A l’ère des fake news, les réseaux sociaux ne font pas vraiment office de bons élèves. Une étude publiée mi-septembre par la start-up News Guard révèle que la plateforme chinoise TikTok, très prisée par les adolescents, est le pire réseau social pour s’informer. Une diffusion massive, qui pourrait avoir des conséquences directes sur l'accès à l'information de la tranche d'âge des 12-16 ans.
Une étude publiée mi-septembre par la start-up News Guard révèle que la plateforme chinoise TikTok est le pire réseau social pour s’informer. En chiffres, le rapport montre que 20 % des vidéos de la plateforme contiennent des informations erronées, soit une vidéo sur cinq. Ukraine, fusillades dans des écoles américaines, crise sanitaire, tous les derniers sujets internationaux brûlants de ces derniers mois ont fait les frais d’une diffusion massive de fausses informations.
Derrière les contenus purement informationnels, se cache, pour les 67 % d'adolescents qui utilisent le réseau social chinois TikTok, un enjeu de réalité parallèle pas vraiment représentative de la société. "On part de l'information réelle à une croyance. Tout ce qui est de ce registre-là - c'est-à-dire croyance sans vérification - va à un moment donné construire un certain rapport aux autres et à la société", raconte le pédopsychiatre Thierry Delcourt.
Une réalité parallèle qui constitue forcément un danger chez les 12-16 ans, qui ont parfois du mal à se construire un esprit critique. "On le voit avec la présentation des stars et influenceurs. Ils font croire que l'on peut avoir recours à la chirurgie esthétique n'importe comment. Toutes ces choses-là vont, à un moment donné, apporter un modèle persécutif, paranoïaque aux enfants, ou encore leur apporter un modèle d'idéal qui n'est pas conforme à la réalité", poursuit le pédopsychiatre.
Si la plateforme chinoise TikTok est pointée du doigt par l'enquête de NewsGuard, elle n'est pourtant pas la seule à diffuser massivement des fausses informations. Un constat encore plus vrai au pic de la crise sanitaire. Un rapport publié par l’ONG Avaaz en 2020 montre que la diffusion d’informations erronées sur la santé, et en l’occurrence le covid-19, a généré 3,8 milliards de vues sur Facebook en un an, dans cinq pays dont la France.
"La désinformation existe partout. Peu importe les réseaux sociaux", explique Alexandre Turcotte, créateur de contenus sur TikTok. Il tempère cependant : "Quand on fait des recherches sur Google, les suggestions que l'on va nous proposer vont être validées par des figures d'autorité, un site web reconnu comme un média d'actualité. Alors que sur TikTok, ce qui est mis en avant, c'est le contenu viral. Le contenu qui crée des discussions, des tensions est mis 'en autorité', en avant de l'application". C'est ainsi que les vidéos de fake news très visionnées sont partagées en masse car elles sont mises en avant par l'algorithme, détaille encore le spécialiste des réseaux sociaux.
La question se pose donc désormais : doit-on éduquer nos jeunes et adolescents à l'information sur les réseaux sociaux, alors qu'ils sont engorgés de fake news ? Le pédopsychiatre Thierry Delcourt estime que ce n'est pas à l'école et à l'éducation nationale d'informer les 12-16 ans sur les bonnes pratiques sur les réseaux sociaux.
"Cela pose le problème du déplacement de la dimension éducative des parents vers l'école. [...] "Eux-mêmes sont pris dans le même système, il faut donc qu'il y ait une zone où l'enfant reçoit des messages clairs par rapport à ça. On met en évidence l'école mais seulement on demande tellement de choses à l'école... Puis, les professeurs ne sont pas forcément formés à cela", soupire le pédopsychiatre rémois. "Il manque un créneau qui permettrait cette qualité et cet enrichissement des enfants sur leur capacité de jugement par rapport à ce qu'ils peuvent recevoir et entendre", assure Thierry Delcourt.
Instagram, Facebook, TikTok, ce ne sont pas seulement ces influenceurs qui font le buzz pour gagner de l'argent. Ils sont aussi vecteurs de vraies et bonnes informations vérifiées. En première ligne : le média HugoDécrypte et toute son équipe qui publient des vidéos quotidiennes pour résumer l'actualité aux 12-16 ans.
Laurie Gaudiau est journaliste dans ce nouveau type de média et explique comment ils ont dû s'adapter aux codes de la plateforme TikTok. "il faut avoir conscience des pratiques de TikTok : il faut faire de l'information rapide, en moins d'une minute. Avec beaucoup de visuels, et une bonne accroche". Aujourd'hui, l'équipe du média "maîtrise les clés de l'application" et "a conscience de la cible que l'on [ils] touche(nt)", raconte Laurie Gaudiau. Avant de poursuivre : "il n'empêche que l'on arrive à faire des sujets très sérieux et on fait des millions de vues donc cela veut dire que même les petits gamins de 14-15 ans s'informent et s'intéressent à l'actualité", se réjouit la journaliste.
De son côté, Thierry Delcourt trouve un autre côté positif à l'avènement des médias sociaux. "Quand c'est bien utilisé, avec une capacité critique et que l'on n'est pas soumis par l'algorithme qui va diriger notre vie, nos pensées, notre imaginaire et nos préoccupations, les réseaux sociaux sont un outil pour ouvrir la communication vers des domaines auxquels on n'aurait pas accès. Je pense notamment aux enfants des petites villes ou de la campagne qui vont ouvrir sur la vie citadine et sur des données auxquels ils n'ont pas accès quand ils sont dans un espace reculé", s'égaye le pédopsychiatre.
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