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Retrouvailles avec Germaine Richier

Un article rédigé par Guillaume Goubert - RCF, le 28 février 2023 - Modifié le 17 juillet 2023
Les Histoires de l'artRetrouvailles avec Germaine Richier

Le Centre Pompidou, à Paris, inaugure demain une grande exposition retraçant l’œuvre de Germaine Richier, sculptrice française née en 1902. Ce sera pour beaucoup de visiteurs la découverte d’une inconnue ou presque. Pourtant, selon la commissaire de l’exposition, Ariane Coulondre, Germaine Richier fut "l’artiste femme la plus célèbre de son temps".

Germaine Richier, Christ d’Assy, 1950, bronze naturel nettoyéGermaine Richier, Christ d’Assy, 1950, bronze naturel nettoyé

Une des sculptures de Germaine Richier fut achetée par l’État dès 1937. Le Musée national d’art moderne, ancêtre du Centre Pompidou, lui a consacré une exposition entière en 1956, la première qui fut offerte en ces lieux à une artiste femme. Mais, après son décès en 1959, Germaine Richier a été à peu près oubliée ou, disons, négligée. Pour citer encore Ariane Coulondre, "elle était là, mais pas regardée". 

 

Une artiste oubliée

 

Comment expliquer cet oubli ? On peut évoquer plusieurs pistes. Germaine Richier est morte assez jeune, sa production s’est donc arrêtée prématurément. Il lui a manqué aussi un galeriste qui défende son œuvre. Le fait qu’elle soit une femme n’a certainement pas aidé. Enfin, elle n’appartenait à aucun courant. Elle était difficile à situer, entre classicisme et avant-garde.

 

À ses débuts, Germaine Richier est une héritière d’Auguste Rodin et, plus encore, d’Antoine Bourdelle, dont elle a été l’élève. Elle restera toute sa vie une artiste figurative, sans rejoindre le camp de l’abstraction. Cependant, elle s’émancipe assez vite de tout académisme, elle s’éloigne du réalisme. La surface de ses statues n’est pas lisse mais accidentée. Dans ses modelés d’argile, elle intègre des racines, des bois flottés, des coquillages, ce qui reste perceptible dans le résultat final en bronze. Plusieurs de ses statues ont une dimension à la fois humaine et animale, homme chauve-souris ou femme cigale.

 

Germaine Richier : un nom associé à une vive polémique dans le domaine de l’art sacré

 

Il s’agit du Christ en croix qu’elle a conçu pour le chœur de l’église du plateau d’Assy, en Haute-Savoie, inaugurée au début des années 1950. Une œuvre magnifique, très dépouillée, où le corps du Christ fusionne en quelque sorte avec le bois de la croix. Mais, un an plus tard des catholiques traditionalistes partirent en croisade contre cette œuvre dénoncée comme "un scandale pour la piété chrétienne". Le Vatican viendra appuyer cette campagne, un cardinal, Celso Costantini, utilisant le qualificatif de "blasphème visuel". Sur décision de l’évêque d’Annecy, la statue fut reléguée dans une chapelle latérale. Elle ne reviendra dans le chœur qu’en 1969.

 

Chose touchante, les fidèles actuels de l’église d’Assy se sont émus lorsqu’ils ont appris que le Christ de Germaine Richier allait être absent de l’église pendant une année. Mais, bien sûr, il reviendra après l’exposition. Exposition où il est extrêmement bien présenté, dans un espace qui se prête au recueillement. 

 

Deux informations pour conclure. L’exposition du Centre Pompidou, visible jusqu’au 12 juin, sera ensuite présentée du 12 juillet au 5 novembre au Musée Fabre de Montpellier. Et, pour découvrir la vie et l’œuvre de Germaine Richier, on peut aussi lire avec bonheur une très belle bande dessinée de Laurence Durieu et Olivia Sautreuil, "Germaine Richier - La femme sculpture" (éd. Bayard Graphic, 2023).

 


> Exposition Germaine Richier, du 1er mars au 12 juin 2023, au Centre Pompidou, Paris

 

Les Histoires de l'art © RCF
Cet article est basé sur un épisode de l'émission :
Les Histoires de l'art
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