Les questionnements actuels sur la fin de vie ou sur la réforme des retraites reflètent une nouvelle perception de la vieillesse en France, qu'il faudrait penser comme une aventure plus que comme un naufrage, selon Marie de Hennezel. Elle est l'auteure de "L’aventure de vieillir" (éd. Robert Laffont), dans lequel elle invite à vivre le vieillissement comme une opportunité.
"Il est très agréable de vieillir, la diminution des forces physiques est un enchantement, c’est l’apprentissage de la mesure". Au siècle dernier déjà, l’écrivain Jean Giono proposait une autre perception de la prise d'âge. En 2023, Marie de Hennezel marche dans ses pas. Elle est psychologue, psychothérapeute, et travaille depuis plusieurs années sur l’accompagnement de la fin de vie.
"Passer le cap des 60 ans n’a pas été facile", confie-t-elle. Symboliquement, les 60 ans marquent l’entrée dans la deuxième partie de la vie, selon Marie de Hennezel. C’est certes la décennie de la retraite et de la carte senior, mais aussi des opportunités. L'auteure prône une vieillesse heureuse et féconde : "c'est un enjeu essentiel pour soi et pour la société".
"Je ne vieillis pas, au contraire, (...) ma pensée croît." Cette phrase de Victor Hugo résume la tendance générale de l’esprit passé un certain âge. Ce paradoxe du vieillir, Marie de Hennezel, le vit comme le privilège de toujours apprendre. Si le déclin du corps est inévitable, il ne doit pas être vécu comme une fatalité. Avec l'âge, la perception augmente, tout comme l’attention portée à ce qui nous entoure. La retraite a l'avantage d'offrir davantage de temps pour apprendre et se stimuler.
"La France a peur de vieillir". Perçue différemment en fonction des régions du globe, la vieillesse n’a pas bonne presse en Occident. "Elle a été déspiritualisée dans une société basée sur des valeurs de productivité", déplore la psychologue. Pour contrer les peurs qui nous habitent à cet égard, Marie de Hennezel pousse à les identifier. Face à l'angoisse du vieillissement physique, par exemple, certains font appel à la chirurgie esthétique. Mais deux choses ne changent pas : le regard et le sourire. "Ce sont les deux seules choses qui restent profondes et vraies malgré tout", souligne l'intervenante.
La maladie, la perte d'autonomie, l'oubli... Avec les années, les craintes se multiplient. Marie de Hennezel insiste sur le lien social. Un lien fondamental qui peut s'équilibrer avec une solitude nécessaire, apprivoisée et respectée. La mort doit quant à elle être affrontée, la finitude méditée. "Ce n'est pas tellement la mort qui fait peur, c'est plutôt la manière dont on meurt".
Plus qu’un travail, vieillir semble être une fleur à saisir. Prendre soin de son corps apparaît comme une évidence. Marie de Hennezel invite par exemple à pratiquer 15 minutes de sport chaque matin. "Certes, il y a des deuils à faire en vieillissant, mais on peut mettre l'énergie que l'on perd dans une autre façon de prendre soin de soi", nuance-t-elle. La sexualité des personnes âgées reste taboue et dévaluée. Elle peut pourtant être appréhendée différemment, avec d'autres formes de tendresses.
L'âge est l'occasion de faire une relecture de sa vie. Faire preuve de gratitude, se souvenir, identifier ce qui nous a rendu heureux sont autant des clés que donne l’auteure pour vieillir mieux.
Vieillir, en somme, c’est savoir passer du faire à l’être. C’est méditer sur sa finitude, se mettre en paix avec sa vie, et en trouver le sens. Marie de Hennezel estime que passée la soixantaine, "il faut absolument alléger ses valises". Au Japon, par exemple, il est courant de pratiquer l'ikigai, qui permet de repenser à sa joie de vivre et à identifier ses sources de joie. La psychologue française, elle, recommande de repenser sa rancune, ses regrets et ses remords, à les apprivoiser.
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