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Le Mot de l'évêque
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Le Mot de l'évêque RCF - page 5

Une émission de RCF Loir-et-Cher présentée par Mgr Francis Bestion

Regard sur l'actualité et la vie de l'Église

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Episodes

  • RCF
    13 janvier 2023

    L'encombrant commencement

    3 min
    Il y a quelques jours seulement, nous célébrions l’Épiphanie. Des Mages venus d’Orient avaient fait un long voyage jusqu’au pays des Juifs parce qu’ils avaient scruté le ciel et qu’une étoile leur avait indiqué la direction à suivre.
    Ainsi donc, les Mages scrutaient le ciel pour y déchiffrer les intentions de Dieu. Le ciel, pour eux, n’était pas le lieu du « silence éternel des espaces infinis » dont parle Blaise Pascal. Non : le ciel était pour eux le lieu d’une Présence, qui adressait à l’humanité un message et qui accompagnait sa marche. Les Mages scrutaient le ciel pour finalement trouver Dieu présent au milieu des hommes.
    Notre rapport au ciel a bien changé depuis. Nous ne le concevons pas comme un espace d’où nous est adressée une parole (sauf pour ceux qui cherchent des messages venant de populations extraterrestres). Les scientifiques et les astronomes amateurs le voient plutôt comme un objet d’investigation auquel il faut arracher ses secrets. Et depuis quelques mois, en orbite à un million et demi de kilomètres de la terre, le télescope James Webb y recherche les traces du commencement de l’univers.

    Pourtant, cela ne veut pas dire que Dieu est absent. Dieu est présent plus que jamais dans ce qui dérange notre conception du monde et met en question nos observations. La question de Dieu est présente dans ce fameux commencement qui a suscité tant de méfiance quand il est redevenu une hypothèse à prendre très au sérieux pour expliquer la naissance de l’univers. Il faut dire que l’astrophysicien qui se remettait à parler d’un commencement de l’univers était un prêtre, l’abbé Lemaître. Cette méfiance se traduisit et se traduit encore par toutes sortes de tentatives pour éviter de parler de commencement : hypothèse d’un univers qui après une phase d’expansion entrerait dans une phase de rétractation, ou encore hypothèse plus échevelée encore des « multivers », c’est-à-dire d’une infinité d’univers.

    Le commencement nous dérange… Comment tenir en effet l’affirmation que Dieu n’existe pas s’il y a un commencement ? À moins, comme le font un certain nombre de scientifiques, de diviniser l’univers – mais ceci est une autre histoire. « Au commencement, nous dit la Bible, Dieu créa le ciel et la terre » : ce n’est certes pas une affirmation scientifique, mais c’est une parole autour de laquelle croyants et incroyants, en exerçant le travail de leur raison dans des sphères différentes mais non pas opposées, peuvent se retrouver pour dire ensemble que l’univers, notre univers, n’est pas venu à l’existence par lui-même – et que son origine est un mystère.
  • RCF
    6 janvier 2023

    Bilan d'une vie et retour à la maison

    3 min
    Quand disparaît quelqu’un qui a marqué son époque, et qui de plus a été un grand penseur, on s’attend à découvrir de lui des paroles décisives qui soient comme une cristallisation de sa pensée : on a du mal à l’imaginer disant des choses toutes simples.
    Je me souviens d’amis d’enfance qui étaient allés rendre visite à Jacques Maritain au soir de sa vie. Celui qui avait été un des plus grands philosophes catholiques du XXe siècle, ami personnel de Paul VI, avait choisi d’achever son existence à Toulouse chez les Petits Frères de Jésus au milieu de qui il devait mourir en 1973. Les amis en question avaient fait le voyage pour écouter Maritain et en étaient revenus fort déçus, car le « grand homme » avait parlé avec tant de simplicité qu’il n’avait rien dit qui leur parût particulièrement intéressant et digne de figurer dans un carnet de voyage. Ils n’étaient pas loin d’attribuer cela à un gâtisme précoce chez celui qui s’appelait lui-même « le paysan de la Garonne ».

    Quand nous lisons le Testament spirituel du pape émérite Benoît XVI, c’est la même simplicité qui nous frappe. Benoît XVI commence par dire merci à Dieu pour tout ce qu’il lui a donné et pour le pardon de ses péchés. Puis tout naturellement, il passe de Dieu à ses parents : « un foyer merveilleux dont la lumière a irradié de sa clarté toute ma vie jusqu’à ce jour » écrit-il. Ensuite son action de grâce s’élargit à sa sœur, à son frère, à ses amis, à ses enseignants, à ses élèves, et pour finir à son pays pour lequel il exprime la crainte qu’il laisse s’éteindre la foi transmise à travers les générations. Enfin, il demande pardon à tous ceux à qui il a pu faire du mal, et il demande qu’on prie pour lui. Tout passe, mais Jésus demeure : tel est le cri final de ce testament spirituel.
    J’ai gardé en mémoire un récit particulièrement émouvant de son autobiographie. Il avait dix-huit ans au moment de l’effondrement de l’Allemagne, et il venait d’être libéré de ses obligations militaires. Se souvenant de son retour chez ses parents à Traunstein, il écrit : « À cet instant, la Jérusalem céleste n’aurait pu me paraître plus belle. Depuis l’église, j’entendais prier et chanter : c’était le soir du vendredi, jour du Sacré-Cœur… De ma vie, je n’ai trouvé un repas aussi délicieux que le simple dîner que notre mère nous prépara avec les produits du jardin. » Il venait de rentrer dans sa maison familiale. Aujourd’hui, il entre dans la Maison du Père où le Christ nous a promis de nous préparer une place. Ce sera notre chez-nous, notre maison familiale et notre joie pour toujours.
  • RCF
    23 décembre 2022

    ESPÉRANCE D’ISRAËL ET ESPÉRANCE CHRÉTIENNE

    3 min
    À l’approche de cette fête de Noël, une histoire juive me revient en mémoire. Elle est racontée par ce grand écrivain francophone que fut Edmond Fleg, un des principaux fondateurs de l’Amitié judéo-chrétienne.
    Dans un de ses livres intitulé Jésus raconté par le Juif Errant, Edmond Fleg affirme que tout Juif, qu’il soit croyant ou non, qu’il le sache ou qu’il l’ignore, espère la venue du Messie d’Israël. Selon lui non seulement cette espérance est indéracinable, mais elle se fait d’autant plus forte que les malheurs s’acharnent sur le peuple juif. À l’appui de cette affirmation, il cite un passage du Talmud méditant sur la ruine du Temple de Jérusalem. Quatre rabbins gravissent ensemble la montagne où se dressait autrefois le Temple dans sa splendeur, et qui n’est plus maintenant que désolation. Et voici le récit :
    Nous venions d’apercevoir un chacal, bondissant hors du Saint des Saints en ruine. Nous pleurions. Mais [l’un d’entre nous, Rabbi] Akiba, riait.
    Nous lui demandions : « Pourquoi ris-tu ? » Il nous demandait : « Pourquoi pleurez-vous ? »
    « Eh quoi ? [lui répondions-nous] Du saint lieu nous voyons bondir le chacal, et nous ne pleurerions pas ? »
    « C’est justement pourquoi je ris, répondit Akiba. [Un prophète] a dit : "Jérusalem ne sera plus qu’un monceau de décombres" ; et [un autre prophète a dit plus tard] : "de nouveau, sur les places de Jérusalem, les vieux et les vieilles s’assoiront, leurs bâtons à la main, et les filles avec les garçons, danseront leurs danses". Tant que la première de ces paroles ne s’était pas réalisée, je pouvais douter de l’autre ; mais maintenant qu’elle s’est montrée véridique, dans la seconde aussi je vois la certitude ! »

    À l’image de l’espérance d’Abraham, l’espérance d’Israël a appris dans les épreuves à tenir ferme « contre toute espérance » selon l’expression de l’épître aux Romains. Au terme d’une année si éprouvante et si difficile, je vous souhaite d’y penser en priant devant la crèche. J’y pensais moi-même tout récemment devant les restes calcinés de l’abbaye Saint-Georges sur laquelle nous avions fondé tant d’espoirs que l’incendie faisait partir en fumée. Abraham, notre père dans la foi, sans qui l’Enfant Dieu ne serait pas né tant de siècles plus tard. Abraham, notre père devant Celui en qui il a cru, qui « donne la vie aux morts et appelle le néant à l’existence » : « Espérant contre toute espérance, il tint ferme… Devant la promesse divine, il ne succomba pas au doute mais il fut fortifié par la foi et il rendit gloire à Dieu » (Romains 4, 17-20).
  • RCF
    16 décembre 2022

    Les voeux diocésains

    3 min
  • RCF
    9 décembre 2022

    Elle n'avait pas peur

    3 min
    La grande peur de l’an Mil n’est qu’une légende colportée, semble-t-il, au XIXe siècle par Michelet qui voyait dans le Moyen Âge une époque d’obscurantisme et de régression vers des superstitions en tout genre. À propos de l’an Mil, il écrivait : « Cette fin d’un monde si triste était tout ensemble l’espoir et l’effroi du Moyen Âge… C’est l’image de ce pauvre monde sans espoir : malheur sur malheur, ruine sur ruine. Il fallait qu’il vînt autre chose et on l’attendait. » Ce que ces propos démontrent, c’est que Michelet s’était complètement mépris sur les siècles de foi que stigmatise encore aujourd’hui l’appellation dépréciative de « Moyen Âge ».
    La peur du passage de l’an 2000 vers le troisième millénaire n’est pas, au contraire, une histoire inventée : elle s’est bel et bien produite. Cela montre que l’humanité actuelle est habitée par des angoisses plus puissantes que celles de nos ancêtres, parce que plus indéterminées que les leurs. Dans les siècles de foi, on avait peur du jugement de Dieu, mais cette peur était tempérée d’espérance en sa miséricorde. Aujourd’hui, on a mis Dieu au placard et le résultat est qu’on a peur de tout : des diverses crises économiques et monétaires, du chômage et de l’exclusion, des migrants et de la guerre, des coupures de courant et de la sixième extinction massive... Le pire paraît toujours sûr.
    À l’époque où vivait Marie, dans le village de Nazareth comme dans tout le pays des juifs, on venait aussi de vivre le passage d’un millénaire à l’autre. Bien entendu on ne le savait pas, mais on savait que le plus sûr n’était pas le pire mais le meilleur. Cette époque avait pourtant autant de raisons que la nôtre d’avoir peur du lendemain : on vivait dans un pays opprimé et livré à l’arbitraire du vainqueur. Pourtant, tout le monde était dans l’espérance : c’était l’attente de Celui que Dieu avait promis, cette « force de salut » qui naîtrait « dans la maison de David son serviteur » comme dit le cantique de Zacharie, père de Jean-Baptiste. Ce n’était pas l’attente des grands, mais celle des petits et des humbles. C’était l’attente de Marie.
    C’est pour cette raison que Marie est la grande figure de l’Avent. Marie n’a pas peur, car elle attend. Marie n’a pas peur, car elle met en Dieu sa confiance. Et l’Église, notre pauvre Église si éprouvée et si décriée, restera toujours le peuple de l’attente. Dans la nuit de ce monde, figurée par le raccourcissement des journées de décembre, elle garde allumée la lampe de l’attente et indomptable la joie de l’espérance. Cette attitude lui est enseignée par Marie, à la fois membre et Mère de l’Église. Marie qui a espéré contre toute espérance de Nazareth à la croix. Marie l’Immaculée, qui guide et soutient l’espérance du peuple de Dieu encore en chemin.
  • RCF
    2 décembre 2022

    Réflexions sur un impossible débat

    3 min
    Je suis sûr que beaucoup de nos concitoyens, souhaiteraient un vrai débat sur la question de l’avortement. Mais ce débat s’avère impossible à cause de l’hystérisation qui règne autour de ce sujet. La pression exercée sur les sénateurs pour qu’ils capitulent sur l’inscription du droit à l’avortement dans la constitution en est aujourd’hui un signe inquiétant.
    Un premier moyen de dépassionner est de rappeler les données historiques. Contrairement à ce qu’on laisse croire, la loi Veil de 1975 n’instaurait pas un nouveau droit : elle décidait une dépénalisation. « Dépénaliser » signifie renoncer à sanctionner un délit. Cela veut dire que la loi Veil, à bien des égards si critiquable, ne remettait pas en question le fait que l’avortement n’est pas un acte qui n’engage que le droit individuel dont chacun dispose sur son propre corps, mais reste un acte irréversible sur le corps et sur la vie d’autrui.
    À la base de la demande que l’avortement soit considéré comme un droit, il y a l’affirmation résumée dans un slogan fameux : « mon corps m’appartient ». C’est précisément ce slogan qui devrait pouvoir faire l’objet d’un débat serein et responsable. En effet dans la question de l’avortement il ne s’agit pas de « mon corps », mais du corps d’un autre, et c’est là toute la différence. Autant le suicide ou la réassignation sexuelle, quoi qu’on en pense par ailleurs, peuvent être revendiqués par leurs partisans comme des droits individuels, autant ce genre d’argument est impossible pour l’avortement. Sauf à ne plus savoir de quoi on parle et à considérer l’enfant à naître comme un « amas de cellules », au mépris des données de la science la plus récente.
    Ce ne sont donc pas ceux qui demandent un débat de fond qui sont les témoins d’une pensée archaïque (à part ceux qui en font une arme politique au service d’autres desseins plus scabreux). Ceux qui relèvent d’un mode de pensée archaïque sont ceux qui s’arc-boutent sur des mots d’ordre faisant fi des données de la science contemporaine. Au Moyen Âge, saint Thomas d’Aquin pouvait encore considérer que le fœtus n’était un être humain qu’à partir d’un certain stade de la grossesse parce que la science de son temps était encore dans l’enfance. Aujourd’hui il n’est plus possible de dire cela : un ovule fécondé contient en germe tout ce qui constituera la personne à venir, et on lui doit donc le même respect qu’à toute personne.
    Ce que je viens de dire n’enlève rien au drame que vivent des femmes souvent très jeunes et laissées seules par leur compagnon devant une grossesse non désirée. Et on peut m’objecter qu’il est facile à un homme de parler en leur nom. Mais tout être humain, homme ou femme, a le droit de savoir et le devoir de dire ce qu’est un acte de mort. L’enjeu n’est rien de moins que notre commune humanité.
  • RCF
    25 novembre 2022

    La spirale de la pauvreté

    3 min
    Le Secours Catholique vient de publier son rapport annuel sur l’état de la pauvreté en France. Il s’intitule À l’épreuve des crises, enquête sur les budgets des plus précaires, et il nous livre un constat accablant. L’étude de l’impact de la crise budgétaire que nous traversons sur les foyers les plus modestes, montre que leur fragile équilibre financier a bien souvent été rompu. Tout près de nous, bien des gens sont sur le fil du rasoir et sur le point de basculer. Il suffit, me dit le président de notre délégation départementale, qu’un loyer augmente de 24 Euros et c’est la catastrophe. Oui, vous avez bien entendu : 24 Euros ! Presque rien, et on en est réduit du jour au lendemain à se tourner vers les restos du cœur et vers la banque alimentaire.

    « L’énergie et l’alimentation, rappelle Véronique Devise (présidente du Secours Catholique), servent déjà de variables d’ajustement pour les ménages qui vivent sur la corde raide, alors nous craignons des drames avec l’hiver qui vient, car les aides annoncées ne suffisent pas à compenser le choc. À quoi ces ménages, déjà coutumiers de choix impossibles, qui font souffrir le corps et le cœur, devront-ils renoncer : à payer le loyer, au risque d’une expulsion ? »

    Le mot d’ordre du Secours Catholique est : « marcher au pas des plus pauvres ». Cela signifie s’interdire de faire de l’assistanat, mais aider les personnes à parler et à être reconnues, afin qu’elles puissent, dans toute la mesure du possible, retrouver leur dignité et la maîtrise de leur propre destin. L’assistanat est certes relativement facile à mettre en œuvre, mais il est humiliant, il ne permet pas aux personnes de dominer leur situation de précarité et les y enfonce au contraire. Enfin, il ne prépare aucun avenir car le jour où les aides cessent, la situation antérieure réapparaît identique à ce qu’elle était au début.
    À l’échelle des pouvoirs publics, ce qui apparaît à cette lumière n’est pas tant l’insuffisance des aides que l’absence d’une politique structurelle pour combattre la pauvreté. C’est toute notre société qui doit repenser sa manière de traiter la condition des plus fragiles, celle des personnes âgées, celle des jeunes et celle des migrants. La valeur d’une société se mesure à sa capacité de donner ses chances à chacun de ses membres et de n’en laisser aucun de côté.
  • RCF
    18 novembre 2022

    UN TEXTE DE DIETRICH BONHOEFFER

    3 min
    Chers amis auditeurs de RCF, dans la tourmente que nous traversons je ne me sens pas capable de faire autre chose, comme je l’ai fait la semaine dernière, que de vous partager des textes qui m’ont personnellement aidé. Il se trouve que pendant que nous étions à Lourdes, un frère évêque nous a lu un texte du théologien allemand Dietrich Bonhoeffer qui m’a réconforté et que je voudrais vous faire entendre à mon tour. Le voici.

    « Dans sa grâce, Dieu ne nous permet pas de vivre, ne serait-ce que quelques semaines, dans l’Église de nos rêves… Car Dieu n’est pas un Dieu d’émotions sentimentales, mais un Dieu de vérité. C’est pourquoi seule la communauté qui ne craint pas la déception qu’inévitablement elle éprouvera en prenant conscience de toutes ses tares, pourra commencer d’être telle que Dieu la veut et saisir par la foi la promesse qui lui est faite. Il vaut mieux pour l’ensemble des croyants, et pour le croyant lui-même, que cette déception se produise le plus tôt possible. Vouloir à tout prix l’éviter et prétendre s’accrocher à une image chimérique de l’Église (…), c’est construire sur le sable et se condamner, tôt ou tard, à faire faillite. (…)
    Lorsque la vie de la communauté est gravement menacée par le péché et l’incompréhension, un frère demeure un frère, même coupable. Je reste placé avec lui sous la parole du Christ (…) Le moment où se produit la grande déception dont nous avons parlé à propos de nos contacts avec les autres croyants, peut être pour nous tous une heure vraiment salutaire ; car elle nous fait comprendre que nous ne pouvons absolument pas compter, pour vivre ensemble, sur nos propres paroles, sur nos propres actions, mais uniquement sur la Parole et sur l’Action qui réellement nous lient les uns aux autres, à savoir le pardon de nos péchés par Jésus-Christ. La vraie communauté chrétienne est à ce prix : c’est quand nous cessons de rêver à son sujet qu’elle nous est donnée. (…)
    Nous devons apprendre à remercier Dieu tous les jours pour la grâce qu’il nous accorde en nous plaçant dans une communauté chrétienne, quelle qu’elle soit. Il se peut qu’elle n’ait rien d’extraordinaire à nous offrir. Il se peut qu’elle se distingue plutôt par beaucoup de faiblesse, par beaucoup de difficultés intérieures et très peu de foi ; qu’importe ! (…) Il en est de la communauté des chrétiens comme de la sanctification dans notre vie personnelle : c’est un don de Dieu. »

    Dietrich Bonhoeffer, pasteur luthérien né en 1906, fut exécuté par les nazis le 9 avril 1945.
  • RCF
    11 novembre 2022

    Bouleversés et résolus

    2 min

    Chers frères et sœurs,

    Réunis en Assemblée plénière à Lourdes, nous avons entendu la stupéfaction, la colère, la tristesse, le découragement suscités par ce que nous apprenons au sujet de Mgr Michel Santier, ancien évêque de Luçon puis de Créteil, et maintenant au sujet de Mgr Jean-Pierre Ricard, ancien archevêque de Montpellier puis de Bordeaux.

    Nous sommes conscients que ces révélations affectent douloureusement les personnes victimes, en particulier celles qui avaient choisi de nous faire confiance. Nous constatons l’ébranlement de nombreux fidèles, de prêtres, de diacres, de personnes consacrées. Ces sentiments sont également les nôtres. Membres d’un même corps ecclésial, nous sommes nous aussi blessés, atteints en profondeur. (…)

    Certains ont pu se demander si le droit de l’Eglise n’organisait pas une forme d’impunité ou de traitement particulier des évêques. (…) Nous le redisons avec force : il n’y a pas, et il ne peut pas y avoir, d’impunité des évêques. (…)

    Certains s’interrogent : dans les circonstances présentes, quel crédit donner aux engagements pris il y a un an pour tirer les conséquences du rapport de la CIASE ? Nous pouvons en donner l’assurance : une transformation des pratiques est bel et bien en cours, avec l’aide de nombreux fidèles laïcs particulièrement qualifiés, dont des personnes victimes. Des décisions sont déjà prises et mises en œuvre. Diocèses et mouvements d’Eglise s’impliquent de manière plus construite dans la protection des mineurs. Les groupes de travail décidés il y a un an rendront leurs conclusions en mars 2023. Nous venons de faire un point d’étape avec eux au cours de cette Assemblée. Ce travail de fond commence à porter du fruit. Nous continuerons sur cette lancée. (…)

    Frères et sœurs, humblement mais de tout cœur, nous continuons le travail entrepris pour que l’Eglise soit une maison plus sûre. Les personnes victimes demeurent plus que jamais au cœur de notre attention. Vos attentes et vos exigences sont légitimes et vraiment entendues. Nous les accueillons comme venant du Seigneur lui-même. C’est tous ensemble, nous en avons conscience, que nous pouvons contribuer à une fidélité renouvelée à l’Évangile. C’est notre prière et notre détermination modeste mais résolue.

  • RCF
    4 novembre 2022

    Systémique ?

    3 min
    À l’heure où j’écris cette chronique, personne ne sait encore ce qui va sortir de l’assemblée plénière des évêques de France qui se tient à Lourdes du 3 au 8 novembre. Une chose est sûre cependant : nous, les évêques, sommes de nouveau au pied du mur. Nous sommes interpellés à la suite de « l’affaire Santier », sur la sincérité des engagements que nous avons pris l’an passé à la suite du rapport de la CIASE. En clair, nous sommes accusés d’être des menteurs. Non pas d’abord parce qu’une nouvelle fois des actes gravissimes ont été commis par un prêtre instrumentalisant le sacrement de la confession (il y en a eu d’autres, hélas) ; non pas d’abord parce que ce prêtre a plus tard accepté sa nomination comme évêque (il y en a eu d’autres aussi) ; mais d’abord parce que ces scandales pesant à jamais sur l’existence des victimes n’ont pas été à temps dévoilés, condamnés, sanctionnés comme ils auraient dû l’être.
    L’an passé, c’était une culture de l’autorité laissant la porte ouverte aux abus d’autorité qui était dénoncée, le fameux « cléricalisme » dont parle le pape François. Cette année, c’est spécifiquement la culture du secret, de la procrastination, de la préservation des apparences qui est clouée au pilori. « Ils savaient et ils n’ont rien dit » : c’est le titre d’un des nombreux articles parus ces derniers jours. Et il ne sert à rien de répondre qu’« ils » ne savaient pas tous et qu’« ils » ne savaient pas tout, même si c’est vrai. Il ne sert à rien de se retrancher derrière la lenteur des procédures, même si l’emballement avec ses conséquences médiatiques est un fléau. Il ne sert à rien non plus de déplorer l’inefficacité de certaines mesures disciplinaires, comme celles qui visaient dans les années 50 les deux frères Philippe, si l’on ne s’interroge pas jusqu’au bout sur les causes d’une pareille inefficacité. Il ne sert à rien enfin de mettre sur pied de nouvelles instances d’accueil, d’écoute, d’aide à la reconstruction des victimes si la culture elle-même demeure en place. Or nous autres évêques sommes accusés aujourd’hui d’avoir été façonnés par cette culture-là, qui engendre aujourd’hui tant de dégoût et de colère.
    Tout cela serait-il donc « systémique » ? J’ai milité et je milite toujours pour qu’on emploie ce mot avec précaution pour ne pas déresponsabiliser les personnes en faisant tout porter sur les structures. Jean-Paul II, qui connaissait de l’intérieur la vulgate marxiste expliquant le mal par les structures perverses de la société, avait proposé une notion qui est un trait de génie, celle de « structures de péché ». L’explication ultime du mal ne réside pas dans les structures, mais ce sont des hommes pécheurs qui fabriquent toutes sortes de structures perverses. Et si ces structures perverses résultent de fautes personnelles, des décisions personnelles clairvoyantes et courageuses, peuvent assainir ce qui a été perverti. Des décisions personnelles clairvoyantes et courageuses : voilà ce qui est attendu de nous aujourd’hui.
  • RCF
    28 octobre 2022

    Je me réfugie dans l'Évangile

    3 min
    « Je me réfugie dans l’Évangile comme dans la chair de Jésus-Christ » : ces paroles sont d’Ignace d’Antioche, un des premiers auteurs chrétiens, martyr à Rome au tout début du deuxième siècle. Il les a écrites dans sa lettre aux habitants de Philadelphie (Phil V, 1). Pour lui, l’Évangile n’est pas un texte, même si à cette époque les évangiles sont déjà rédigés. L’Évangile est la parole vivante et agissante de Jésus, qui ne peut être enfermée dans aucun texte comme le dit Jean l’évangéliste : « Jésus a accompli encore beaucoup d’autres choses. Si on les écrivait une à une, j’imagine que le monde ne contiendrait pas les livres qui en seraient écrits » (Jean 21, 25). Et la parole vivante et agissante de Jésus est comme sa « chair », c’est-à-dire le sacrement de sa Personne. Il y a continuité entre elle et l’Eucharistie.

    « Se réfugier » dans l’Évangile, c’est y trouver son abri, son port d’attache contre les tempêtes, ce qui donne sens à ce que l’on fait et à ce que l’on subit. C’est aussi, selon une image que j’aime particulièrement, se réfugier dans les plaies du Sauveur qui sont devenues glorieuses dans la résurrection : « Porte ta main et entre dans mon côté, dit Jésus à Thomas, ne sois pas incrédule mais croyant ! » (Jean 20, 27). Car le lieu de la blessure est le lieu d’où jaillit la vie.

    Ces réflexions ne sont évidemment pas sans rapport avec les nouvelles blessures infligées à l’Église par les révélations touchant Michel Santier, ancien évêque de Créteil. En écrivant « l’Église », qu’on n’imagine pas que je ne parle que de ce qu’il est convenu d’appeler « l’institution ». Car ces blessures sont d’abord celles des victimes, membres du Corps de l’Église et pour qui un prêtre devenu plus tard évêque a été fauteur de scandale. Ces blessures sont celles causées par l’instrumentalisation d’un sacrement, le sacrement de pénitence, où se rejoignent et communiquent le sanctuaire de l’intimité des personnes et le sanctuaire de la miséricorde de Dieu.

    Mais Ignace d’Antioche continue, imperturbable : « Je me réfugie dans l’Évangile comme dans la chair de Jésus-Christ… et dans les Apôtres comme dans l’assemblée des prêtres de l’Église. » Et dans une autre de ses lettres, il écrivait : « Sans les apôtres et les prêtres, on ne peut parler d’Église » (Tralliens III, 1).

    Église, qui es-tu pour que le pire puisse se trouver en toi et qu’on doive pourtant te dire sainte ? Apôtres, qui êtes-vous pour que sans vous on ne puisse parler d’Église ? Et surtout, qui peut oser affirmer que la vie peut encore l’emporter sur les blessures ? Qui, sinon Celui-là même dont les blessures sont devenues le lieu de notre guérison ?
  • RCF
    21 octobre 2022

    Trois nouveaux serviteurs dans une Eglise servante

    3 min
    Grande joie pour notre Église diocésaine : ce dimanche 23 octobre à 15 heures à la cathédrale, trois hommes seront ordonnés diacres ! Leur ordination portera à seize le nombre des diacres à titre permanent en activité au service du diocèse. Tous trois sont mariés et pères de famille, et je tiens à exprimer ma gratitude à leurs épouses et à leurs enfants qui ont accepté par avance les changements que cette ordination allait apporter dans la vie des trois familles. Mais on reçoit autant qu’on donne, ils en ont déjà fait l’expérience !
    C’est le Concile Vatican II qui a souhaité que « puisse être rétabli le diaconat en tant que degré propre et permanent de la hiérarchie » (Lumen Gentium 29), le mot « hiérarchie » n’ayant pas, faut-il le rappeler, un sens militaire ou administratif, mais signifiant la communication de tout ce qui vient de Dieu. Si le diacre est « serviteur », comme l’indique son nom, c’est donc en premier lieu en tant que serviteur des dons de Dieu pour son peuple. Exactement comme le prêtre, mais avec un ministère centré sur la Parole et conduisant vers l’Eucharistie. Dans un beau passage de l’épître aux Romains (15, 16), saint Paul se donne à lui-même le titre de « prêtre de l’Évangile de Dieu », signifiant par là qu’il n’y a pas de rupture entre l’annonce de l’Évangile et la fonction sacerdotale, la première acheminant vers la seconde. Tel est bien le rôle du diacre : être pour sa part « prêtre de l’Évangile de Dieu » en faisant signe vers la Parole faite chair qui se fait pain pour rassasier notre faim.
    Et les pauvres dans tout cela ? Le diacre n’est-il pas tout particulièrement à leur service ? Bien sûr que si ! Et loin d’être étranger à la liturgie de l’Évangile, le souci des pauvres en fait pleinement partie. Saint Paul toujours, quand il reçoit sa mission propre d’aller vers les païens tandis que Pierre, Jacques et Jean iront vers les Juifs, reçoit en même temps le rappel d’avoir « à se souvenir des pauvres », ce que, précise-t-il, il a toujours eu soin de faire (Galates 2, 10). Si les pauvres sont nos seigneurs parce que le Pauvre est notre Seigneur, alors le service des pauvres a lui aussi quelque chose d’eucharistique.
    En définitive, le diacre n’est pas dans une sorte de no man’s land entre l’Église et le monde, entre l’autel et la rue : il est pleinement de l’Église dont il est ministre, pleinement de l’autel où il est officiant. Et c’est justement pour cette raison qu’il apporte dans son milieu de vie, dans le monde et dans la rue, la bonne odeur de l’Évangile, la Parole de vie qui se fait Pain de vie.
  • RCF
    14 octobre 2022

    Le crépi et le feu

    3 min
    Le prophète Ézéchiel, qui vivait au VIe siècle avant le Christ, s’en est pris à tous les faux prophètes qui sévissaient de son temps : vous savez, ces gens qu’on rencontre à toute époque, qui se vantent d’avoir des solutions pour tout, mais qui ne s’attaquent qu’aux apparences. Pour caractériser les fausses solutions proposées par ces faux prophètes, Ézéchiel utilise l’image du crépi. Je le cite : « Ils égarent mon peuple en disant : "Paix !" alors qu’il n’y a pas de paix. Tandis qu’il bâtit une muraille, les voici qui la couvrent de crépi… Eh bien ! ainsi parle le Seigneur : "J’abattrai le mur que vous aurez couvert de crépi, il tombera et vous périrez sous lui !" » (Ez 13, 10…13-14). Enduire un mur de crépi a du sens si le mur est solidement bâti ; mais si le mur est rempli de failles et de trous, le crépi n’est qu’une illusion, un cache-misère. Ainsi en est-il de ces experts en fausses solutions qui, dans la société, dans l’Église ou dans nos relations quotidiennes, s’y entendent pour enfumer les autres ! Crépi ou fumée, le but est toujours le même : empêcher de voir le réel et entretenir l’illusion qu’on a trouvé des réponses. Le mur couvert de crépi est bien lisse et paraît refait à neuf, mais derrière cette apparence il n’y a que ruine et désolation.
    Une autre image vient contrebalancer celle du crépi : celle qu’utilise saint Jean de la Croix dans la Nuit obscure pour faire comprendre comment Dieu agit en nous. Cette image est celle de la bûche qu’on met dans le feu. Comme la bûche est humide, elle a l’air de tenir le feu en échec. Mais le feu prend son temps : patiemment il sèche la bûche, il en fait sortir l’eau dont elle était gorgée, il en fait partir toutes les impuretés. « Et finalement, poursuit Jean de la Croix, commençant à l’enflammer par dehors et à l’échauffer, il en arrive à la transformer en lui et à la rendre aussi belle que le feu lui-même » (Nuit obscure II, 10). C’est à partir de l’intérieur, du foyer qui a été allumé en elle, que la bûche finit par être embrasée tout entière.
    Le crépi fait semblant de conserver alors qu’il se contente de cacher ; le feu paraît détruire alors qu’il purifie ce qu’il porte à incandescence et finit par l’identifier à lui-même. Le crépi maquille l’apparence, le feu transforme la substance. Les deux comparaisons nous aident à mieux comprendre comment Dieu agit en nous : il démasque les faux semblants, et si nous nous laissons faire il nous transforme de l’intérieur pour nous embraser de son amour et de sa vérité. Qu’il a-t-il de mieux, en définitive, pour lutter contre l’hypocrisie qui gangrène notre humanité, que de nous laisser habiter par le feu de son Esprit ?
  • RCF
    6 octobre 2022

    La communion aux malades

    3 min
    En ces premiers jours d’octobre, les personnes qui participent à la Pastorale de la Santé se retrouvent pour une journée de rentrée et de formation. Parmi elles se trouvent les personnes chargées de porter la communion aux malades un service qui, dans la plupart des diocèses, porte le nom de « service évangélique des malades ».

    L’Eucharistie n’est pas une chose (une sorte de « relique » à conserver dans un reliquaire) : l’eucharistie est un acte qui engage toute l’Église. La célébration de la messe suit un déroulement précis et réunit depuis la plus haute antiquité l’assemblée chrétienne le jour du Seigneur (puis les autres jours de la semaine au fur et à mesure que l’on prenait conscience que le Corps de Jésus est notre « pain quotidien »). Mais l’eucharistie est aussi un sacrement unique en son genre : à la différence de ce qui se passe dans les autres sacrements, la matière du sacrement (le pain et le vin consacrés) demeure après sa célébration. Le pain ne redevient pas du pain, le vin ne redevient pas du vin. De là découle la prise de conscience très précoce de la possibilité de porter aux malades le pain eucharistique consacré à la messe. C’est l’origine de la réserve eucharistique. Le culte eucharistique en-dehors de la messe ne se développera que plus tard.

    Nous possédons des récits de martyrs de l’eucharistie : le plus célèbre est saint Tarcisius, jeune martyr sous Valérien (263-275), dont l’existence est connue par son inscription sur un tombeau gravée sur l’ordre du pape Damase : « Tandis que le vertueux Tarcisius portait le Sacrement du Christ, une main impie s'avança pour l'exposer au mépris des profanes ; mais lui-même préféra être battu à mort et rendre l'âme plutôt que d'exposer à des chiens enragés les membres célestes. »
    Récit légendaire bien sûr, mais qui souligne que l’acte de porter la communion est tout sauf anodin. Une hymne mariale dit en s’adressant à Marie « tu portes Celui qui porte tout » : on peut appliquer cette apostrophe à la personne qui porte l’eucharistie.

    La communion aux malades concerne enfin toute la communauté chrétienne. Le Pape Benoît XVI le soulignait en écrivant : « Je voudrais attirer l’attention de toute la communauté ecclésiale sur la nécessité pastorale d’assurer l’assistance spirituelle aux malades… Il faut faire en sorte que nos frères et sœurs puissent s’approcher fréquemment de la communion sacramentelle. Renforçant de cette façon leur relation avec le Christ crucifié et ressuscité, ils pourront ressentir leur existence comme pleinement insérée dans la vie et la mission de l’Église1. »
  • RCF
    30 septembre 2022

    Les Anges et leur mission

    3 min
    La fin de septembre et le début d’octobre sont marqués par la présence des anges. Ou plutôt par leur mémoire, car ils sont toujours présents ! Mais nous n’avons pas trop de deux fêtes pour nous souvenir d’eux et leur demander leur secours.
    Saint Grégoire le Grand nous rappelle que le nom d’anges désigne la fonction de ces créatures spirituelles : ce nom signifie en effet « envoyés », ce qui souligne d’emblée la solidarité qui unit les anges à tous les humains, car c’est bien vers nous qu’ils sont envoyés pour nous servir. Étrange chose que de purs esprits soient mis par Dieu au service d’êtres de chair et de sang ! Il semble même que ce paradoxe soit à l’origine de la révolte de Lucifer, le chef des anges déchus : il aurait dit à Dieu son refus catégorique de servir, considérant qu’il était indigne de lui de s’abaisser à secourir les hommes. Pour les bons anges, c’est tout le contraire : chez eux, aucune trace d’amertume ou de jalousie. Comme le dit saint Jean Chrysostome, « ils se réjouissent de notre bien, comme ils souffrent quand nous en sommes privés ».
    Le 29 septembre, nous fêtons les archanges Michel, Gabriel et Raphaël. Toujours selon saint Grégoire, leurs noms désignent leur action. C’est ainsi que Michel signifie « qui est comme Dieu ? », Gabriel « Force de Dieu » et Raphaël « Dieu guérit ». Le premier est donc chargé de rappeler la grandeur de Dieu, le second de manifester sa puissance, et le troisième de guérir en son Nom.
    Le 2 octobre, quand ce jour ne tombe pas un dimanche, c’est la fête des saints anges gardiens. Des auteurs de l’Église primitive affirment que chacun de nous possède un ange et un démon qui s’occupent de lui ! L’ange attire l’âme vers le bien, le démon vers le mal. Il y a, écrit Hermas, « deux anges pour l’homme : l’ange de la justice et l’ange du mal. L’ange de la justice est délicat, réservé, doux paisible. Quand il entre dans ton cœur, il te parle aussitôt de justice, de sainteté, de tempérance, de toute œuvre juste. Lorsque ces pensées s’élèvent dans ton cœur, sache que l’ange de justice est avec toi. L’ange du mal est au contraire irascible, plein d’aigreur. Reconnais-le à ses œuvres. »
    De cette doctrine sur les anges, la tradition de l’Église n’a voulu retenir que les bons anges, les anges gardiens. Nous sommes tellement experts à nous tenter nous-mêmes que nous n’avons guère besoin d’un démon pour cela. Mais est-ce que nous pensons suffisamment à prier nos anges gardiens ? Et si nous n’y pensons pas, qu’attendons-nous pour le faire ?
  • RCF
    23 septembre 2022

    Le privé est-il politique ?

    3 min
    Au cours d’une dispute, un homme se laisse aller à gifler sa femme. Celle-ci dépose une main courante, sans intention de médiatiser l’affaire. Mais cet homme est un homme politique, et le monde médiatique s’empare aussitôt du sujet qui occupe en 24 heures autant de place que la guerre en Ukraine. À ceux qui jugent qu’on en fait un peu trop, on répond qu’il le fallait car aujourd’hui « le privé est politique ».
    Ce qui est très étonnant dans cette affaire et dans quelques autres de même nature, c’est que la société en vient aujourd’hui à faire ce qui était violemment reproché à l’Église il n’y a pas si longtemps : s’immiscer dans la vie privée des personnes et légiférer sur les secrets d’alcôves.
    Que la société ait un rôle supplétif à jouer quand la famille est déficiente et quand des drames s’y produisent, c’est l’évidence même. Le principe de subsidiarité, clef de voûte de la doctrine sociale, demande à la fois de ne pas se substituer aux corps intermédiaires – en premier lieu la famille – et de les assister quand ils sont déficients. C’est ainsi que l’État prendra lui-même en charge des enfants dont la vie dans leur propre famille est trop difficile ou dangereuse pour eux. Le rôle de l’État dans l’éducation relève du même principe : le premier lieu de l’éducation est la famille, et c’est seulement pour des raisons pratiques qu’il existe une « éducation nationale ».
    Mais le phénomène auquel nous assistons aujourd’hui est tout autre que supplétif. Par les moyens de communication et la force publique, l’objectif n’est plus de réguler les relations familiales, mais de les transformer de fond en comble. Les restrictions apportées au libre choix par les parents de l’éducation de leurs enfants en sont un signe inquiétant. L’usage du mot « systémique » pour qualifier les violences conjugales en est un autre : celles-ci relèveraient non de comportements individuels répréhensibles, mais d’une conception « patriarcale » et inégalitaire de la famille qui les provoquerait de façon quasi mécanique. Et par voie de conséquence, une caste de nouveaux inquisiteurs serait en droit de revendiquer les pleins pouvoirs pour modifier les règles de la vie familiale et pour sanctionner les manquements à ses injonctions.
    Dès 1951, dans L’homme révolté, Albert Camus mettait en garde contre l’avènement d’une société d’« asservissement intellectuel » tentant d’édifier une nouvelle Église qui s’arrogerait un rôle prescriptif et punitif sans s’embarrasser de références à Dieu. Reprenant la formule célèbre de Marx selon laquelle, dans la cité communiste, le gouvernement des personnes céderait le pas à l’administration des choses, il dénonçait un régime dans lequel ce passage « du gouvernement des personnes à l’administration des choses » avait été réalisé « en confondant la personne et la chose. » L’idéologie soviétique avait fini par chosifier les personnes, créant une caricature d’Église qui, au lieu de les faire grandir en humanité, les transformait en esclaves. Ce qu’une idéologie a fait, d’autres idéologies peuvent le faire à leur tour.
  • RCF
    16 septembre 2022

    Une nouvelle offensive de la culture de mort !

    3 min
    Notre société est ainsi faite qu’elle ne renonce jamais à une évolution dite « sociétale » tant qu’elle ne l’a pas obtenue. La stratégie se déploie toujours en deux temps : un temps long et un temps court. Le temps long consiste à préparer l’opinion à accepter, et même à désirer, un changement législatif qui est en réalité un renversement copernicien dans le domaine moral. On procède alors par petites touches sur le mode compassionnel : prenez par exemple la Gestation pour Autrui, jusque-là réprouvée pour ce qu’elle est, une pratique révoltante qui instrumentalise les êtres humains. On vous explique qu’il y a des GPA « éthiques » (en se gardant bien de vous dire pourquoi certaines seraient éthiques et d’autres non), et on vous fait écraser une larme sur les dizaines de bébés qui attendent en Ukraine leurs parents d’intention… En propagande, cela s’appelle de l’intox. Ensuite vient le temps court : on organise une « large consultation nationale » en expliquant qu’on en tiendra le plus grand compte, mais on ne tient compte en réalité que des lobbies qui poussent toujours dans le même sens, après quoi la loi est votée dans un touchant consensus. Et on vous assure qu’on a fait très attention à bien « encadrer » une pratique. Mais les « encadreurs », comme c’est leur métier, ne sont là en définitive que pour mettre en valeur le tableau.
    C’est ce qui est en train de se passer à propos du suicide assisté. Aucun doute n’est permis sur le but recherché, mais le même processus hypocrite est mis en marche. Aussi vaut-il la peine de réfléchir aux inquiétudes que viennent d’exprimer courageusement huit membres sur les 47 du Comité national d’éthique. Ces inquiétudes, les voici : 1/ quel message enverrait le suicide assisté à la société ? 2/ quel message enverrait-il aux personnes gravement malades, handicapées ou âgées, qui souffrent déjà d’une exclusion sociale et qui seraient encouragées à penser que certaines vies ne méritent pas d’être vécues ? 3/ quel message enverrait-il enfin au personnel soignant, en contradiction totale avec le serment d’Hippocrate et dans la situation alarmante où se trouve notre système de santé ?
    Une fois de plus, il appartiendra à chacun de nous d’engager toutes ses forces dans le combat pour le respect de toute vie, de la conception à la mort naturelle.
  • RCF
    2 septembre 2022

    Une rentrée pontificale

    3 min
    Une rentrée qui ne soit pas sous le signe de la morosité ambiante, est-ce possible ? Oui c’est possible, et c’est ce qu’ont vécu pendant la semaine du 22 au 27 août près de trois mille jeunes servants d’autel venus de toute la France pour un pèlerinage à Rome.
    À vrai dire, ce pèlerinage national, il y avait longtemps qu’on en parlait. Mais la crise du Covid était passée par là et avait contraint à le reporter plusieurs fois d’une année sur l’autre. Beaucoup s’étaient découragés, mais d’autres s’étaient déclarés partants, et dans notre diocèse une trentaine de jeunes ont finalement pu s’embarquer pour Rome sous la houlette des Pères Lanchet et Riès, accompagnés de deux mamans et de deux servants aînés.
    L’évêque de Blois était aussi de la partie, et il ne s’était pas trop fait prier, ravi de retrouver pour quelques jours cette ville où il avait jadis fait ses études. J’ai donc eu la joie de servir de guide au groupe pendant les temps libres dont nous disposions, c’est-à-dire en général durant les après-midis. Les matinées étaient consacrées chaque jour à la découverte d’une basilique majeure pour y célébrer la messe et méditer sur la manière dont son saint patron avait répondu à l’appel du Christ : nous sommes donc passés par saint Jean de Latran, puis par saint Paul hors-les-murs, puis par sainte Marie Majeure, et enfin par saint Pierre, avec des catéchèses et des liturgies qui ont beaucoup touché les jeunes.
    Mais le moment sans doute le plus marquant a été la rencontre avec le Pape, d’où le titre de cette chronique : « une rentrée pontificale » ! Le Saint-Père nous est apparu fatigué, ayant de plus en plus de mal à marcher, mais visiblement très heureux de rencontrer tous ces jeunes français qui le saluaient avec enthousiasme, et aussi très attentif à leur donner un enseignement à la fois simple et nourrissant pour leur vie de foi et leur croissance en humanité. À la sortie de la salle des audiences se tenaient des journalistes, et le hasard a voulu que la télévision catholique KTO jette son dévolu sur nos jeunes blésois, très heureux et honorés de pouvoir raconter à d’autres ce qu’ils avaient vécu.
    En terminant, un merci tout particulier aux généreux paroissiens qui ont aidé financièrement à la réalisation de ce pèlerinage dont nos jeunes loir-et-chériens se souviendront certainement longtemps encore.
  • RCF
    1 juillet 2022

    Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée ?

    3 min
    Le bon sens est-il la chose du monde la mieux partagée ? On est contraint de mettre un point d’interrogation à la fameuse réflexion de Descartes quand on observe ce qui est en train de se passer aux États-Unis et l’onde de choc que cela provoque en France.
    Le bon sens paraît en effet gravement atteint chez toute une frange de la population de ce pays qui se dit hostile à l’avortement, au motif tout à fait fondé qu’il s’agit de la suppression d’une vie humaine, et qui exige en même temps que les armes restent en vente libre, avec la perspective inéluctable de la mort de centaines d’innocents à la merci du premier tueur venu.
    Mais le bon sens ne semble pas plus répandu dans le camp opposé, qui milite à juste titre pour une règlementation sévère du commerce des armes, voire même pour sa suppression, mais considère en même temps comme un progrès majeur de la civilisation le fait de pouvoir tuer des enfants dans le sein de leur mère.
    Les premiers se réclament de leur droit de se défendre et de protéger leurs biens, sans avoir conscience que ce droit insulte les droits les plus élémentaires dès lors qu’il précarise la vie d’autrui. Les seconds proclament haut et fort le droit de disposer de son corps, sans se rendre compte qu’en l’occurrence il s’agit d’abord du corps d’un autre, le plus faible et le plus petit, celui qui n’a aucun moyen de plaider sa cause et de se défendre contre l’agression visant à le supprimer.
    Et pour couronner le tout, nos politiques en mal de consensus, qui ont grandi de l’autre côté de l’Océan au pays de Descartes, voient dans ce débat biaisé l’aubaine qu’ils cherchaient en vain. Incapables de se mettre d’accord pour chercher ensemble le bien commun, les voilà prêts à un grand vote de salut public, où, le cœur sur la main et l’écharpe tricolore en bandoulière, ils déclareront « droit fondamental » et graveront dans le marbre de la Constitution ce que la loi Veil de 1976 appelait une « dépénalisation ». Si vous cherchez ce mot dans le dictionnaire, vous trouverez qu’il s’agit de renoncer à sévir contre un délit que l’on punissait jusque-là : en aucun cas de se mettre tout à coup à appeler « droit fondamental » ce qui était auparavant regardé comme un acte de mort.
    Me sera-t-il permis d’exprimer un souhait ? Si seulement un sujet comme celui-là pouvait cesser de rendre tout le monde hystérique et si les uns écoutaient les arguments des autres, on aurait lieu d’être un peu plus fier de notre humanité. Oui la détresse des femmes est une réalité ; oui l’avortement sera toujours un acte de mort. N’est-il donc pas possible de n’entendre dans les médias qu’un seul et unique son de cloche ? N’est-il donc pas possible d’arrêter de considérer a priori que ceux d’en face sont des monstres ou des fascistes ? « Descartes, reviens, ils sont devenus fous ! »
  • RCF
    24 juin 2022

    Gouvernable, ingouvernable

    3 min

    Un pays sans majorité absolue à l’assemblée est réputé « ingouvernable ». Mais qu’on franchisse le Rhin, les Alpes ou les Pyrénées, on trouvera d’autres pays également sans majorité absolue et qui sont malgré tout gouvernés.

    Sans faire de facile jeu de mots, on peut dire que « gouvernable » et « ingouvernable » sont des notions… relatives et non pas absolues. Elles dépendent de la culture politique du pays où l’on se trouve : culture de l’hégémonie chez les uns, culture du compromis chez les autres. Nous autres français souffrons peut-être d’une incapacité native à concevoir l’art de gouverner autrement que comme une quasi dictature de la majorité. Cela pourrait être à l’origine de la sacralisation typiquement française du scrutin majoritaire, dont la principale vertu est de gonfler les majorités, de les rendre monstrueuses jusqu’à ce que, comme la grenouille de la fable, elles finissent par crever de leur propre enflure en se fissurant au gré de l’apparition de frondeurs en leur sein.

    Le moment si particulier que traverse la France est sans doute un des symptômes de la crise profonde de notre démocratie. Il invite à réfléchir à frais nouveaux sur les impasses de notre société individualiste et libertaire.

    Dans ce contexte de crise, les politiques sont fréquemment confrontés aux sautes d’humeur des électeurs (par exemple quand ceux-ci leur refusent une majorité juste après les avoir reconduits dans leur charge) : ils peuvent alors méditer sur les mérites d’une culture du compromis. Mais il me semble qu’ils devraient aller plus loin et plus profond : se demander s’ils ont su respecter les bases non démocratiques sur lesquelles doit être établie la démocratie. Car les fondements les plus essentiels des sociétés humaines ne peuvent pas être démocratiques : la vérité n’est pas démocratique, ni la beauté, ni le bien et le mal – d’où l’absurdité de la phrase de Jacques Chirac : « pas de loi morale qui prime la loi civile ». Pour que perdure la démocratie, il faut nécessairement qu’il y ait en elle du non démocratique, reconnu et accepté par tous. Et c’est en référence à ce non démocratique – l’intérêt supérieur du pays et le bien commun par exemple – que des majorités de compromis pourront effectivement gouverner. Il n’est plus besoin alors de majorité absolue : il faut et il suffit que l’absolu soit reconnu là où il est vraiment : dans ce qui transcende les volontés et les caprices individuels et relie les hommes ensemble. C’est là que redevient possible ce qui, selon Aristote, constitue la base de la cité : la philia, l’amitié entre les personnes. Car la vie en commun est un fait de nature : de la famille au village et du village à la cité, les communautés naturelles s’emboîtent les unes dans les autres. Selon Rousseau, l’individu est « un tout parfait et solitaire » ; mais vingt et un siècles plus tôt, Aristote avait déjà réfuté cette affirmation en rappelant que l’homme est « incapable de se suffire à lui-même, il n’existe que comme partie d’un tout ».

     

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