Vendredi 26 juillet, le monastère de Saint-Hilarion sur le site archéologique Tell Umm el-'Amr dans la bande de Gaza a été inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco et notamment au patrimoine en péril, du fait de la guerre en cours depuis le 7 octobre dans l’enclave. Cette décision est une garantie de protection supplémentaire et un signal de soutien pour les salariés du site.
Cela faisait déjà plusieurs années que les professionnels du site archéologique et ses soutiens se battaient pour cette inscription. En 2012, un premier pas avait été fait avec l’inscription du monastère de Saint-Hilarion sur la liste indicative de l’Unesco. La guerre déclenchée le 7 octobre dernier, après l’attentat perpétré par le Hamas, a accéléré le processus. L’Unesco avait alors placé le site archéologique sous protection renforcée, "pour bien signaler aux belligérants que le lieu était important et qu’il fallait le préserver malgré la situation apocalyptique que connaît actuellement Gaza", explique René Elter, archéologue et directeur du programme scientifique de préservation du monastère depuis 2001. L’inscription officielle sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco, vendredi 26 juillet, est donc un pas supplémentaire pour la protection du site.
Pour l’archéologue détaché de l’École biblique et archéologique française de Jérusalem (Ebaf), c’est "une décision très forte de la communauté internationale d'avoir pris cette position d'une part, et d'avoir soutenu la demande de la représentation palestinienne à l'UNESCO". Il se réjouit "qu’aujourd’hui, ce lieu dépasse les frontières de la Palestine et qu’il soit sous le regard de la communauté internationale, qui doit maintenant le préserver et le protéger".
Aujourd'hui, ce lieu dépasse les frontières de la Palestine. Il est sous le regard de la communauté internationale, qui doit maintenant le préserver et le protéger
Si les experts de l’Unesco ont inscrit le monastère sur leur liste, c’est notamment pour son caractère exceptionnel et unique. En effet, ce monastère fondé par Hilarion au début du IVe siècle est le premier de Terre Sainte. "C'est-à-dire qu'avant Hilarion, il y avait déjà des religieux dans la région, mais ils vivent en ermite, isolés, dans des grottes ou au fond du désert… Et là, on a une autre philosophie qui se met en place, c'est-à-dire qu'on va passer de l'érémitisme au monachisme […] et ça va se diffuser ailleurs également dans la région à partir de ce moment-là", explique l’archéologue qui insiste également sur le point de passage stratégique qu’incarnait le monastère à l’époque.
Au-delà du lieu en lui-même, "l’autre monument que l’on doit absolument protéger à Gaza, c’est l’équipe qui travaille sur le monastère", insiste René Elter. Celui qui est aussi coordinateur du programme Intiqal, lancé en 2017 par l’ONG Premières urgences internationales, insiste sur la dimension d’école du site. " Avec ce programme, le monastère de Saint-Hilarion est aussi devenu un lieu de formation pour des jeunes, pour leur apprendre à connaître, préserver et à entretenir ce patrimoine qui est le leur", raconte-t-il. 110 jeunes ont été formés jusqu’à présent et 40 salariés – presque autant d’hommes que de femmes - travaillent sur le site.
Pour eux, c'est une grande bouffée d'air, un ballon d'oxygène dans le chaos dans lequel ils vivent depuis presque une année
La reconnaissance par l’Unesco de la "valeur universelle" de ce site est donc "symboliquement importante pour l’équipe", qui est restée à Gaza. "Pour eux, c'est une grande bouffée d'air, un ballon d'oxygène dans le chaos dans lequel ils vivent depuis presque une année", répète-t-il, ravi de pouvoir compter sur davantage d’aide matérielle et financière à l’avenir.
René Elter attend la fin de la guerre et se dit "prêt pour le jour d’après". "On a mis en place tout un process pour faire une évaluation générale de l’état du patrimoine de Gaza, pour pouvoir le protéger et le renforcer ponctuellement", affirme-t-il. Mais compte tenu des nombreuses destructions, il faudra sûrement de nombreuses années pour abattre tout ce travail…
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