Il y a deux ans, le 17 mars 2022, commençait le premier confinement. Pour en parler, c'est la voix de Gonçalo M. Tavares, grand écrivain portugais, qui tient son "Journal de la Peste", fait d'informations inquiétantes et de petits échos du quotidien. Un livre publié aux éditions Bouquins.
Souvenez-vous, c’était il y a deux ans tout pile, jour pour jour, le 17 mars 2020, nous entamions un premier confinement. Sans savoir quand il allait s’arrêter, sans imaginer qu’il y allait en avoir d’autres, et aussi une, deux, trois doses, un couvre-feu, un passe sanitaire... Sans oublier ces mots affreux qu’on inventa pour décrire nos nouvelles relations de travail, en présentiel ou en distanciel, voire en visio… Bref, croisons les doigts, on en sort tout doucement, soyons prudents, et si je vous en parle aujourd’hui, ce n’est pas pour plomber l’ambiance une nouvelle fois, c’est simplement parce que le Covid – ou la Covid-19 si vous préférez le féminin comme le suggère l’Académie française car les sigles et acronymes ont "le genre du nom qui constitue le noyau du syntagme dont ils sont une abréviation" – la Covid, donc, n’est malheureusement pas encore sortie de notre quotidien qu’elle déjà rentrée dans les livres.
Eh oui, ça commence et on retrouvera certainement cette ambiance "pandémie" dans pas mal de romans des prochaines années. Alors, plus sérieusement, pour commémorer deux années d’inquiétude, de maladie et de bouleversement, j’ai choisi de vous parler d’un journal de pandémie, avec un regard un peu décalé, un récit de l’étranger puisque Gonçalo Tavares est un écrivain portugais, et quel écrivain !, héritier et protégé de son compatriote le Nobel Jose Saramago. La Covid n’a pas épargné le Portugal, ce que raconte avec patience Tavares.
En fait, il n’y a pas eu véritablement de confinement en 2020 au Portugal, il a fallu attendre le printemps 2021. Mais devant le développement de l’épidémie, les annonces terribles qui frappaient l’Italie, la France, le romancier a décidé de tenir son journal. Du 23 avril au 20 juin 2020, il notait des choses aussi diverses que ce qu’il retenait des informations, comment s’organisait la vie quotidienne, une écriture marquée par un sentiment d’urgence : "Je mettais toute l’énergie de la journée dans le texte – ne pas garder des munitions pour le jour suivant : c’est maintenant ou jamais. Le lendemain je me réveillais et j’adoptais la même attitude : c’est maintenant ou jamais."
Alors que le nombre de décès est exponentiel, Tavares se demande quand son pays va être emporté par la vague : "Le sauvetage est ce qui se trouve entre le trop tôt et le trop tard", écrit-il en mars 2020. Il sort le moins possible, regarde de vieux films, va acheter son pain, répète la phrase du père Cantalamessa, au Vatican : "Il a suffi du plus petit élément de la nature, un virus, pour que l’humanité se souvienne qu’elle est mortelle."
Il faut se souvenir que nous n’avions aucune perspective, que l’inquiétude était à son comble : "En pleine nuit, à 2 heures du matin, ils crient en exigeant que le jour se lève, écrit Tavares. Mais il n’a pas encore commencé." Il collecte des citations, comme celle-ci tirée d’un film : "Je sais que tu veux être heureux, mais il y a des choses plus importantes." Et encore ce message venu de Grèce : "Ici, je crains que le pire soit devant nous, dans la santé et l’économie. Cependant, il y a aussi la joie. " Allez, on va y croire, ça va aller, mais on n’a pas fini d’en parler, même dans les livres.
"Journal de la Peste", de Gonçalo M. Tavares, est publié aux éditions Bouquins
Chaque jeudi à 8h44, Christophe Henning (La Croix) et Christophe Mory (RCF et Radio Notre-Dame) présentent le livre de la semaine.
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