LE POINT DE VUE DE NATHALIE LEENHARDT - L'actualité politique est toujours aussi chargée, après la déferlante de l'extrême droite aux dernières élections européennes. Pour Nathalie Leenhardt, il faut désormais comprendre et s'engager.
Je me suis sentie quelque peu tétanisée par l'inquiétude, voire la peur suite aux résultats des élections européennes puis à la décision de dissolution de l'assemblée et ses conséquences potentielles. Soit dit en passant, je ne sais pas qui a inventé cette expression de “dissoudre” une institution, mais c’est juste affreux et violent.
En lisant La Croix, j’ai appris que nous venons de vivre un épisode climatique de décrochage polaire. Je n’en avais jamais entendu parler. Alors que l’été se profilait, nous avons subi à nouveau un gros coup de froid, du fait du Gulf stream. Et voilà, c'est bien ce qu'intérieurement, j'ai ressenti, comme de très nombreux citoyennes et citoyens. Cette crainte que notre pays continue sa dégringolade vers toujours plus d’extrême-droite. Pourtant, je refuse d’en rester là, de me laisser envahir par le découragement.
D’ailleurs les signes n’ont pas manqué autour de moi, de volonté de se mobiliser pour porter d’autres valeurs, pour tenir d’autres discours. L’urgence aussi de faire des procurations pour les prochains scrutins, d’encourager ceux qui ont cru bon de se dispenser de voter, de le faire, l’envie de comprendre et de débattre, voire de s’engager plus avant en politique. C’est ce qu’il y a de bon quand un orage se prépare ou qu’on se retrouve au milieu de la tempête, c’est qu’on recommence à se poser les vraies questions, celles de nos priorités. La Bible est remplie de ses moments de bascule, de turbulences, de fureur d’où sortent des flammes, des paroles d’espérance, des vents légers qui poussent en avant.
C’est ce qu’il y a de bon quand un orage se prépare ou qu’on se retrouve au milieu de la tempête, c’est qu’on recommence à se poser les vraies questions
Oui, essayer de comprendre comment on en est arrivé là, comment les idéaux qui ont porté l’Union européenne depuis sa création butent aujourd’hui sur le repli sur soi, la peur, le rejet de la différence, le retour des frontières et des nationalismes.
À cela sans doute beaucoup de facteurs, parmi lesquels, je le crois profondément, le sentiment de mépris ressenti par beaucoup. Comme tous celles et ceux qui s’étaient réunis sur les ronds-points pour se réchauffer et faire partie de la communauté nationale et ont été renvoyés chez eux, parce que la violence de certains a fait taire les autres.
J’ai déjà évoqué ici le livre d’Olivier Abel, philosophe et protestant, sur l’humiliation. Il y a aussi la thèse de Cynthia Fleury sur l’amertume. Cette colère sourde qui gangrène les existences, ces sentiments sombres et alimentés par les réseaux sociaux et CNews, quand seront-ils entendus, vraiment ? Et puis, il y a le racisme. Le mot es-tu, dénié parce que c’est si laid, le racisme, ça ne fait honneur à notre pays. Mais c’est là, fondé sur des préjugés si enracinés qu’il faut toujours et encore les démonter. Et témoigner d’autres relations possibles. À cet égard, je trouve que les églises peuvent et doivent être ces lieux où se vivent d’autres types de fraternité. Je regrette d’ailleurs qu’elles soient restées si discrètes ces jours-ci, si timides. Être chrétien, c’est aussi être citoyen…
Ne pas brusquer ces fidèles qui votent FN ne justifie pas ce silence bruyant.
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