Dans l'évangile de ce dimanche, Jésus donne un nouvel enseignement. En liant deux commandements issus de la loi juive, il nous apprend qu'aimer Dieu et aimer son prochain, cela ne peut se faire l'un sans l'autre. Que "l’amour du frère est le reflet de l’amour de Dieu".
Évangile du dimanche 3 novembre 2024 (Mc 12, 28b-34)
En ce temps-là, un scribe s'avança vers Jésus pour lui demander : « Quel est le premier de tous les commandements ? » Jésus lui fit cette réponse : « Voici le premier : Ecoute, Israël : le Seigneur notre Dieu est l'unique Seigneur. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force.
Et voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n'y a pas de commandement plus grand que ceux-là. » Le scribe reprit : « Fort bien, Maître, tu as dit vrai : Dieu est l'Unique et il n'y en a pas d'autre que lui. L'aimer de tout son cœur, de toute son intelligence, de toute sa force, et aimer son prochain comme soi-même, vaut mieux que toute offrande d’holocaustes et de sacrifices. »
Jésus, voyant qu'il avait fait une remarque judicieuse, lui dit : « Tu n'es pas loin du Royaume de Dieu. » Et personne n'osait plus l'interroger.
Source : AELF
Dans son évangile, Marc décrit les controverses auxquelles participait Jésus. Au chapitre 12, il débat notamment sur la résurrection des morts avec les saducéens - résurrection à laquelle ils ne croient pas. Un homme a assisté à ce débat. C'est un scribe, dont on suppose qu’il est pharisien car il approuve ce que dit Jésus. (On sait en effet que les pharisiens avaient en commun avec Jésus de croire à la résurrection des morts.) Et c’est parce qu’il croit que Jésus a une juste réponse, que ce scribe "ose lui demander quelque chose de plus", nous dit le prêtre et bibliste Philippe Abadie. Il demande à Jésus quel est le premier de tous les commandements. C’est la question au centre du texte de ce dimanche.
Un pharisien qui interpelle Jésus sur les commandements, cela n’a rien d’anodin. "Être juif, c’est être fils des commandements", nous dit le bibliste. D’ailleurs l’expression "bar-mitsvah", qui désigne le statut de la majorité religieuse dans le judaïsme, veut dire en hébreu "fils du commandement". "Ce qui qualifie le Juif pieux, explique Philippe Abadie, c’est qu’il est sous le joug de la loi mais le joug de la loi qui le libère. Il faut bien voir que la loi, elle est donnée aux Juifs comme une loi de liberté."
Y a-t-il une hiérarchie dans les commandements ? La question du scribe laisse supposer en effet qu’il y aurait un commandement qui serait au-delà de tout, qui viendrait résumer la loi. "Ce qu’il demande, analyse le bibliste, c’est une hiérarchisation dans le commandement. Et c’est très intéressant parce que finalement sa réponse montrera que l’amour prévaut sur les sacrifices."
Les controverses nombreuses que l’on trouve dans les évangiles donnent une indication sur le judaïsme au temps de Jésus. Les groupes des saducéens, des pharisiens mais aussi des zélotes ou des esséniens sont autant de courants qui traversaient la société juive. En général, les scribes et les pharisiens sont présentés comme des opposants à Jésus. Ici, on a "un cas unique", estime Philippe Abadie, celui d’un scribe "qui vient amicalement vers Jésus".
Ces controverses nous montrent également l’importance de l’échange, du débat, du questionnement dans la tradition juive. Le scribe a le sentiment que Jésus est dans une position juste au sujet de la résurrection. Il a "remarqué que Jésus avait bien répondu", nous dit Marc (Mc 12, 28). "Il a reçu de Jésus un enseignement pour lui qui était juste vis-à-vis de la résurrection et là, il le met à l’épreuve au sens positif du terme. Quelque part, il veut savoir quel est pour Jésus le plus important et si ça rejoint ce que lui-même croit."
Les Juifs sont des gens de l’écoute de la parole de Dieu
Pour répondre au scribe Jésus commence par dire la prière la plus connue du judaïsme, "Écoute Israël". En hébreu : "Sh'ma Israël Adonaï elohenou, Adonaï ehad." "C’est la grande prière que le Juif pieux dit matin et soir, précise Philippe Abadie, c’est le credo d’Israël, c’est un peu le Notre Père des Juifs." Écouter, ici cela signifie "garder, être le gardien de la loi, le gardien du commandement". Il s’agit d’écouter "ce Dieu unique qui nous rend uniques". "Les Juifs sont des gens de l’écoute de la parole de Dieu".
Puis, Jésus poursuit en citant non pas un seul commandement de la loi juive, mais deux, qu’il assemble. D’abord : "Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force" - un commandement qu'il tire du Livre du Deutéronome (chapitre 6, verset 5). Puis : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même", du Livre du Lévitique (chapitre 19, verset 18).
"Ce que Jésus apporte ici de hidouch, c'est-à-dire de nouveau dans son interprétation des textes, c’est de lier l’amour de Dieu à l’amour du prochain. "L’amour du frère est le reflet de l’amour de Dieu."
Peu de nos contemporains connaissent les Évangiles. Ils n'y sont pas hostiles mais ils n'ont plus d'occasion d'y avoir accès. C'est partant de ce constat que, avec l'éclairage d'un bibliste, Béatrice Soltner propose chaque semaine un texte d'Évangile pour qu'il soit entendu (ou réentendu), pour en savourer la nouveauté et faire l'expérience que - si incroyable que ce soit à l'heure de l'instantanéité - cette parole écrite il y a plus de 2.000 ans nous rejoint toujours au plus profond.
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