Je vous parle aujourd'hui d'architectures qui n'existent pas. L’architecture est un art particulier, car il est soumis à de nombreuses contraintes, financières et techniques. Pour concrétiser un projet, l’architecte a besoin d’un client prêt à le financer. Et ce projet doit obéir à de nombreuses règles techniques pour tenir debout. Cependant, il y a des architectures qui ne sont pas faites pour être construites. Elles sont rêvées par des artistes : des peintres, des dessinateurs, des sculpteurs, des graveurs ou des cinéastes. Et là, il n’y a pas d’autres limites que celles de l’imagination. C’est à cela que le musée des Beaux-Arts de Nancy consacre une très belle exposition intitulée : "Architectures impossibles". Une exposition qui rassemble des œuvres allant de la fin du XVe siècle jusqu’à nos jours sur des supports très variés, de la gravure jusqu’à la vidéo.
L’architecture, c’est d’abord tout simplement, un beau thème décoratif. Les paysages avec des ruines au soleil couchant peuplent les cimaises de nos musées. On peut par exemple citer le nom d’Hubert Robert. Il y a aussi des références bibliques ou mythologiques qui conduisent des artistes à représenter des architectures. La tour de Babel a été un grand thème pictural illustré notamment par Bruegel. Thème d’autant plus intéressant qu’il met en lumière le pouvoir de l’architecte qui veut se mettre en rivalité avec Dieu, souvent désigné comme le grand architecte de l’univers.
Autre thème symbolique présent dans l’exposition, celui du labyrinthe où l’homme s’égare. Là, on peut admirer les sublimes gravures de Piranèse qui datent du XVIIIe ou celles de Maurits Cornelis Escher, artiste néerlandais du XXe siècle dont les images sont très connues. Par exemple, celle d’un escalier en quadrilatère dont on ne peut dire s’il monte ou s’il descend. On peut évoquer encore le registre du rêve qui s’affirme au XIXe siècle au travers des représentations de châteaux comme aimaient en dessiner Victor Hugo ou Gustave Doré et qui s’illustre encore au XXe siècle dans les tableaux d’un grand artiste néerlandais peu connu en France, Carel Willink.
Et pour être franc, on a souvent envie de dire : tant mieux. Car, certains rêves architecturaux sont terrifiants. Je pense à Le Corbusier qui envisageait de raser une bonne partie du centre historique de Paris pour bâtir une série de grands immeubles tous identiques entourés de jardins. Pire encore, les projets d’Albert Speer, l’architecte préféré d’Adolf Hitler, qui avait imaginé bâtir à Berlin une coupole capable d’abriter 180.000 personnes. Sa hauteur aurait atteint 320 mètres et son diamètre 250 mètres pour un volume 17 fois supérieur à celui de la basilique de Saint-Pierre de Rome.
Dans un tout autre registre, à la fois drôle et touchant, l’exposition fait aussi mémoire des curieux fantasmes d’Eugène Viollet-le-Duc. Cet architecte célèbre pour ses restaurations au XIXe siècle de Notre-Dame de Paris, de Carcassonne ou du château de Pierrefonds était également un passionné de montagne. Et il avait rêvé de restaurer les pics des Alpes tels qu’ils étaient avant que l’érosion ne les transforme. Ce qui a donné lieu à de très beaux dessins, bien sûr totalement imaginaires.
Chaque mardi à 8h45, Guillaume Goubert et Simon de Monicault présentent une exposition ou un événement qui raconte l'histoire de l'art.
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