Je vous propose aujourd’hui un voyage dans le temps. Nous sommes au milieu du XVe siècle dans la ville allemande de Mayence, au bord du Rhin. C’est là qu’un homme dénommé Johann Gutenberg met au point une technique d’imprimerie qui va assurer la diffusion du savoir pendant cinq siècles. La Bibliothèque nationale de France consacre à cette révolution une passionnante exposition sur le site François-Mitterrand dans le XIIIe arrondissement de Paris.
Jusqu’à Gutenberg, les livres étaient rédigés à la main. Des livres religieux, calligraphiés à la main par des moines copistes. Cela prenait beaucoup, beaucoup de temps. Il fallait trois ans à un copiste pour produire une Bible. Les techniques d’impression apparaissent au début du XVe siècle avec la xylographie. Sur une planche de bois, on grave une image ou un texte puis on applique de l’encre et une feuille de papier. L’innovation apportée par Gutenberg, c’est l’usage de caractères mobiles en métal que l’on assemble pour former des lignes puis des pages que l’on imprime sous une presse. Ces caractères, on les réutilise ensuite pour composer d’autres textes. Le gain de temps est énorme.
Gutenberg n'est pas l’inventeur de l’imprimerie, comme on le découvre dans cette exposition. Il y a, dans les collections de la BNF, un ouvrage imprimé en caractères mobiles qui est plus ancien d’environ 75 ans. Il fut imprimé en Corée en 1377, une compilation d’enseignements des bouddhas, dénommée Jikji. Gutenberg n’en connaissait évidemment pas l’existence !
La technique est ainsi apparue en Asie. Mais elle ne semble pas y avoir connu un envol aussi fulgurant qu’en Europe. Cela tient pour une bonne part au mode d’écriture. Des idéogrammes d’un côté, l’alphabet de l’autre. Pour composer le Jikji, il a fallu fondre 5.538 caractères différents. Chez Gutenberg, il n’en a fallu que 240. Et encore, le nombre a été rapidement réduit en simplifiant les usages de l’écriture manuscrite.
À défaut d’avoir été, si j’ose dire, l’unique inventeur de l’imprimerie, Gutenberg a été un formidable innovateur. Pour la fameuse Bible de Gutenberg, le premier ouvrage qu’il a commercialisé, il a augmenté le nombre de lignes par page en usage chez les copistes. Passer de 40 à 42 lignes a permis, sur 1.300 pages, l’économie d’un bon nombre de feuilles à une époque où le papier coûtait très cher. Gutenberg en a imprimé au total 180 exemplaires sur une période de deux ans. Deux exemplaires de la Bible de Gutenberg appartiennent à la BNF, l’une sur papier, l’autre sur parchemin. Elles sont présentées côte à côte dans l’exposition.
Le développement de l'imprimerie se mesure par la rapidité avec laquelle la technique se répand en Europe. Gutenberg a commercialisé sa Bible en 1454. Dix ans après, il y a des impressions en Italie, quinze ans après à Paris à la Sorbonne, vingt ans après à Lyon, etc. Très vite apparaissent des traductions de la Bible dans les langues locales, des ouvrages profanes, illustrés, en couleur, des recueils de partitions musicales…
Tout cela a révolutionné la diffusion des connaissances et joué un rôle considérable dans dans des événements comme la Renaissance italienne ou la Réforme protestante. Bref, un bouleversement qui évoque beaucoup celui que nous vivons en ce moment avec Internet et l’émergence de la culture numérique.
Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.
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