Édouard Cortès fait partie de ceux qui ont choisi l’aventure. Que ce soit seul sur le chemin de Saint-Jacques de Compostelle, en couple et sans un sou de Paris à Jérusalem ou encore en famille du Puy-en-Velay à Rome, Edouard Cortès trouve son équilibre dans la marche. Dans ce deuxième épisode de la saison 2 du podcast Marche & rêve, il raconte comment ses longues marches l’ont façonné et comment elles ont nourri son âme.
Si son goût pour l’aventure a commencé dans une voiture, plus précisément lors d’un trajet Paris-Saïgon en deux-chevaux, c’est à pieds qu’Édouard Cortès s’est le plus épanoui. Il se souviendra longtemps de sa première marche en solitaire, en 1999, à l’âge de 19 ans seulement. Cette année-là, il a avalé les 1400 kilomètres qui séparent Notre-Dame de Rocamadour et Saint-Jacques de Compostelle en seulement 40 jours. "J'avais quand même une petite technique, c'est que je marchais plus longtemps que les autres, je me levais tôt, mais je ne dormais pas toujours dans les refuges", relate-t-il.
"C’était une erreur de jeunesse" reconnaît-il avec le recul, mais "une erreur merveilleuse". Il faut dire que ce Compostelle a été pour lui "un voyage initiatique". "C’était l’initiation à l’aventure et l’initiation au chemin intérieur", raconte-t-il. Et bien qu’il voit dans ce voyage un "passage" de l’adolescence à l’âge adulte, la marche est aussi pour lui une façon de "conserver la jeunesse".
C’est là, sur ce chemin entre la France et l’Espagne qu’Édouard Cortès a expérimenté pour la première fois ce qu’il appellera plus tard la "contempl’action", la contraction de la contemplation et de l’action. "Pour moi, la marche c’est l’équilibre. Quand je suis sur mes deux pieds et que je les bouge, je me sens vivre, je me sens exister […] J'ai besoin de cette petite musique intérieure et méditative, j'ai besoin de cette contemplation ambulante", explique-t-il.
Comme une continuité à cette première marche, le second grand voyage d’Édouard Cortès s’est aussi faite sur un chemin de pèlerinage, beaucoup plus long cette fois, entre Paris et le Saint-Sépulcre à Jérusalem. Pour celui qui a été élevé dans un milieu chrétien empreint d’histoire et de foi, marcher sur ces chemins était "capital" pour s’approprier l’enseignement reçu, mais aussi pour "faire rentrer [sa] foi à travers le corps".
J’ai trouvé que les chemins, c'était une manière de faire rentrer ma foi à travers le corps, par les pieds, par la chair et par la géographie ; de l’avoir chevillée au corps.
Plus qu’une simple marche, ce second voyage de 8000 kilomètres a été un véritable "retournement" dans la vie d’Édouard Cortès. D’abord parce que c’était son voyage de noces, à peine une semaine après leur mariage, mais aussi parce que les jeunes époux ont choisi de le faire sans aucune ressource, en s’abandonnant à la Providence. "Ça a ajouté une difficulté, mais ça a amené surtout la grande leçon pour nous, c'est que quand on s'abandonne à la vie, quand on s'abandonne aux autres, alors là, on reçoit de manière extraordinaire avec abondance", affirme-t-il, ravi d’avoir expérimenté "la bonté de Dieu" dans chacune de ces rencontres.
Malgré les intempéries, les menaces et la fatigue, avoir vécu cette "grande aventure" avec sa compagne, depuis la cathédrale Notre-Dame de Paris où il l’avait demandé en mariage jusqu’au tombeau du Christ à Jérusalem, a indéniablement renforcé son couple. "Quand on vit de grandes aventures à deux, peut-être qu’on est un peu plus armés pour traverser cette grande traversée qu’est la vie de couple", estime-t-il.
En 2013, 14 ans après sa marche à pas pressés sur le chemin de Compostelle, Édouard Cortès a vécu un voyage à un tout autre rythme. Avec sa femme, ses trois enfants, dont un bébé, et Octave, l’âne tirant leur carriole, il est parti du Puy-en-Velay pour rejoindre Rome, où ils ont rencontré le Pape.
"On était au rythme des enfants et au rythme de l'âne", c'est-à-dire d'une dizaine de kilomètres par jour seulement. Et si, dans un premier temps, ce rythme était frustrant pour le grand marcheur qu’il est, Édouard y a vite vu de la beauté. "J'aime cette lenteur. J'aime ce rapport direct au monde […] Vous êtes en proie avec la poussière, avec les arbres, avec le bivouac", raconte-t-il, heureux d’avoir vécu cette vie de nomade dont il avait toujours rêvé.
Je vais dehors travailler le dedans. Je vais à l’extérieur essayer de simplifier la vie intérieure
À travers ce voyage au rythme de l’âne, Édouard Cortès et son épouse Mathilde ont souhaité transmettre à leurs enfants la valeur de la simplicité, de la "sobriété heureuse" vers laquelle ils essaient de tendre. "On est en plus un peu de cette génération qui tourne le dos à l'argent, à la consommation, au profit, au gaspillage. Maintenant les consciences sont là mais on balbutie là-dedans. Et je crois que le premier pas, la marche est une formidable école de simplicité. Parce qu'elle vous amène le fait que vous devez suer, souffler, vous devez faire un effort".
En plus de lui permettre de "tordre le cou à la routine" et de "ne pas s’embourgeoiser", la marche est aussi un véritable exutoire. "Je vais dehors travailler le dedans. Je vais à l’extérieur essayer de simplifier la vie intérieure", explique celui qui est désormais installé à la campagne. L’inconfort que procure la marche est pour lui "un moyen de creuser en soi, de prolonger la quête, d'aller au plus profond de ses ténèbres, et aussi de ses belles profondeurs".
Pour découvrir ces aventures riches d'un chemin initiatique à un autre, écoutez dès maintenant l’épisode 2 de la nouvelle saison du podcast Marche & Rêve : La marche dans le désert.
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