Savoie
Robert Badinter, symbole de l’abolition de la peine de mort, s’est éteint dans la nuit du 8 au 9 février. Avec son célèbre discours du 18 septembre 1981, il convainc l’Assemblée d’adopter cette loi avec 363 voix contre 117. L’ancien garde des Sceaux fera de la condition humaine sa priorité.
Samedi 10 février, Emmanuel Macron a annoncé qu’un hommage national sera rendu à l’ancien ministre de la justice et avocat Robert Badinter, mercredi 14 février à midi, place Vendôme, à Paris.
Avec le décès de Robert Badinter, c'est une grande voix qui disparaît pour la France, mais aussi pour le monde. Il ne s’est pas contenté d’abolir la peine de mort pour les français. Au contraire, il a lutté pour une abolition universelle. « Il a été sur tous les fronts, pour les congrès mondiaux contre la peine de mort, et il a répondu présent, physiquement quand il le pouvait », soutient Bernadette Forhan, vice-présidente de l’ACAT, l’action des chrétiens pour l’abolition de la torture.
Un homme incarne le combat mené par Robert Badinter contre l’abolition de la peine de mort : Philippe Maurice. Condamné à mort en 1980 pour avoir tué un policier, il est finalement gracié le 11 mai, par François Mitterrand en 1981. « Je pense que cette attitude de Robert Badinter montre à quel point il avait confiance dans l’être humain », affirme-t-elle.
C'était un homme qui avait foi en l'être humain. En ça, il était un très grand humaniste.
Arrivé en prison sans diplôme, Philippe Maurice a su rebondir en devenant directeur de recherche. Pour Robert Badinter, un homme ne pouvait être réduit à un acte : « C'était un homme qui avait foi en l'être humain. En ça, il était un très grand humaniste » insiste-t-elle.
Sans son intervention, Philippe Maurice aurait été exécuté. Le 15 septembre 2021, lors d'un colloque à l'Assemblée nationale pour marquer les 40 ans de l'abolition, le dernier condamné à mort a témoigné de sa reconnaissance devant un parterre de politique et d'abolitionnistes. Bernadette Forhan se souvient de cet hommage émouvant : « On a vraiment la concrétisation du combat de Robert Badinter, qui a toujours lutté pour la vie. »
Dans cette abolition de la peine de mort, les chrétiens, et en particulier l’épiscopat se sont investis ouvertement pour cette cause. En 1977, la commission sociale de l'épiscopat français a publié une réflexion autour de cette condamnation avec comme point final : il faut abolir la peine de mort. La vice-présidente le rappelle : « N'oublions pas que le président de la commission sociale était Monseigneur André Fauchet, l'évêque de Troyes. Il avait soutenu Robert Badinter, et n’hurlait pas avec les loups qui réclamaient la peine de mort pour Patrick Henry. »
Robert Badinter n'a jamais oublié le soutien qu'il avait reçu. Pourtant, au moment du vote à l’Assemblée nationale, il disposait de la majorité. C’est au niveau du vote du Sénat que l’épiscopat a joué un rôle majeur. « Il nous a expliqué que les évêques avaient exercé un lobbying discret mais efficace auprès des sénateurs », témoigne Bernadette Forhan.
Lorsqu’en octobre 2017, le pape François a dit que la peine de mort était contraire à la dignité humaine, c'était gagné.
Pour l’Eglise Catholique, la reconnaissance de la peine de mort comme un acte illégitime est plus récente. Ce n’est qu’en 2018, que le pape François a modifié l'article 2267 du catéchisme, la référence officielle de la doctrine catholique. Une victoire pour la vice-présidente de l’ACAT : « Lorsqu’en octobre 2017, le pape François a dit que la peine de mort était contraire à la dignité humaine, c'était gagné. ».
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