Allemagne
POINT DE VUE D'AYMERIC CHRISTENSEN - Sans grande surprise, la campagne des européennes peine à susciter l’intérêt. Elle promet même une abstention élevée et une large victoire au Rassemblement national. Faut-il se résigner à cette situation politique ?
Bat son plein, il faut le dire vite ! "Bat son vide", peut-être ? Certes, les européennes n’ont jamais été des élections qui déchainent l’enthousiasme – ni des politiques, ni des électeurs. Et c’est à l’image de notre rapport à l’Europe, jugée tout à la fois trop lointaine et trop présente, trop abstraite et trop pointilleuse… L’Union suscite autant d’indifférence que de rejet. Elle n’a jamais su créer chez nous un réel et profond sentiment d’appartenance. Résultat : il flotte sur le scrutin de début juin un inquiétant parfum de résignation.
On s’habitue à ce que cette élection, qui devrait être un grand rendez-vous démocratique, l’occasion de débattre d’un vrai projet de société pour le continent, ne soit qu’un miroir de plus de notre désintérêt. Dans une démocratie en bonne santé, le simple fait que moins d’un électeur sur deux envisage d’aller voter le 9 juin devrait créer un électrochoc et un sursaut. Mais non. Rien. On s’habitue, qu’est-ce que vous voulez…
Et même pire : on se console en se disant que ce sera peut-être mieux qu’en 2019, ou en tout cas mieux qu’aux régionales. Comme disait l’autre : il en faut peu pour être heureux ! À chaque sondage, en mesurant les écarts des partis dans les intentions de vote, on fait mine d’oublier que les voix exprimées cachent une majorité volontairement silencieuse : non-inscrits et abstentionnistes, auxquels on serait tenté d’ajouter le murmure quasi inaudible des votes blancs et nuls. Bref : on accepte l’idée que l’Europe n’intéresse pas, on se résout à laisser tant de nos concitoyens renoncer à exprimer leur voix.
Je parlais à l’instant des sondages. Il ne vous aura pas échappé que la liste en tête, c’est celle de Jordan Bardella, du Rassemblement national. Vous me direz : c’est un effet de la proportionnelle. C’est vrai. Mais, pardon, c’est aussi un signal grave auquel nous nous habituons.
Non seulement on se résigne à un désamour pour l’Europe, mais dans le même temps on consent à laisser l’extrême droite l’emporter… et de très loin. Le paradoxe, c’est quand même que les électeurs, tout en manifestant leur défiance à l’égard des autres partis politiques, semblent privilégier la tête de liste qui affiche le moins bon bilan comme député au Parlement européen !
Comme si le travail de député, la défense d’un programme et d’idées n’avait, finalement, pas de réelle importance ? Au-delà de toute considération partisane, ou même morale, c’est d’une infinie tristesse…
Non seulement ils sont réels, mais ils sont sans doute encore plus décisifs cette année. Oui, l’Union européenne a des défauts, mais elle a aussi montré son utilité durant les crises récentes. Et surtout : dans un monde qui danse sur le fil de la guerre, nous avons besoin d’une Europe solide et solidaire.
Une Europe capable de faire front. Pas une Europe qui doute d’elle-même. S’il n’en fallait qu’un, voilà sans doute le premier défi de ces élections. Et il est encore temps d’être au rendez-vous.
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