Le télétravail, une révolution dans le monde professionnel

Le télétravail a permis une révolution du travail tant dans la manière de travailler que dans la relation aux autres. À l'occasion de la fête du travail en ce 1er mai, Je Pense donc J'agis s'interroge sur ce nouveau mode de travail. 

Ce mode de fonctionnement est de plus en plus développé depuis le confinement pendant la crise sanitaire de 2020. Les Français ne sont donc pas entrés sur le marché de l’emploi en connaissant le télétravail. Depuis cette date, un écart s’est creusé avec les générations. "Ceux qui ont connu les réunions en présentiel diffère des autres qui n’ont connu que les réunions en visio", explique Alexandre des Isnards, anthropologue et analyste du monde du travail, auteur de l’ouvrage La visio m’a tuer, chez Allary Edition.

Le télétravail, synonyme de perte de sens ? 

Le télétravail a bouleversé la manière de travailler notamment dans l’entreprise. D’après Alexandre des Isnards, les réunions par visioconférence sont devenues la norme avec souvent une perte de naturel, une mort de l’aparté qui conduit les salariés à avoir une attitude plus stricte. Danièle Linhart, sociologue et directrice émérite de recherche au CNRS sur les sujets d'évolution du travail et de l'emploi, parle même de la perte du sens du debrief.

Le télétravail amène à une transformation très concrète de la manière de travailler. Clément, un auditeur fidèle de RCF, oppose points positifs et négatifs. "On peut être plus efficace chez soi, avec moins de pause, plus de tranquillité. Toutes ces différences nous font gagner en productivité. Mais les échanges sont moins naturels". Globalement, le télétravail est une très bonne chose lorsqu’elle est occasionnelle.

Le relationnel, l'autre chamboulement du télétravail

"Mais ce mode de travail est installé", affirme Alexandre des Isnards. Un saut en arrière serait donc impossible pour les salariés. Tous ne sont pas impactés par le télétravail, par exemple les métiers manuels. "Au moment du Covid, ils étaient vraiment insérés dans la société parce que leur métier était légitimé par le rôle indispensable qu’ils jouaient", réplique Danièle Linhart, en parlant des infirmiers et des éboueurs.

Enfin, ce qui est aussi bouleversé par le travail à distance, c’est évidemment le relationnel. "Le télétravail accentue une dimension de l'individualisation de chacun à son travail. Il y a un sentiment de perte de sens du réel", rappelle la sociologue.

Le télétravail crée une ambivalence

"Il y a un sentiment d’impuissance plus marqué chez soi car tout seul, on ne peut rien changer. Alors qu’avec les collègues, on peut tout expliquer et discuter", continue-t-elle. Ce ressenti est particulièrement fort chez les juniors puisque par le télétravail ils n’ont pas assez accès à la culture de l’entreprise. "Ils étaient confrontés à une épreuve solitaire et devaient en faire parfois beaucoup trop pour prouver leurs compétences", explique Danièle Linhart. 

Concrètement, un phénomène se développe aussi dans les entreprises, c’est le flex office. Ne plus avoir de bureau à soi apporte un ressenti différent aussi avec une appartenance qui s’étiole. Danièle Linhart l’explique comme une perte d’un véritable espace de travail, "c’est au petit bonheur à la chance".

Cette mise à distance du lieu de travail a été vue comme un soulagement de la vie en entreprise parce que, historiquement, le rapport au travail était plutôt douloureux. "Il y avait des risques psychosociaux à cause de la concurrence dans l’entreprise, donc le télétravail a été vu comme un bienfait parce que les salariés se sentent mieux chez eux", explique Danièle Linhart. Il y a donc une ambivalence dans le télétravail qui apporte tant un avantage qu’un inconvénient. "Un manque de relation sociale entraîne une difficulté car le travail est fondamentalement socialisateur dans la façon dont on doit coopérer avec ses collègues", rappelle Danièle Linhart. Conserver les relations sociales est primordial comme trouver un équilibre au travail.