Les arbres commencent déjà à perdre leur feuille et le mercure descend de jour en jour. L'occasion pour Jean Pruvost de revenir sur l'histoire du mot "automne".
Voila deux semaines que l'automne a commencé, mais il est encore temps de s'intéresser à l'histoire du mot et à ses différentes évocations dans la littérature classique.
Curieusement, dans certains dictionnaires, le mot « automne » est victime de ce que l’on appelle les
définitions « relationnelles ». Par exemple : « Automne : saison de l’année située entre l’été et l’hiver »,
définition première du CNRS. Définition imparable. Mais à mieux y réfléchir, l’été étant la saison entre le
printemps et l’automne, et le printemps, celle se situant entre l’hiver et l’été, on attrape assez vite le tournis, sans avoir l’impression de progresser. Quand diable commence donc l’automne ? Heureusement, le dictionnaire en question, le TLF offre force citations. Par exemple, Madame de Staël précisant en 1807 dans Corinne qu’« on était alors au commencement de décembre, il n’y avait point encore de neige ; mais l’automne, saison de décadence, touchait elle-même à sa fin et faisait place à l’hiver ». Beau phrasé rappelant que début décembre, c’est encore l’automne. Une deuxième citation, de Romain Rolland, extraite de Jean- Christophe, en 1905, nous en apprend un peu plus : « Après l’été pluvieux, l’automne rayonnait. Dans les vergers, les fruits pullulaient sur les branches. Les
pommes rouges brillaient comme des billes d’ivoire. Quelques arbres déjà revêtaient hâtivement leur plumage éclatant de l’arrière-saison. »
Il faut lire l’article « centenaire » où Giraudoux, en 1926, dans Bella nous confie à son tour
que « L’automne n’en finissait pas. Il semblait résolu pour une fois à atteindre vivant sa limite officielle, ce 20 décembre enseveli d’habitude sous l’hiver. » Alors, vite, abandonnons ce beau Trésor de la langue française pour consulter un petit volume marqué au sceau du pissenlit, le Petit Larousse : « Automne : saison qui succède à l’été et précède l’hiver… » et, enfin, « qui dans l’hémisphère boréal commence le 22 ou le 23 septembre et finit le 21 ou le 22 décembre. »
Pour ce qui est de l'orthographe, lisons Richelet en 1680 offrant dans l’ordre alphabétique : « Auteur, Automate, Automnal », puis « Autonne », mais là, surprise ! il s’écrit alors A.U.T.O.N.N.E. Donc, quand j’étais petit et que je l’écrivais avec deux « n », c’était accepté ! Poursuivons : « Autonne. Substantif masculin. Mais le plus souvent féminin. » Ainsi on disait « une belle autonne ». Puis vient un second article : « Autonne », toujours avec deux « n » : « L’âge qui approche de la vieillesse. » Bien, Quelle citation est proposée ? « Maintenant que mon sang se glace, et que mon autonne se passe, tout est perdu pour moi. » Ah merci beaucoup Richelet, on se sent tout de suite plus joyeux ! Vite, passons à Furetière, dix ans plus tard. Eh bien cette fois-ci « automne » s’écrit avec un « m » et un « n ». Mais la marque du genre est nette : « fém. » suivie d’une remarque sans état d’âme : « Il étoit autrefois masculin. » Automne était donc à l’époque de Furetière féminin, comme le confirme d’ailleurs l’exemple : « Quant l’été est pluvieux, on a d’ordinaire une belle automne. » En tout cas, c’est plus plaisant qu’une définition de verbicruciste que voici : « Après avoir été ». Concluons avec la plus belle devinette du mot automne : « Violoniste verlainien… » Ah, franchement, rien de plus beau que « les longs sanglots des violons de l’automne » !
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