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Comprendre l'Europe [4/5] : c'est quoi le Pacte vert européen ?

RCF, le 28 mai 2024 - Modifié le 28 mai 2024
Pour bien comprendrePour bien comprendre... Le Pacte vert

C’est l’un des projets phares de la dernière mandature européenne : le Pacte vert. Proposé par la Commission européenne en décembre 2019 après la poussée des écologistes lors des dernières élections européennes, c’est un ensemble de textes destinés à accélérer et à accompagner la transition énergétique dans l’UE. Son parcours compliqué et les revirements de ce Green Deal, illustre les mutations politiques de l’UE ces cinq dernières années. 

Le 1er février 2023, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a donné une conférence de presse sur le plan industriel du Green Deal / Photo : Union Europeenne by Hans LucasLe 1er février 2023, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a donné une conférence de presse sur le plan industriel du Green Deal / Photo : Union Europeenne by Hans Lucas

"Le Pacte vert est notre nouvelle stratégie de croissance", lançait en 2019 Ursula von der Leyen, fraîchement nommée présidente de la Commission. Cette dernière va ensuite initier des dizaines de législations pour atteindre les nouveaux objectifs climatiques validés par les Vingt-Sept.

Comment est né le Pacte vert ? 

Le Green Deal est un ensemble de textes fondateurs du mandat de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Son ambition est de dessiner une transition écologique et économique qui doit permettre à l'Union européenne d'atteindre son objectif de neutralité carbone en 2050. 

“Il y a différents piliers : environnemental, on va tenter de réduire les émissions des gaz à effet de serre, social puisque certaines régions sont dépendantes des activités minières par exemple, on va les aider ou encore économique avec des instruments financiers qui vont tenter de réorienter l'argent dans le but d'atteindre cette neutralité climatique” liste Vincent Fromentin, maître de conférence au Centre européen universitaire de Nancy. 

Le Pacte vert est une manière pour l'Europe de se démarquer des Etats-Unis ou de la Chine

L’objectif voulu par la Commission est de faire de l’UE un leader, un précurseur, en matière de transition énergétique. Chaque mesure a fait l’objet de négociations au sein du Parlement européen et avec les États membres. “Cela a été soutenu par la plupart des pays européens, puisque l'intérêt est d'être capable de capter ce qu'on appelle l'industrie verte, qui peut être l'industrie liée au renouvelable, l'industrie liée aux voitures électriques”, développe Vincent Fromentin. L'idée est d'être des précurseurs dans ce domaine, d'attirer les entreprises et de représenter un modèle à l'échelle mondiale. “C'est une manière pour l'Europe de se démarquer des Etats-Unis ou de la Chine”, complète le chercheur. 

Quelles sont les mesures du Pacte vert ? 

Le Pacte vert repose sur différents piliers. Il s’agit d’un agglomérat de textes hétérogènes visant tous à atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050. Nombre de textes du Pacte vert ont déjà été adoptés comme la fin des voitures thermiques neuves en 2035, l'une des mesures les plus emblématiques. Après d'interminables négociations, les Etats membres de l'Union européenne se sont accordés en 2022 sur une transition historique : à partir du 1er janvier 2035, seuls les voitures et utilitaires n'émettant pas de CO2 à l'échappement pourront être vendus neufs.

Un autre volet concerne la déforestation importée. Formellement approuvé mi-2023 après l'accord conclu fin 2022 entre États de l'UE et eurodéputés, le texte interdit l'importation dans l'UE d'une série de produits, si leur production est issue de terres déboisées après décembre 2020. Sont ciblés: soja, viande bovine, huile de palme, bois, caoutchouc, cacao et café et également des produits associés comme le cuir, l’ameublement, le charbon de bois ou encore le papier... L'interdiction s'imposera à partir de fin décembre 2024.

D’autres mesures ont été adoptées comme la taxe carbone aux frontières, l’éco-conception ou la taxonomie. “La taxonomie verte de l’UE est un système de classification des activités économiques permettant d’identifier celles qui sont durables sur le plan environnemental, c’est-à-dire qui n’aggravent pas le changement climatique”, résume le site de la Commission européenne. “Une réglementation qui explique ce qui est vert et ce qui n'est pas vert” traduit Vincent Fromentin. Il s'agit de demander simplement aux entreprises et aux investisseurs d'être transparents. “Où est-ce que vous mettez votre argent ? Est ce que vous le mettez dans les entreprises qui respectent l'environnement, qui respectent l'écologie, qui respectent une bonne gouvernance d'entreprise, qui respectent un bon modèle social, ou bien est-ce que vous investissez ailleurs ?”, questionne le chercheur. 

Que reste-t-il du Pacte vert ? 

Ce projet qui se veut fédérateur visant à décarboner l'UE et à préserver ses écosystèmes a marqué le mandat d'Ursula von der Leyen à la tête de la Commission, mais il est désormais sous le feu de critiques ouvertes à droite, à l'extrême droite et dans certains secteurs comme l’agriculture.

La flamme écologique de 2019 a été entamée. “Il y a eu la pandémie du Covid, la guerre en Ukraine, la crise énergétique et l'inflation, puis la colère des agriculteurs. Par conséquent, ce pacte vert est un peu passé au second plan”, rappelle Vincent Fromentin. “On le voit particulièrement dans la campagne électorale européenne actuelle où finalement on parle assez peu des enjeux écologiques, à l'inverse de la campagne de 2019”, ajoute-t-il. 

Tout s’est notamment grippé l'an dernier avec des législations pour réduire les pesticides ou restaurer les écosystèmes, attaquées au nom de la sécurité alimentaire. De même, sous la pression, Ursula von der Leyen a déjà ouvert la porte à l'autorisation après 2035 de "carburants de synthèse" automobiles réclamés par Berlin, une brèche dans l’interdiction des véhicules thermiques. En plus de ce détricotage de mesures déjà votées, Bruxelles a renoncé à présenter une révision des règles encadrant les substances chimiques, et, face à la grogne agricole, n'en finit plus de proposer des flexibilités aux règles écologiques de la PAC.

“Il va peut-être falloir des ajustements au regard du contexte, peut être des collaborations avec l'industrie, peut être en soutenant les entreprises, peut être en prenant en compte les changements géopolitiques”, analyse Vincent Fromentin. “On doit trouver une solution qui nous permet d'avoir un équilibre et d'être capable d'ajuster l'application de ces normes avec un planning ou avec un calendrier qui serait un petit peu simplifié”

Pour l’instant, plusieurs États de l’UE appellent à “une pause” réglementaire dans ce Green Deal. Le curseur pourrait se déplacer un peu plus à droite au sein du Parlement européen lors des prochaines élections. Ursula von der Leyen, issue du PPE et candidate à sa succession, avait dès l'automne appelé à une nouvelle phase du Pacte vert axée sur la compétitivité.

La prochaine législature pourrait viser un plan de réindustrialisation qui complète le Green Deal, avec le potentiel de ramener investissements, usines et emplois et "mener la course dans l'industrie verte", estime Neil Makaroff, du think-tank Strategic Perspectives.

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