Dans le sud de Madagascar, la firme australienne Base Toliara tente d’exploiter un gisement d’ilménite dans les environs de Tuléar, un des districts les plus pauvres de l’île. Face à ce projet, une partie de la population s'est levée pour dénoncer les ravages inévitables qu’occasionnerait une mine. Depuis 2019, les forages sont à l’arrêt. Mais des pêcheurs et des communautés villageoises restent très vigilants.
À Tuléar, dans le sud de Madagascar, le sous-sol est riche en ilménite et attire les industriels spécialisés dans les sables minéralisés, que l'on utilise dans le secteur du bâtiment. Ainsi, la firme australienne Base Toliara tente depuis des années d’exploiter le gisement d'ilménite de Tuléar. Mais ils sont nombreux à s'y opposer, au nom du respect de la culture locale et de la préservation de l'environnement. Véronique Alzieu est allée à la rencontre les membres du Craad-OI (Centre de recherches et d'appui pour les alternatives de développement dans l'océan Indien), qui soutient le combat des populations locales.
Tuléar - Toliara en Malgache - est la plus grande ville du sud de Madagascar, elle est située à près de 1.000 km de la capitale. Dans l'un des districts les plus pauvres de l’île, selon un rapport de la Banque mondiale. La pêche est parmi les principales sources de revenu des habitants.
Dans ce contexte, un projet d’exploitation minière peut apparaître comme providentiel. Ce que la firme australienne a bien compris. "Certaines familles ont accepté [de se déplacer] moyennant de l’argent, racone Volah Andriamanantenasoa, directrice des programmes de l'organisation Craad-OI, mais ça les met en porte-à-faux vis-à-vis des autres membres de la communauté et ça crée des divisions."
Toucher aux morts est absolument tabou
L’impact d'une exploitation minière sur cette population déjà très vulnérable serait considérable. La perte des terres ancestrales aurait un impact direct sur la culture locale. "Ils verraient leurs terres accaparées par la mine ou par des routes", s'inquiète Volah Andriamanantenasoa, cela obligerait à déplacer des tombeaux. Or, dans cette région, toucher aux morts est absolument tabou."
Pour faciliter les forages et le travail de la firme australienne Base Toliara en vue de l'extraction, une grande partie de la forêt - pourtant protégée - est désormais interdite aux populations indigènes comme les Mikéas. Ce peuple de chasseurs-cueilleurs, non reconnu par l’État malgache, vit de et dans la forêt où il trouve nourriture, eau et plantes médicinales. Désormais installés dans la savane, les Mikéas vivent sans eau et sans abris naturels.
Au mieux, 450 emplois, essentiellement confiés à des ingénieurs recrutés à Antananarivo
L’eau douce dans cette région est une question cruciale. "La société minière prévoit d’en utiliser jusqu’à 500 m3 par heure dénonce Volah. Le district de Tuléar est une région très sèche où l'on voit déjà les effets du réchauffement climatique. L’année dernière il y a eu deux jours de pluie non consécutifs… "
Si un député dénonce l’impact catastrophique qu’aurait l’extraction du minerai sur le tourisme (qui voudrait passer ses vacances dans une région potentiellement polluée par la radioactivité ?) d’autres élus vantent les 4.500 emplois et le dynamisme économique que susciterait la mine.
"Faux", répondent de jeunes étudiants ou professionnels regroupés en association pour la protection de l’environnement. "Au mieux se seront 450 emplois, explique Josette, 28 ans, une des responsables du groupe, et la plupart seront confiés à des ingénieurs venant de la capitale parce qu’il n’y a pas assez de gens diplômés à Tuléar. Et puis, dans 25 ans, quand l’extraction sera finie, Base Toliara se retirera et qu’est-ce qu'il nous restera ?"
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