Sonia et Alexandre Poussin ont marché du Cap de Bonne-Espérance en Afrique du Sud jusqu'au bord du lac de Tibériade. Trois ans de marche et 14 000 kilomètres plus loin, le couple décide cette fois-ci de parcourir l'île de Madagascar avec une charrette à zébus et leurs deux enfants. Leur épopée durera 4 ans. Ils racontent au micro de Thierry Lyonnet en quoi la marche est un formidable moyen de rencontrer l'autre mais aussi soi-même.
On voit souvent la marche comme une activité solitaire, d'introspection. Ce ne sont pas ses seules vertus. Alexandre Poussin dans son livre "Marche avant" est clair : "la marche possède des pouvoirs insoupçonnés, elle permet de partir à la découverte du globe, bien sûr, mais aussi à la découverte de l'autre et de soi-même". Pour l'aventurier, la marche est le moyen le plus simple et naturel de voyager, car pour lui nous sommes tous des marcheurs nés. Alors que nous vivons dans un monde de plus en plus virtuel, pratiquer la marche, et notamment en voyage, permet de vivre de vraies rencontres. "La marche c'est le plus court chemin pour aller vers l'autre" scande Alexandre Poussin.
La marche possède des pouvoirs insoupçonnés, elle permet de partir à la découverte du globe, bien sûr, mais aussi à la découverte de l'autre et de soi-même
À peine mariés, Alexandre Poussin propose à sa femme un voyage de noces hors normes : traverser l'Afrique à pied. À l'époque Alexandre, lui, est déjà un aficionado des grandes aventures. Il est un ami proche de Sylvain Tesson avec qui il a notamment fait le tour du monde à vélo. Sonia n'a jamais fait de voyages en marchant mais l'amour est plus fort : elle se laisse embarquer dans l'aventure. Rapidement, elle réalise que cette ballade africaine est faite pour elle. C'est l'une des plus belles aventures de sa vie. "J'ai pensé que j'avais été peut être mise au monde, j'étais venue sur terre peut être que pour ça, tellement j'ai été comblée. Pourtant Dieu sait si je pensais que je ne serais pas capable..." raconte-t-elle dans un sourire.
L'idée du voyage est de traverser l'Afrique du sud au Nord en suivant la vallée du Rift. Symboliquement les deux jeunes mariés ont choisi de suivre la trace des premiers hommes, du cap de Bonne-Espérance au lac de Tibériade. Ils ont réalisé à cette occasion à quel point la marche était centrale dans notre humanité. C'est grâce à elle que les premiers hommes sont "allés à la rencontre des autres, qu'ils se nourrissaient, qu'ils se déplaçaient, qu'ils ont conquis l'espace. L'Homme est devenu nomade très rapidement et aujourd'hui on a oublié ça, on a perdu ça. Donc on retrouve ça à travers le trekking, la marche. On retrouve ces choses qui sont très anciennement ancrées en nous, cette fragilité qui est une immense force, parce que quand on part marcher on est dépouillé de tout".
On retrouve ces choses qui sont très anciennement ancrées en nous, cette fragilité qui est une immense force, parce que quand on part marcher on est dépouillé de tout.
D'abord dubitatifs, puis interloqués, les peuples africains rencontrés au cours du périple d'Alexandre et Sonia Poussin ont mis du temps à comprendre que les deux aventuriers venaient pour les rencontrer. "Qu'est ce qu'ils viennent faire ici ? Il n'y a rien à voir ici, il n'y a que nous. Peut-être qu'ils viennent nous voir nous ? Mais pourquoi nous on a aucun intérêt ? Allons à leur rencontre pour savoir pourquoi ils sont là !" Donc déjà tout le boulot est fait. Quand on se présente à eux, c'est eux qui viennent à nous" explique Alexandre Poussin.
Cette vulnérabilité et simplicité de la marche ont permis aux deux aventuriers de faire de merveilleuses rencontres que ce soit en Afrique ou à Madagascar quelques années après avec leurs deux enfants. La marche leur a permis "de prendre le temps d'aller à la rencontre des hommes dans un monde qui tourne trop vite". Des rencontres gratuites et profondes à l'inverse des relations mercantiles que l'on peut avoir en étant un touriste en voyage. Alexandre Poussin se souvient ému de ce policier au fin fond du Zimbabwe qui les avait accueillis. Après la soirée passée ensemble à refaire le monde, Alexandre tend un billet pour participer au frais du repas. Le policier répond alors "Alexandre, tu n'as rien compris. Si tu m'achètes la seule chose qui me reste, le pouvoir de t'accueillir, de te donner et de pouvoir partager un repas qu'est ce qu'il me reste ? Il ne me reste plus rien. Vous les occidentaux vous voulez toujours prendre tout à tout le monde !".
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