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"Jouer un rôle, ça permet de témoigner, de comprendre l'autre" selon Mehran Tamadon, réalisateur iranien

Un article rédigé par Imrane Baroudi - RCF, le 15 mai 2024 - Modifié le 16 mai 2024
L'Invité de la Matinale"Jouer un rôle, ça permet de témoigner, de comprendre l'autre" selon Mehran Tamadon, réalisateur iranien

Installé depuis de longues années en France, Mehran Tamadon est le réalisateur d'un diptyque cinématographique sur la torture dans son pays d'origine, l'Iran. Après un premier film, Mon pire ennemi, où il propose à des iraniens ayant subi la torture d'endosser le rôle de bourreau, Mehran Tamadon sort mercredi 15 mai un nouveau documentaire : Là où Dieu n'est pas. Au micro de Pierre-Hugues Dubois, il a aussi apporté son soutien au réalisateur Mohammad Rasoulof en fuite de l'Iran.

Mehran Tamadon invité de la matinale pour la sortie de son documentaire "Là où Dieu n'est pas" © RCFMehran Tamadon invité de la matinale pour la sortie de son documentaire "Là où Dieu n'est pas" © RCF

Après son documentaire Iranien dans lequel il avait invité quatre mollahs dans la maison de sa mère à Téhéran pour une expérience de "vivre-ensemble", le réalisateur Mehran Tamadon revient au cinéma avec un diptyque de documentaires. Le premier Mon pire ennemi, où il propose à des Iraniens ayant subi la torture d'endosser le rôle de bourreau, et le second, Là où Dieu n'est pas, qui sort en salle ce mercredi, dans lequel trois anciens détenus évoquent les tortures qu’ils ont vécues dans les prisons iraniennes.

Ces deux films interrogent la limite de ce qui est possible de montrer : "jusqu'où peut-on représenter la torture dans un documentaire" pour Mehran Tamadon qui assume la violence de la société iranienne qu'il veut comprendre : "Les iraniens sont très dures les uns avec les autres [...] Je pose aussi avec les films, la question de la violence qui est ancrée en nous."
 

Doit-on humaniser un bourreau ?

Mehran Tamadon a pour objectif non pas d'humaniser mais de dialoguer pour mieux comprendre. Qui se cache derrière les tortionnaires ? 

Pour approcher au plus près cette situation, le documentariste a donc proposé aux victimes du régime islamique d'inverser les rôles dans le cadre d'un travail bravant leurs traumatismes. Ils jouent les tortionnaires qui autrefois les battaient mais n'endossent pas leur rôle selon Mehran Tamadon : "Lorsqu'on est torturé, on a les yeux bandés. C'est effrayant, il ne faut pas voir. La scène montre pour la première fois aux victimes la position dans laquelle ils étaient. C'est comme si la peur quittait leurs corps."

Le réalisateur iranien répond donc à la question : comment est-ce qu'on peut toucher l'autre, quelle clé permet de comprendre son "pire ennemi" ? Compter sur l'humanité qu'il y a au fond de l'autre pour expliquer sa violence : "J'essaie d'ouvrir ces portes par le cinéma et d'autres le font de façon encore plus courageuse en manifestant en Iran."
 

"Rasoulof est un réalisateur que j'estime beaucoup"

Le film ne permet pas de comprendre toute la société iranienne car la violence y est encore présente, en témoigne les mobilisation de soutien à la jeune Masha Amini autour du slogan : "Femme, vie, liberté." 

Preuve de l'ampleur et de l'intensité de la répression violente du régime islamique, alors que son film est en lice pour la Palme d'or au Festival de Cannes 2024, le réalisateur Mohammad Rasoulof a fui clandestinement l'Iran et il a appellé le cinéma mondial au secours. Mehran Tamadon répond à cette interpellation : "Rasoulof est un réalisateur que j'estime beaucoup. Il fait partie des rares cinéastes à vraiment questionner le pouvoir iranien, son film Le Diable n'existe pas fait ça de manière très directe, je me suis reconnu dans sa démarche." Mehran Tamadon lui apporte son soutien.

Mon pire ennemi est en salle depuis le 8 mai et Là où Dieu n'est pas sort ce mercredi 15 mai.
 

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