Même à quelques mois de la retraite, le biologiste et président du Muséum d’histoire naturelle, Bruno David n’en a pas fini avec la vulgarisation. Il publie un énième livre dans lequel il raconte sa prise de conscience écologique : "Le jour où j’ai compris", publié aux éditions Grasset. De quoi faire réfléchir et réduire le fossé générationnel qui s’est installé autour du sujet de l’environnement et de la biodiversité.
"Accusé boomer, levez-vous. Eh oui je suis un affreux boomer né au milieu des années 50 et donc responsable, heureusement pas tout seul, de tous les maux de la planète." C’est ainsi que s'ouvre l'ouvrage que publie Bruno David, président du Muséum national d’histoire naturelle, "Le jour où j’ai compris". Face à cette accusation contre la génération du baby-boom, souvent jugée responsable du dérèglement climatique, le scientifique a voulu se défendre et recontextualiser. "L’objectif c’était de montrer qu’on ne pouvait pas avoir un regard rétrospectif et d’appliquer les clefs de lecture d’aujourd’hui aux années 60, 70." Et de réfuter fermement l’idée selon laquelle la période des Trente Glorieuses était une période de surconsommation, alors que "c’était une consommation d’équipement" à un moment où "il fallait sortir la France d’une forme de misère" et où l’occupation des espaces était vu comme un accompagnement du progrès en marche.
À l’époque, rien ne laissait présager le réchauffement climatique qui était pourtant déjà à l’œuvre, assure le paléontologue. Et pour cause, les conditions étaient loin de celles que l’on connaît ces dernières années. "Les températures de ces années-là ne nous laissaient pas présager d’un réchauffement climatique", raconte-t-il, relevés météorologiques à l’appui. Il a fait notamment jusqu’à moins 27 degrés un hiver à Lyon. Malgré cela, les premiers indices de la pollution provoquée par l’Homme lui sautent vite aux yeux : que ce soit en voyant les habitants du village de son grand-père jeter leurs ordures ménagères directement dans la Loire, en voyant la mousse s’accumuler dans le fleuve à cause des déjections du tannerie, ou en sentant les odeurs chimiques ramenés par le vent depuis la vallée de la chimie au sud de Lyon.
Bien qu’il ait grandi avec des parents naturalistes qui lui ont montré « la richesse et la beauté du monde vivant, minéral et géologique », la prise de conscience réelle de la pression qui pesait sur la biodiversité n’est arrivée que plus tard chez lui. « Le puzzle s’assemble vraiment au début des années 90 où là je prends conscience qu'il y a des problèmes d’environnement sur terre », raconte-t-il. En 1999, un autre évènement va marquer sa trajectoire de prise de conscience. Alors qu’il est en excursion dans un sous-marin au large du Pérou, pour observer les oursins qui sont sa spécialité, Bruno David se retrouve nez à nez avec un seau en plastique, à 2.500 mètres de profondeur. "Je revois ce seau comme si je l’avais vu hier, ça m’a vraiment choqué."
Depuis, le biologiste, paléontologue mais aussi directeur de recherche au CNRS, s’attache donc à vulgariser, non pas pour donner des leçons, mais pour faire prendre conscience à la population de la pression néfaste que l’Homme fait peser sur l'environnement et la biodiversité. Et de tirer la sonnette d’alarme dans son livre "À l’aube de la sixième extinction - Commet habiter la terre" (éd. Grasset, 2021). Bien qu’il assure que la Terre ne disparaitra pas de sitôt, il s’inquiète quant à la survie de certaines espèces et notamment celle de l’Homo Sapiens.
Si nous sommes des millions à faire des petits gestes, ça va finir par s’améliorer
Pour "les précédentes extinctions, il y a eu des facteurs externes à la vie qui [y] ont conduit, cette fois c’est une espèce qui est responsable des facteurs qui exercent cette pression sur la biodiversité et la conduisent vers une sixième extinction. On se menace nous-mêmes" déplore-t-il. Mais malgré terrible avertissement, le scientifique garde un brin d’espoir et d’optimisme : "Le sujet, c’est la vitesse de cette extinction, et la mauvaise nouvelle c’est qu’on va assez vite. Mais entre l’aube et l’après-midi, on peut peut-être agir rapidement... et si nous sommes des millions à faire des petits gestes, ça va finir par s’améliorer !"
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