Comment le plus gros pollueur du monde influe-t-il sur les négociations climatiques ? À l’heure où l’enjeu majeur de la COP 28 porte sur la sortie des énergies fossiles, la Chine a endossé le costume du facilitateur. Un rôle qui s’explique par sa stratégie nationale en matière d’énergie : entre développement du renouvelable et utilisation massive du charbon.
Certains parlent d’un facilitateur, d’autres d’un double langage : la vérité est que la Chine s’est révélé être un acteur clé des négociations climatiques lors de la COP28.
Le négociateur chinois, Xie Zhenhua, est un vieux briscard de la diplomatie climatique. Présent à la COP21 lors de l’accord de Paris, il représente son pays depuis des années. Pendant cette COP28, il a tenu à souligner que la Chine et les États-Unis avaient signé une déclaration commune en novembre 2023 pour acter le remplacement graduel des énergies fossiles par les énergies renouvelables.
Un volontarisme qui s’est retrouvé dans les négociations alors que la Chine est le plus gros pollueur du monde. Elle représente plus de la moitié de la consommation de charbon mondial et 60 % de sa production d’électricité vient encore du charbon. Pourtant, “chaque année, la Chine augmente sa production d’électricité à base de charbon, mais ses énergies renouvelables ou décarbonées croissent encore plus vite” explique Joseph Dellatte, chargé des politiques de décarbonisation à l'Institut Montaigne spécialiste des relations entre la Chine et l’Europe.
La Chine prévoit un pic de ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et la neutralité carbone d’ici 2060. “La diversification du mix énergétique chinois devrait permettre au pays de commencer à diminuer sa consommation de charbon dans un délai relativement court” confirme le chercheur.
La Chine doit donc trouver des marchés pour exporter ses énergies vertes
Or, pour respecter cet objectif, l'empire du milieu investit massivement dans les énergies renouvelables. D’une main Pékin, jongle avec le charbon, de l’autre, il est devenu l’un des leaders mondiaux en matière d’éolien et de photovoltaïque. Il développe également l’hydrogène vert ou le nucléaire.
“La Chine doit donc trouver des marchés pour les exporter” expose Joseph Dellatte. “Pour l’instant, les débouchés sont surtout en Europe et aux Etats-Unis et elle entend se créer des marchés dans les pays du sud” détaille-t-il. Dans cette optique économique, Pékin a donc plutôt intérêt à pousser vers les énergies renouvelables dans les accords finaux des COP.
Néanmoins, pas question pour Pékin de plaider pour une sortie à 100 % des énergies fossiles. En raison de sa propre situation interne d’abord, mais également, car sa position d’intermédiaire apparaît plutôt confortable. “La Chine a un intérêt géopolitique à apparaître comme le défenseur du sud global” selon le spécialiste de l’Institut Montaigne.
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Pour ce faire, elle est obligée de garder un langage ambivalent sur les énergies fossiles. “La position de la Chine est confortable dans ces négociations, car elle pense être dans son droit : en tant que pays en développement, elle réclame le droit d’utiliser des énergies fossiles et en même temps elle investit dans les énergies vertes” conclut Joseph Dellatte.
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