Le pape François a lancé dimanche un appel inédit en faveur de la paix entre l’Ukraine et la Russie. Cet appel intervient au lendemain de l’annexion de quatre territoires ukrainiens par la Russie.
Face au risque d’escalade nucléaire qui découle de ces annexions, le pape François exhorte les parties au cessez-le-feu. Il appelle Vladimir Poutine à "arrêter cette spirale de violence et de mort", y compris "pour le bien de son peuple" et demande au président Volodimir Zelinsky d'être "ouvert à des propositions de paix sérieuses". Le pape interpelle plus largement "tous les protagonistes de la vie internationale et les responsables politiques des nations". Ils les conjure de promouvoir "des initiatives de dialogue" contre la "folie" de la guerre. Fait inhabituel, François a remplacé sa méditation habituelle sur les textes du jour par cette exhortation, signe de sa profonde préoccupation à l’égard de ce conflit entre Moscou et Kiev.
"Par cet appel le pape exprime au fond l'angoisse du monde" estime l'historien Jean François Colosimo. Pour l'auteur du livre "La crucifixion de l’Ukraine : mille ans de guerres de religions en Europe" aux éditions Albin Michel, " cette montée aux extrêmes engage une escalade dont on ne sait ou elle ne peut aboutir...".
"En annexant les territoires, Vladimir Poutine inverse le sens de cette guerre. Il veut désormais passé pour l'agressé. Si les troupes ukrainiennes avancent désormais dans ces territoires, la Russie s'estimerait menacé dans ses intérêts vitaux et pourrait riposter par une frappe nucléaire tactique, c'est à dire par une mini bombe d'Hiroshima projeté sur le champ de bataille, ce serait enfreindre l'interdit nucléaire qui régit l'ordre du monde depuis 1945" explique le théologien orthodoxe.
Pour Jean François Colosimo, la marge de manœuvre est étroite car "l'Ukraine est un pays orthodoxe à 70, 80%. Le monde catholique ukrainien est articulé autour de deux pôles très différents, un catholicisme latin romain et un catholicisme grec catholique, anciennement orthodoxe de rite byzantin rattaché à Rome."
Au-delà de cette mosaïque chrétienne, l'historien observe que "le pape semble inquiet par l'attitude du patriarche orthodoxe russe, le funeste patriarche kirill dont on voit qu'il parle aujourd'hui comme Oussama Ben laden. Du haut de sa chaire, il promet aux soldats qui montraient au front et qui seraient tués qu'ils seraient exonérés de tous leurs péchés et qu'ils iraient directement au paradis."
Enfin, la relation avec la Chine fait partie des enjeux du pontificat du pape Jésuite. Or la route de Pékin passe par Moscou en raison de l'alliance entre Vladimir Poutine et Xi Jinping. Autant de paramètres qui rendent sinueux le chemin diplomatique du Saint Siège.
Le pape François n'avait pas fait de telle exhortation depuis 2013, lors de la guerre en Syrie. Au Vatican, certains comparent cet appel à celui de Jean XXIII lors de la crise de Cuba en 1962.
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