Ce mercredi à Lourdes, ont été entendus les responsables des nouvelles instances créées pour lutter contre les violences sexuelles dans l’Église. Ses responsables ont été invités à faire un premier bilan devant les évêques réunis pour leur assemblée plénière de printemps. Par exemple, 526 personnes victimes d'abus se sont manifestées auprès de l'Inirr, l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr).
Depuis le 5 janvier, 526 victimes d’abus sexuels dans l’Église se sont manifestées auprès de l’Inirr, l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation. Parmi elles, certaines ne s’étaient jamais confiées, d’autres avaient déjà dénoncé les faits qu’elles avaient subis, bien avant la parution du rapport de la Ciase.
Sur ces 526 personnes, 68% sont des hommes. Une proportion inférieure à l’évaluation faite par la Ciase, qui avait estimé à plus de 330.000 le nombre de victimes d’abus commis par des prêtres ou des laïcs en mission ecclésiale depuis 1950.
Les victimes dénombrées par l’Inirr ont aujourd’hui entre 56 et 70 ans. Un quart d’entre elles avaient entre 6 et 10 ans quand elles ont été abusées, 70% d’entre elles avaient entre 11 et 15 ans au moment des faits. Des situations de violences qui ont duré parfois pendant plusieurs années : 15% des victimes ont été abusées durant des périodes allant de trois à 20 ans.
46% des personnes qui se sont manifestées disent attendre "une reconnaissance". "La reconnaissance, c’est vraiment l’établissement que les faits ont existé", explique la présidente de l’Inirr, Marie Derain de Vaucresson. Et, "dans une proportion extrêmement importante" - "je ne m’attendait pas à ça", confie-t-elle - les victimes attendent "la reconnaissance que des manquements de la part de l’Église ont existé".
Cette reconnaissance pourra être formalisée par un courrier officiel, une médiation ou une rencontre avec une autorité ecclésiale. "Certaines personnes veulent que ça aille vite parce qu’elles ont déjà, elles, réfléchi à cette question et qu’elles ont aussi été accompagnées", observe la présidente de l'Inirr. Pour d’autres, elles ont déjà été accompagnées au sein de leur diocèse et veulent tourner la page. D’autres encore "n’ont pas été assez accompagnées" et "ne savent pas du tout ce qu’elles veulent et peuvent demander". Pour elles, "ce sera pour elle un accompagnement très long", prévoit Marie Derain de Vaucresson.
Sur les 57 % des personnes qui souhaitent une réparation, seulement la moitié demandent une réparation financière. "Il y en a qui demandent des sommes d’argent, rapporte la présidente de l’Inirr, et certaines paraissent dérisoires par rapport à ce qu’elles ont vécu ou les conséquences dans leur vie, d’autres demandent des sommes qui correspondent à des remboursements de soins…"
Pour le montant des réparations financières, il n’y a pas encore de barème précis. Le sujet est encore à l’étude, notamment avec la commission reconnaissance et réparation (CRR), l’autre instance de réparation initiée par la Conférence des religieuses et religieux de France (Corref).
Présent à Lourdes et invité à s’exprimer devant les évêques, le président du Selam, le fonds qui va permettre d’indemniser les victimes. Gilles Vermot-Desroches a rapporté que 20 millions d’euros ont déjà été récoltés. "Les diocèses sont des contributeurs essentiels mais non exclusifs de ce fonds", peut-on lire dans le communiqué de presse du Selam.
Son président tient à souligner que le fonds Selam n’est pas alimenté par le dernier du culte. "Il est financé par les moyens propres de l’Église mais aussi par des legs ou des dons des fidèles qui décident de soutenir l’Église dans cette démarche." Sur les 20 millions, 5 ont déjà été attribués à "l’accompagnement financier des victimes" et 1 million d’euros à "des démarches de prévention et de mémoire".
Les évêques de France avaient annoncé en novembre 2021, la création de neuf groupes de travail, constitués de prêtres, d’évêques, de religieux et de religieuses mais aussi de laïcs. Des hommes et des femmes chargés d’étudier aussi bien l’analyse des causes des violences sexuelles, le partage des bonnes pratiques pour agir en cas de signalement, l’accompagnement des prêtres mis en cause ou encore l’accompagnement spirituel...
Près de cinq mois après leur lancement, ces groupes sont bien constitués, a-t-on annoncé ce mercredi à Lourdes. Au total, une centaine de personnes ont été mobilisées, parmi elles des victimes d’abus sexuels. Ils doivent rendre leur conclusion au printemps 2023.
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