Depuis la condamnation de Marine Le Pen, deux écoles s'affrontent. Si beaucoup tempèrent et défendent l'État de droit, à droite, on dénonce une décision politique scandaleuse. Gérald Pandelon est avocat pénaliste au barreau de Paris et à la Cour pénale internationale de La Haye aux Pays-Bas. Philosophe et essayiste, il publie L'Inquisition française, des juges contre la justice ?. Il revient sur cette condamnation déjà historique et la vérité judiciaire selon la philosophie du droit.
L'exécution provisoire (qui applique une condamnation sans attendre les résultats d’un éventuel appel) fait son apparition pour la première fois le 11 octobre 2013 sous la volonté de François Hollande, alors président de la République, et de Christine Taubira, garde des Sceaux.
Pour Gérald Pandelon, avocat pénaliste au Barreau de Paris et à la Cour pénale internationale de La Haye (Pays-Bas), celle-ci pose problème : "Lorsque vous assortissez une condamnation à l'exécution provisoire, cela signifie que, d'une certaine manière, le juge anticipe la vérité judiciaire. Or la vérité en matière judiciaire est très évolutive".
Selon lui, l'exécution provisoire a pour effet de fixer immédiatement la vérité sur un dossier. Dans le cas du procès de Marine Le Pen, cette dernière a été condamnée à quatre ans de prison dont deux ferme et à une peine d'inéligibilité de cinq ans avec exécution provisoire.
Néanmoins, elle a fait appel de cette décision. Étant donné que son dossier sera rouvert au plus vite, en juin 2026, elle aurait la possibilité de se présenter à la présidentielle en 2027, à condition qu'elle gagne son procès en appel. "Je n'ai jamais vu un juge pénal assortir sa sanction d'une exécution provisoire. Le sort qui est réservé à Madame Le Pen est un peu un cas sui generis", estime Gérald Pandelon.
En réalité, selon les chiffres du ministère de la Justice, 58 % des peines de prison prononcées en 2023 ont été accompagnées d'une exécution immédiate. Dans le cas de Marine Le Pen, seule la sanction d'inéligibilité l'a été. Et de leur côté, les juges ont tout de même rendu dans la foulée du verdict un jugement de 152 pages pour justifier les raisons de la sanction prononcée le 31 mars.
En science politique, on parle d'une forme de tridimension, c'est-à-dire qu'il y a le pouvoir, l'autorité et les pouvoirs d'influence. L'autorité judiciaire revêt une force inférieure au pouvoir, selon l'avocat pénaliste. Cependant, il constate aujourd'hui une forme d'inversion de la hiérarchie des normes : "L'autorité judiciaire est devenue, qu'on l'accepte ou non, le vrai pouvoir", assure-t-il. Pour lui, l'exécution provisoire est donc l'émanation de l'autorité judiciaire.
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