"Si ton frère a péché, va et reprends-le." Qui suis-je pour faire des reproches à l’autre ? Cela semble aller à contre-courant de l’humilité tant vantée dans les Écritures. Dans l'Évangile de ce dimanche, il est question de ce que les chrétiens appellent la correction fraternelle.
Évangile du dimanche 10 septembre (Mt 18, 15-20)
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Si ton frère a commis un péché contre toi, va lui faire des reproches seul à seul. S’il t’écoute, tu as gagné ton frère. S’il ne t’écoute pas, prends en plus avec toi une ou deux personnes afin que toute l’affaire soit réglée sur la parole de deux ou trois témoins. S’il refuse de les écouter, dis-le à l’assemblée de l’Église ; s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain.
Amen, je vous le dis : tout ce que vous aurez lié sur la terre sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre sera délié dans le ciel. Et pareillement, amen, je vous le dis, si deux d’entre vous sur la terre se mettent d’accord pour demander quoi que ce soit, ils l’obtiendront de mon Père qui est aux cieux.
En effet, quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. »
Source : AELF
Quand il a écrit ce texte, dans les années 70, l’évangéliste Matthieu s’adressait aux tout premiers disciples. "Les disciples, qui sont devenus apôtres et qui ont constitué cette communauté de gens qui se réfèrent au Christ Jésus, ont été exclus de la synagogue, raconte le pasteur James Woody. Ils doivent se constituer en assemblée et il faut donc penser la manière de gérer la communauté." Et dans ce passage de l’évangile de Matthieu, Jésus va bientôt entrer à Jérusalem, où il va vivre sa Passion. "Il a déjà longuement enseigné, et c’est peut-être le moment où il va penser à la constitution de la communauté qui va lui succéder."
Ceux qui sont appelés ici "frères" sont les membres de la communauté des chrétiens en train de se constituer. Pour James Woody, il signifie : "Nous sommes du même sang, toi et moi, au sens où le sang c’est la vie, nous partageons la même vie, la même condition, le même horizon, la même destinée…"
Or, la notion de "frère" est assez peu présente dans le Premier Testament. Pour le pasteur, "ce texte offre l’autre comme un frère qui pour l’instant n’était peut-être pas aussi frère que cela… On est en train de constituer la notion de frère."
Dans la Bible, le péché n’est pas tant un non-respect des règles morale qu’un "problème de disposition par rapport à Dieu", rappelle le pasteur. Il y a péché quand on oublie Dieu, aussi bien dans notre rapport aux autres que dans notre rapport à la vie. Pour James Woody, ce texte nous dit qu’il y a dans la vie "des moments où nous oublions de regarder l’autre comme un frère" et que nous "ne le regardons plus avec le regard de Dieu". Et "c’est à ce moment-là que la relation se dégrade et qu’il faut la rétablir, la restaurer".
Qui suis-je pour faire des reproches à l’autre ? Cela semble aller à contre-courant de l’humilité tant vantée dans les Écritures. Ce passage d’évangile étonne d’autant plus qu’au chapitre 7, Jésus reprochait à celui qui a le jugement ou la critique facile de ne voir que "la paille" dans l’œil du voisin et non "la poutre" dans le sien.
Ce texte évoque ce que les chrétiens nomment la "correction fraternelle". "Il est question de reprendre le frère au sens où on saisirait quelqu’un qui est en train de se noyer", commente James Woody. L’objectif est de susciter chez l’autre "une prise de conscience pour qu’il puisse réagir".
Finalement, ce dont il est question dans l’évangile de ce dimanche c’est du "sens de la justice", pour le pasteur. Car dans la Bible, la justice "n’est pas d’abord là pour condamner" mais "pour rétablir la vérité". Ainsi, si l'on prend l'exemple des révélations au sein de l’Église, sur les abus et agressions sexuelles, comme le suggère James Woody, c’est pour "sortir tout le monde du déni" et "faire en sorte de rétablir des relations justes".
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