Corse
LE MOT DE LA SEMAINE – Aucun doute, une période particulière commence, marquée par la fête de Noël, célébrant la Nativité de Jésus-Christ, puis par le passage à la nouvelle année. Cette période est parfois appelée la "trêve des confiseurs." Jean Pruvost décrypte le mot "fête" et nous explique l’origine de l’expression "trêve des confiseurs", située entre Noël et le Jour de l’An.
La "trêve des confiseurs" s’ouvre avec Noël, cette fête religieuse merveilleuse et si émouvante, qui célèbre la naissance du Christ, appelée en latin natalis dies, signifiant "jour de naissance". Notons au passage que le mot natalis, utilisé seul sans dies pour désigner la naissance du Christ, s’est peu à peu transformé en naalis, le t disparaissant entre les deux a. Ces deux voyelles, difficiles à prononcer ensemble, ont conduit rapidement à l’usage du terme nael en français. Ce mot, attesté au début du XIIe siècle, a continué d’évoluer phonétiquement pour devenir noël à la fin de ce même siècle.
Mais pourquoi, entre le 24 décembre et le 1er janvier, parle-t-on de la "trêve des confiseurs" ?
D’abord, rappelons qu’il existait déjà l’expression "trêve de Dieu". Le mot trêve remonte au XIIe siècle, dérivé du francique treuwa, signifiant "traité". Vers 1245, sous le règne de Saint Louis, la "trêve de Dieu" désignait la cessation des combats imposée par l’Église pendant l’Avent (a v e n t). Inspirée de cet événement historique, l’expression "trêve des confiseurs" a vu le jour.
Elle est apparue en 1875 lors des débats politiques houleux à la Chambre entre monarchistes, bonapartistes et républicains. D’un commun accord, ces derniers décidèrent de suspendre leurs querelles jusqu’après Noël. Cela permit de laisser place à la sérénité de la fête religieuse, à la vie de famille et aux enfants qui, comme les adultes, savouraient les friandises de la période. Il est amusant de noter que, bien que la "trêve des confiseurs" évoque une pause dans les hostilités, ce n’est certainement pas une période de repos pour les confiseurs eux-mêmes, dont les créations gourmandes riment avec bonheur gastronomique, bien sûr !
Le mot "fête", avec son bel accent circonflexe, vient du latin festa, qui signifie également fête, et est apparenté à feria. Ce dernier a donné naissance à plusieurs termes, notamment en espagnol, où il désigne les ferias, ces festivités annuelles qui incluent souvent des courses de taureaux. En français, feria n’est apparu qu’en 1926, pour évoquer ces fêtes populaires espagnoles, puis celles de certaines régions du sud de la France. Mais à Noël, exit les taureaux : place aux rennes et surtout à la crèche, symbole d’amour familial et d’harmonie.
Le mot "fête", écrit feste au Moyen Âge, est attesté dès 1080. Il avait alors un sens large, comme l’illustre Maurice De La Porte en 1571 dans son dictionnaire Épithètes. Il y décrit les fêtes comme pouvant être "solennelles, dévotieuses, chômables, nocières, saintes, célébrées, paroissiales, sacrées, dominicales, joyeuses." Parmi celles-ci, on évoquait aussi les "fêtes carillonnées", marquées par les cloches annonçant les festivités dès la veille.
En guise de conclusion, faisons résonner, au moins figurément, les carillons tout juste rénovés de Notre-Dame pour célébrer cette période. Et c’est au son de ces carillons que je vous souhaite, chers amis de notre radio, de merveilleuses fêtes de Noël.
Jean Pruvost, lexicologue passionné et passionnant vous entraîne chaque lundi matin dans l'histoire mouvementée d'un simple mot, le mot de la semaine !
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