Face au risque de disparition des langues régionales, les associations se mobilisent pour réclamer leur préservation. Plusieurs rassemblements sont organisés samedi 1er juin, notamment en Alsace, en Bretagne et en Corse. Peo Jorajuria, président de la fédération Seaska, qui scolarise des enfants du Pays Basque nord, fait l'état des lieux de l'enseignement du basque et pointe les obstacles à sa pratique.
Les associations de langues régionales demandent le droit de vivre avec leur langue ainsi qu’une modification de la Constitution. En effet, depuis 1539 et l'ordonnance de Villers-Cotterêts, le français est la langue officielle du pays. Un point repris dans le 2e article de la Constitution de la Vème République qui stipule que "la langue de la République est le français". Et si cette langue commune a permis de faciliter les échanges entre les différentes régions françaises, d'aucuns déplorent qu'elle ait aussi porté atteinte aux langues régionales ; la plupart d'entre elles étant de moins en moins parlées.
Et c'est pour contrecarrer la disparition de ces dialectes, que la loi Molac relative à la protection et à la promotion des langues régionales a été adoptée en 2021 par le Parlement. Elle reconnait l’existence d’un patrimoine linguistique dans le pays, assure l'enseignement des langues régionales tout au long du parcours scolaire de l'élève. Elle autorise aussi les services publics à recourir à la traduction en langue régionale sur les panneaux et les bâtiments par exemple. Mais face à son manque de mise en œuvre, les associations sont vent debout.
Au Pays basque, de plus en plus d'élèves étudient la langue basque. Sur l'enseignement primaire, 47% des élèves choisissent le bilingue ou l'immersif. Un seuil limité, non par le choix des parents, mais par l'offre qui est proposée. Malgré une forte demande, 30% des écoles ne proposent pas cet enseignement.
À chaque fois qu'on ouvre de nouvelles sections, on a de nouveaux élèves. Le choix des parents a toujours été très fort, mais la question de l'offre limite cette réalité.
L'objectif de faire étudier aux enfants la langue basque est de la transmettre : “c'est une langue qui est utilisée au quotidien dans la réalité, dans la rue, dans la culture. Vivre en pays basque sans parler la langue basque, c'est passer à côté de pleins de choses qui se font dans cette langue”, explique Peio Jorajuria. Si elle est utilisée au quotidien, ce n’est que dans certains domaines. Dans la vie publique et administrative, elle continue d'être interdite.
Pour Peio Jorajuria, “il n'y a aucun doute" sur le fait que les langues régionales sont en danger. Il appuie ses propos en citant les atlas des langues en danger de l’UNESCO, dans lesquels figurent toujours les langues régionales françaises.
“Pour qu'une survie soit assurée, il faut à peu près 30% de locuteurs sur un territoire. Il faut surtout un cadre qui permet cet usage”. Pour le basque, l'environnement français qui n’est pas propice à l’épanouissement des langues régionales : “certains prénoms continuent d'être interdits en France. On peut appeler son enfant John ou Ashley sans aucun souci, mais certains prénoms basques sont interdits par l'administration”.
Pour qu'une survie soit assurée, il faut à peu près 30% de locuteurs sur un territoire.
Bien que les langues régionales soient incluses dans le patrimoine de la France, les associations de défense estiment que le pays n'en fait pas assez au regard de la loi parce que “l'apprentissage est autorisé, mais pas l'usage”.
Selon Peio Jorajuria : "parler une langue différente du français n'empêche pas d'apprendre le français. Le multilinguisme est la norme au sein de l'humanité. En France, historiquement, on oppose le fait de connaître une autre langue avec le fait de connaître le français. C'est un archaïsme issu de la révolution, mais qui totalement obsolète".
Pour les associations de défenses régionales, les autorités ne connaissent pas suffisamment les régions et ce qui peut être essentiel pour ces habitants. “On le sait, les législateurs sont toujours prêts à nous accompagner pour renforcer le cadre législatif pour permettre l'usage de nos langues. C'est d'un point de vue de l'administration qu'on a un blocage conséquent”, estime Peio Jorajuria.
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