LE POINT DE VUE DE MARIE-HELENE LAFAGE - Le vendredi 25 octobre dernier, dans le contexte des inondations qui ont touché plusieurs régions de France, le gouvernement a présenté son nouveau Plan National d’Adaptation. Il vise à préparer la France aux conséquences du changement climatique, auxquelles nous allons devoir faire face de manière croissante. Marie-Hélène Lafage nous le décortique.
Quand on parle d’agir en faveur du climat, c’est surtout pour limiter le changement climatique, pour réduire autant que possible les émissions de gaz à effet de serre. Dans les rapports du GIEC, on parle dans ce cas « d’atténuation ». L’adaptation, c’est tout autre chose : c’est le constat qu’à côté de l’atténuation, il faut faire face, quoi qu’il arrive, au changement climatique tel qu’il est déjà à l’œuvre et tel qu’il va se présenter demain, avec ses multiples conséquences. On pense bien sûr aux événements météorologiques extrêmes qui se multiplient, comme les sécheresses, les canicules, les fortes pluies qui entraînent des inondations comme en ce moment en Espagne… Mais au-delà de ces moments de crise, le changement climatique, c’est une transformation progressive de nos conditions de vie : le cycle de l’eau qui évolue, le littoral qui recule, la nécessité de faire évoluer les pratiques agricoles, l’enneigement qui devient plus rare…
L’adaptation a souvent amené des personnes engagées pour la préservation du climat à regarder de manière suspecte. Il faut dire que dans les années 70-80, alors que l’on prenait pleinement conscience de l’ampleur du changement climatique, les dirigeants des pays européens et américains ont opté pour l’adaptation par rapport à l’atténuation et à la transformation de leur économie, qui leur semblait trop coûteuse et désavantageuse. Des historiens comme Jean-Baptiste Fressoz ont montré que l’adaptation a d’abord été un choix d’irresponsabilité. Mais pour autant, et même s’il faut tout faire aujourd’hui encore pour limiter le changement climatique, il est tout aussi irresponsable de ne pas se préparer à ses conséquences. Il faut simplement tenir les deux ambitions, celle de l’atténuation et de l’adaptation. Car il est certain que l’on ne pourra pas non plus s’adapter à tout…
Le plan du gouvernement, qui vise à adapter la France à un scénario de + 4°, est une bonne nouvelle dans la mesure où l’État doit envoyer un signal fort en matière d’adaptation aux acteurs économiques, aux collectivités territoriales, aux populations. Mais la première limite, c’est qu’il ne s’accompagne pas de moyens suffisants en investissements pour préparer sérieusement l’avenir – par exemple pour que les communes repensent leur aménagement pour anticiper des vagues de chaleur et des inondations plus fréquentes. Il faut aussi que le gouvernement soit cohérent en ayant une action plus volontaire, en parallèle, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Enfin, il serait essentiel de s’appuyer davantage sur la société civile, de soutenir au niveau local les initiatives qui font de l’adaptation l’affaire de tous, en repensant collectivement l’avenir de nos territoires et en renforçant les solidarités.
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