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POINT DE VUE DE STEPHANE VERNAY - Emmanuel Macron doit prononcer un nouveau discours sur l’Europe, jeudi 25 avril, dans la matinée, à la Sorbonne, à Paris. Un nouveau parce que le président de la République avait déjà prononcé un discours sur l’Europe, au même endroit il y a sept ans.
Nous étions en 2017, Emmanuel Macron venait tout juste d’être élu Président, et il avait surpris son monde en décrivant une Europe en bout de course, “trop faible, trop lente, trop inefficace”, menacée par la montée du populisme et un possible retour de la guerre. En réaction, Emmanuel Macron proposait “la refondation d’une Europe souveraine, unie et démocratique”, dont il avait gaillardement déroulé le programme. A près d'un mois des élections européennes, le président de la République devrait définir les priorités de la France pour l’agenda stratégique de l’UE.
Celui-ci reposait sur “six clés de souveraineté”, au premier rang desquelles le président Macron plaçait la constitution d’une véritable Europe de la défense, la défense des frontières extérieures de l’Union face aux migrations, la transition écologique, la régulation du numérique, la réindustrialisation de notre vieux continent, la refonte de la politique agricole commune, la maitrise de la production et de la consommation d’énergie…
Le propos avait bousculé les chancelleries et bien fait rire les adversaires de ce jeune chef d’Etat qui promettait tout un tas de chose qui ne pourraient assurément jamais l’être. Une pandémie et une invasion de l’Ukraine par la Russie plus tard, abracadabra ! Ce qui passait pour de naïves élucubrations utopistes sont devenues réalité et la notion de “souveraineté européenne” dont personne ne voulait entendre parler est désormais vécue comme une évidence. L’Union européenne a légiféré pour brider les géants américains et chinois du net, elle a revu ses ambitions à la hausse en matière climatique et s’est dotée d’un “green deal”, elle vient d’adopter un nouveau pacte migratoire, veut revoir sa PAC, protéger son marché et ses citoyens des “vents mauvais de la mondialisation” et ne plus dépendre du gaz ou du pétrole russe.
Bref ! Qui avait raison avant tout le monde ? Qui a remis la France seule à la tête de la construction européenne ? Emmanuel Macron.
Les candidats aux élections européennes protestent. Ils dénoncent une basse manœuvre politicienne. Emmanuel Macron va nous faire le coup du discours bilan pour inciter les Françaises et les Français à voter massivement pour la liste "Besoin d’Europe" conduite par Valérie Hayer le 9 juin prochain. Si c'est ça, c’est bas.
Non, non, non répond l’Elysée, qui rappelle qu’Emmanuel Macron s’était exprimé sur l’Europe en 2017 pour donner sa vision de ce que devrait être l’agenda stratégique de l’Union européenne, adopté tous les cinq ans, juste après les élections européennes et le renouvellement des institutions. A l'époque, le chef de l’Etat avait maintes fois fait référence à 2024, et il est parfaitement logique qu’il livre sa nouvelle vision du futur agenda stratégique de l’UE, vu que “le contexte a changé”. Et non, non, non, tout ça n’a rien à voir avec un meeting électoral déguisé puisque toute la classe politique, opposants de tous bords compris, est invité à assister au discours présidentiel de jeudi.
Pas trop, non. Le contexte a changé, ça c’est vrai. Emmanuel Macron s’était fixé 2024 pour horizon dans son discours de 2017, ça c’est vrai aussi. Mais le Conseil européen qui décidera du nouvel agenda stratégique de l’Union européenne ne se tiendra que les 27 et 28 juin prochains. Pour prévenir toute critique, le Président aurait pu attendre que les élections européennes soient passées avant de s’exprimer.
Sorbonne 1 avait été déclamé plus d’un an avant les élections européennes, qui ont eu lieu en 2019. Prononcer Sorbonne 2 un mois avant le scrutin, c’est moyen. Juste après le 9 juin, c’eut été mieux. D’autant plus qu’Emmanuel Macron aura droit à une autre séquence d’anthologie, rien qu’à lui, trois jours avant le vote de cette année. Le 6 juin 2024, il accueillera le monde en majesté, en Normandie, pour la commémoration du 80e anniversaire du Débarquement. On ne pourra pas lui reprocher d’avoir bricolé cette date-là à l’avantage de son camp, mais elle va lui offrir une exposition maximale à un moment crucial : la toute fin de la campagne électorale. Pour l’équité entre les candidats, on repassera…
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