Spiritualité jugée désuète et doloriste par les uns, vue par d'autres comme le symbole d'une sensibilité traditionnelle et conservatrice au sein de l'Église catholique, la spiritualité du Sacré-Cœur fait aussi l'objet d'une récupération politique. Pourtant, le message qu'elle porte n'est autre que l'amour inconditionnel du Christ pour chacun. Et c'est à Paray-le-Monial que la communauté de l'Emmanuel s'emploie à faire connaître cette spiritualité. Le jubilé 2023-2025 du sanctuaire est l'occasion de redécouvrir cette spiritualité.
Paray-le-Monial, un sanctuaire situé en pleine campagne, entre Moulins et Mâcon, et connu dans le monde entier. Animé par la communauté de l’Emmanuel, il s’apprête cette année à vivre un jubilé, de décembre 2023 à juin 2025. Un an et demi de célébrations pour fêter les 350 ans des apparitions du cœur de Jésus à sainte Marguerite-Marie. L’occasion de redécouvrir la spiritualité du Sacré-Cœur, qui a longtemps été considérée comme doloriste et pénitentielle.
Le dynamisme de Paray-le-Monial doit beaucoup à la communauté de l’Emmanuel et… au pape Jean-Paul II. Il a donné au lieu un nouvel élan spirituel et missionnaire lors de sa visite en 1986. Cette même année, le sanctuaire a été confié à la communauté de l'Emmanuel. Communauté qui avait, dès 1975, séduit Mgr Maurice Gaidon, alors recteur des pèlerinages de Paray-le-Monial et futur évêque auxiliaire d'Autun. "Une véritable rencontre a lieu entre la grâce de la communauté et la spiritualité du Sacré-Cœur, raconte le Père Étienne Kern, recteur du sanctuaire, la toute nouvelle communauté de l’Emmanuel [fondée en 1972, ndlr] a trouvé à Paray un ancrage dans la tradition de l’Église. On considère que la première session a lieu cette année-là."
Aujourd'hui, l'Emmanuel compte près de 12.000 membres dans soixante pays. Ses sessions d’été de "Paray" sont devenues un incontournable aussi bien pour les jeunes, les couples ou les familles. 200.000 personnes se rendent chaque année dans la petite ville de Saône-et-Loire pour y participer, et pas uniquement des membres de la communauté de l’Emmanuel.
Associée à une pratique religieuse d’un autre âge, la spiritualité du Sacré-Cœur est devenue le symbole d’une sensibilité traditionnelle et conservatrice dans l'Église catholique. Jusqu’à faire parfois l’objet de récupération politique. Le jubilé 2023-2025 est par conséquent l’occasion de revenir aux sources du message de Paray-le-Monial. Et de le faire connaître à un plus large public. L’occasion également de redécouvrir cette spiritualité du Sacré-Cœur. "Rendre amour pour amour" est le thème choisit pour ce jubilé qui s’achèvera le 27 juin 2025, date de la solennité du Sacré-Cœur.
C'est à Marguerite Alacoque, en religion Marguerite-Marie (canonisée en 1920) que l'on doit la spiritualité du Sacré-Cœur. En 1673, cette jeune religieuse de 26 ans eu une apparition du Christ, alors qu’elle priait devant le Saint-Sacrement. Elle a vu le cœur de Jésus entouré d’épines sur un trône de flammes. Jésus lui aurait dit : "Si tu savais combien j’ai soif d’être aimé des hommes !" Sainte Marguerite-Marie a fait l’expérience d’une intimité avec le cœur blessé de Jésus, cœur qui souffre de ne pas être aimé. Plus tard, en 1674, le Christ lui serait apparu "éclatant de gloire, ses plaies brillant comme cinq soleils, la source des flammes étant la plaie du cœur semblable à une fournaise". Le cœur de Jésus était décrit comme souffrant de "ne [recevoir] des hommes qu’ingratitude et méconnaissance".
"Voilà ce cœur qui a tant aimé les hommes", a dit Jésus à la religieuse en 1975. Une phrase qui résume aujourd'hui l’ensemble du message de Paray-le-Monial. Lors de la dernière apparition à la jeune religieuse, le Christ a aussi dénoncé des "sacrilèges dans le sacrement d’amour [dans l’eucharistie]". "Et ce qui m’est encore plus sensible, a-t-il déclaré, est que ce sont des cœurs qui me sont consacrés qui en usent ainsi." Une phrase qui résonne d’une façon particulière dans le contexte du scandale des abus au sein de l’Église.
Paray-le-Monial n’est pas le lieu d’une dévotion désuète comme certains peuvent le penser
Le message porté par sainte Marguerite-Marie révèle une image du Christ qui se plaint de ne pas être aimé. Progressivement, il a revêtu au cours des siècles une connotation pénitentielle et doloriste. "Pourtant, regrette le Père Étienne Kern, cette spiritualité s’enracine avant tout dans l’amour. Accentuer la représentation victimale fausse le message et ouvre à des dérives."
Le jubilé est l’occasion de redire la beauté du message de Paray-le-Monial. "Paray-le-Monial n’est pas le lieu d’une dévotion désuète comme certains peuvent le penser, insiste le recteur, ici le Christ invite chacun à venir se reposer sur son cœur et à faire l’expérience d’un amour inconditionnel." Un message de consolation et d’amour qui aurait de quoi soulager l’Église et le monde dans les crises qu’ils traversent actuellement.
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