Le ballet diplomatique a déjà bien commencé sur les côtes normandes. Emmanuel Macron reçoit 25 chefs d’État, à l’occasion des commémorations du 80e anniversaire du D-Day, jour du Débarquement. Si les dirigeants mondiaux viennent rendre hommage aux 156 000 soldats venus le 6 juin 1944 libérer l’Europe, la cérémonie prend une allure diplomatique à l’heure où la guerre est de retour sur le Vieux Continent.
25 chefs d’Etat, des parcours très protocolaires et des prises de parole attendues. Ce n’est pas une COP ou un G20 qu'accueille la Normandie ce jeudi 6 juin, mais bien le 80e anniversaire du Débarquement. Le 6 juin 1944, les Alliés débarquaient sur les plages de Normandie pour libérer la France et l’Europe de l’occupation allemande. Une séquence historique aux résonances bien diplomatiques, 80 ans plus tard.
Charles III, Rishi Sunak, Justin Trudeau, Joe Biden, et enfin Volodymyr Zelensky. Le ballet diplomatique d’Emmanuel Macron se poursuit en cette journée de commémorations pour les 156 000 soldats débarqués sur les plages de Normandie il y a 80 ans. Pourtant, si l’hommage aux vétérans de la Seconde Guerre mondiale est au cœur de toutes les prises de parole - “Vous êtes venus ici, alors vous voilà à jamais chez vous sur le sol français”, déclarait notamment Emmanuel Macron aux anciens combattants - le rendez-vous est avant tout diplomatique pour tous les dirigeants réunis. “C’est la réaffirmation d’une communauté Euro-Atlantique, une communauté de toutes les démocraties”, souligne Gérard Araud, ancien représentant permanent de la France auprès des Nations unies.
Les États-Unis et le Canada nous disent encore aujourd'hui : nous sommes prêts à venir à votre secours si vous êtes attaqués
80 ans après, et alors que la guerre frappe de nouveau l’Europe, la séquence mémorielle qui se joue sur la plage d’Omaha Beach est, à tout point de vue, symbolique. “L’OTAN est la concrétisation très matérielle de l’affirmation de la communauté Euro-Atlantique. Les États-Unis et le Canada nous disent encore aujourd’hui : nous sommes prêts à venir à votre secours si vous êtes attaqués. Nous représentons une communauté de valeurs, une communauté de démocratie”.
À la veille de la prise de parole du président ukrainien Volodymyr Zelensky au Palais Bourbon, la guerre en Ukraine s’invite sur les plages de Normandie. “Les Russes sont à l’offensive et la question se pose : comment aider les Ukrainiens à tenir face au rouleau compresseur russe ?”, s’interroge l’ancien diplomate et ambassadeur français aux États-Unis. “Les Américains reculent avec l’usage des armes qu’ils livrent aux Ukrainiens sur le territoire russe. Les Européens, eux, l’acceptent, dans la mesure où les cibles sont les bases à partir desquelles le territoire ukrainien est bombardé”, rappelle-t-il. Un différend stratégique dans l’approche de la guerre qui divise l’Europe et les États-Unis.
EN DIRECT | Cérémonie internationale commémorative du 80ème anniversaire du débarquement de Normandie à Omaha Beach. https://t.co/whvRDFX03J
— Élysée (@Elysee) June 6, 2024
La question de la négociation sera aussi très certainement au cœur des discussions. “Au bout de deux ans et demi de guerre, le moment est sans doute venu de commencer à discuter de cela après l’élection américaine, quel que soit le vainqueur. Pour Trump, ce sera brutal, mais pour Joe Biden, certainement aussi”, explique le spécialiste. “On voit bien que les États-Unis essayent de se dégager du conflit, qui pour eux, n’est pas essentiel. L’essentiel, c’est la Chine”.
S’il a rapidement été question d’inviter une délégation russe au 80e anniversaire du D-Day, la possibilité a vite été écartée. “Ça aurait été surréaliste au moment où les Russes bombardent les villes ukrainiennes”, assure Gérard Araud. Jamais un absent n’aura été aussi présent : Vladimir Poutine, pourtant convié et présent en 2014, est bien resté en Russie pour ce 80e anniversaire du Débarquement. Ainsi, les commémorations prennent une tournure anti-Kremlin. “La cérémonie n’est évidemment pas contre la Russie, mais revêt d’un aspect anti-russe”, admet Gérard Araud, “d’autant plus que le président ukrainien Zelensky est invité”.
En 2014, à l’époque où le dialogue avec Vladimir Poutine était encore audible, les Allemands et les Français avaient lancé un “format Normandie”. L’objectif : servir de médiateur entre l’Ukraine et la Russie. Dix années plus tard, le dispositif se solde par un échec. “Cette médiation, qui avait conduit aux accords de Minsk n’avait pas abouti”, se souvient l’ex-représentant de la France aux Nations unies. “En 2014, il y avait encore un espoir de pouvoir parler avec la Russie, de pouvoir négocier. En 2024, c’est la guerre”, ne peut que constater Gérard Araud.
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