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Du fronton jusqu’au chœur, découvrez les secrets et l’architecture époustouflante de la cathédrale de Reims

Un article rédigé par L.D. - RCF, le 28 mars 2024 - Modifié le 28 mars 2024

À l’occasion de la Semaine sainte et de Pâques, l’équipe de RCF a déplacé ses studios dans le monastère Saint-Thierry, à quelques kilomètres de la capitale champenoise, Reims. Thierry Lyonnet vous emmène à la découverte d’un des joyaux de la ville des sacres des rois : la cathédrale Notre-Dame, qui surplombe la ville depuis le XIIIème siècle. 

©Tontonflingueur/ Wikipedia commons©Tontonflingueur/ Wikipedia commons

Depuis huit siècles, la cathédrale Notre-Dame de Reims domine la ville champenoise et est visible à plusieurs kilomètres à la ronde. En plus d’avoir hébergé de grands temps forts de l’Histoire française, elle est l’une des réalisations majeures de l’art gothique en France tant pour sa statuaire que pour son architecture. Voici les spécificités de son architecture qu’on peut y découvrir et celles qui ont disparu. 

Des souvenirs du passé enfouis dans les entrailles de la cathédrale

La visite commence au milieu de la nef, à l’emplacement exact du baptistère de la première basilique. Car la cathédrale Notre-Dame de Reims n’a pas toujours été aussi grande. Pierre après pierre, la petite église a évolué au fil des époques pour devenir la cathédrale que l’on connaît aujourd’hui.

Il reste d’ailleurs toujours des traces de cet ancien temps, mais dans un lieu tenu secret des touristes. "Il reste des éléments de fondation sous la cathédrale actuelle. Ce sont des vestiges de l’église paléo-chrétienne et carolingienne", décrit Patrick Demouy, professeur d’histoire du Moyen-Âge à l’université de Reims. Toutes ces ruines se trouvent dans une crypte, où seuls les spécialistes peuvent circuler.

Dans cet endroit méconnu se trouvent des pierres qui ont connu l’évènement le plus associé à la cathédrale : le baptême de Clovis vers l’an 500. Par ce sacrement, le premier roi des Francs instaura une autre légitimité que celle du sang au travers de l’onction conférée par les évêques au nom de Dieu. Cet héritage et cette marque de l’Histoire est d’ailleurs un thème très présent au sein de la cathédrale. Ainsi, de nombreux vitraux, notamment ceux de Marc Chagall, reprennent les grands évènements royaux comme le sacre de Saint-Louis et de Charles VII

Le revers du fronton et la grande « Rose », deux chefs d’œuvre architecturaux

Outre le thème du sacre, on trouve dans cette cathédrale le thème de la Vierge. On la retrouve sur des sculptures, des vitraux mais surtout sur cette immense « Rose » à l’entrée de la cathédrale. À l’époque, cette rosace de vitraux est une prouesse architecturale. "Ils ont supprimé le tympan […] et ils ont déployé une grande rose dans toute la largeur de la nef, soit plus de 12m de diamètre", s’émerveille le professeur Demouy. De plus, au-dessus de la rose, le triforium a été ajouré "laissant une place exceptionnelle aux verrières", complète-t-il. Une autre rose est également présente au nord de la cathédrale et ses vitraux datent toujours, pour la plupart, du XIIIème siècle. 

On peut dire que c’est unique un revers aussi orné et aussi ajouré dans les cathédrales gothiques

D’ailleurs c’est tout le revers de cette cathédrale qui est impressionnant. "On peut dire que c’est unique un revers aussi orné et aussi ajouré dans les cathédrales gothiques", affirme Patrick Demouy. L’enseignant l’admet : "nous sommes un peu déconcertés au premier abord devant l’abondance des images, des statues et des vitraux, mais ce qu’il faut souligner c’est que l’ensemble de ce décor appartient à un enseignement". L’enseignement des épisodes forts de l’Ancien et du Nouveau Testament, ceux qui concernent la Vierge et les premiers témoins du Christ. 

©Steven Zucker/Flickr

 

Une façade impressionnante et entièrement ornée

Retour devant l’entrée principale de la cathédrale. Sur ce parvis un peu plus serré qu’il ne l’était, la façade de la cathédrale est impressionnante. "Elle nous aspire et nous guide vers le ciel par ses lignes, ses deux tours harmonieuses", décrit le spécialiste du Moyen-Âge. Cette façade a été finie par les tours au 15ème siècle, soit deux siècles après la pose de la première pierre en 1211. Un temps relativement court comparativement à d’autres cathédrales, mais qui laisse tout de même des traces. "Il y a des statues plus anciennes que d’autres qui ont été ainsi juxtaposées […] cela est dû à la longueur des travaux et à des repentirs manifestes dans les projets". Ainsi le style médiéval se mélange à des inspirations antiques et de l’art amiénois

La sculpture part à l’assaut de cette grande muraille et se loge dans des gables, dans des tabernacles

Autre particularité de cette façade : elle est entièrement ornée. "La sculpture part à l’assaut de cette grande muraille et se loge dans des gables, dans des tabernacles" et se loge dans les moindres recoins, commente Patrick Demouy. Ici, c’est le thème du Christ qui est central. On y retrouve trois parties avec un fil conducteur : à gauche, c’est la passion du Christ et le Christ en croix, et en parfaite symétrie sur la droite, c’est l’annonce du retour glorieux qui est signifiée. Au centre, faute de place en raison de la rose, ce sont les témoins du Christ dans la région, c’est-à-dire les évêques et les martyrs qui sont représentés.

L’Ange au sourire, l’emblème de la cathédrale

Dans ce foisonnement de statues, l’une d’elle a gagné en notoriété, jusqu’à devenir le symbole de la cathédrale : L'Ange au Sourire, aussi surnommé Sourire de Reims. C’est un malheureux évènement qui la rend célèbre : l’incendie de la cathédrale, en 1914. "Le 19 septembre, un échafaudage en bois s’est enflammé sous les bombardements allemands. En brûlant, une poutre est tombée et a cassé la tête de l’ange", relate Patrick Demouy. Mutilée, cette statue devenait le symbole de la Passion de la cathédrale. Des morceaux furent ensuite récupérés et la statue fut restaurée, rendant à Reims son sourire. 

"Derrière l’anecdote de la statue martyr et restaurée, il y a un très beau message", poursuit-il, précisant que l’ange sourit à son voisin, un évêque martyr, pour lui annoncer qu’il allait entrer dans la joie de son maître. "C’est ça le sourire, c’est l’annonce d’une bonne nouvelle", résume l’enseignant. 

©Wikipedia commons

 

Un labyrinthe retiré en 1879 mais qui réapparaît parfois

Les amateurs de cathédrales remarqueront peut-être un détail : l’absence de labyrinthe dans la nef de la cathédrale. Pourtant celui-ci a existé pendant de nombreux siècles, avant d’être retiré en 1879, à cause du bruit que faisaient les enfants du quartier qui venaient y jouer et qui dérangeait les chanoines. C’est l’explication la plus simple, mais au fond cette suppression a surtout été le résultat d’une perte de sens, selon l’historien. "On l’a fait disparaitre, parce qu’on ne comprenait plus qu’elle était sa signification et sa fonction", estime-t-il. 

Le but premier de ce dédale était de rendre hommage aux architectes et aux maîtres d’œuvre ayant contribué à l’érection de la cathédrale. Ainsi, on pouvait voir sur l’ancien labyrinthe, leur signature et leur représentation. Mais au-delà de ça, le labyrinthe incarne une dimension symbolique et religieuse qui se fait "à double détente", explique Patrick Demouy. "D’une part au niveau communautaire et liturgique, le labyrinthe était utilisé au moment des fêtes pascales". Comme une procession suit le Christ aux enfers et en ressort derrière le Christ victorieux, ce parcours figurait "la descente puis la résurrection liturgique"

Le labyrinthe offrait également aux croyants une expérience de dévotion privée : "le fidèle seul et à genoux fait une sorte de pèlerinage miniature", une sorte de rite pénitentiel symbolisé par un parcours sinueux mais "si l’on se fie à la lumière qu’est le christ, on ne manque pas d’arriver au but", s’exclame Patrick Demouy. En effet, c’était bien le seul labyrinthe dans lequel on ne pouvait pas se perdre. De nos jours, il retrouve sa place de temps en temps, grâce à la vidéo-projection.  

Pernille Simone ©RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Vivez Pâques 2024 et la Semaine sainte avec les bénédictines
Pernille Simone ©RCF
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