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Samuel Grzybowski, les terroirs et la gauche

Un article rédigé par Ghislain Foignier - RCF, le 28 octobre 2024 - Modifié le 28 octobre 2024
Le Grand TémoinSamuel Grzybowski, les terroirs et la gauche, un amour méconnu ?

Il y a plus de vingt ans, un livre intitulé "Les territoires perdus de la République" avait montré la réalité de quartiers difficiles. Peut-on parler aujourd'hui des territoires perdus de la gauche ? L'implantation électorale du RN dans les campagnes françaises a incité Samuel Gryzbowski à montrer que la gauche ne pouvait pas abandonner le terrain de l'identité française, d'où le titre de son ouvrage, "Les terroirs et la gauche, un amour méconnu".

Samuel Gryzbowski- Image- RCF- Pierre Hugues DuboisSamuel Gryzbowski- Image- RCF- Pierre Hugues Dubois

Depuis la Révolution française, les particularismes locaux ont progressivement été effacés, car les révolutionnaires ont considéré que ces particularismes menaçaient notre capacité à vivre ensemble à l'échelle de la nation selon Samuel Gryzbowski. L'auteur "des terroirs et la gauche, un amour méconnu" pense au contraire que c'est cette dialectique, qui rend possible un vivre ensemble fécond. En tant que militant de gauche, Samuel Gryzbowski prône un retour à une identité plus régionale, identité non transmise par le droit du sang mais liée au droit du sol. 

La patrie est une notion qui a été oubliée par la gauche

Face au déracinement de la gauche avec le terroir, Samuel Gryzbowski déplore le fait que ce thème du terroir ne soit plus aujourd'hui, revendiqué par la gauche. "C'est une longue histoire d'incompréhension parce qu'elle a été inventée par la gauche", dit-il en parlant de la patrie. Ce terme de "patrie" a été créé durant la Révolution française par le parti des patriotes de gauche. Samuel Gryzbowski explique ce changement de paradigme issu de la Révolution ."On passe de Dieu, cette verticalité descendante qui fait de nous des sujets, à une légitimité ascendante  où il y a la terre, la mère patrie, qui produit la nation et la citoyenneté." L'idée principale est le changement de principe.

On passe de Dieu, le roi et la suggestion, cette verticalité descendante qui fait de nous des sujets, à une légitimité plutôt ascendante où il y a la terre, la mère patrie, qui produit la nation et la citoyenneté.

Avant la Révolution, le sujet est l'Homme qui vient de Dieu. Désormais, l'Homme tire sa citoyenneté de la mère patrie et du sol. Pour Samuel Gryzbowski, une grande partie de la gauche actuelle ne se revendique plus de la mère patrie considérant un regard plus englobant de l'identité comme faisant parti de : " l'identité humaine ". Pour lui, ce nouveau regard est dû à une incompréhension, "cet abandon, je pense, est fait à cause d'une incompréhension de l'identité, plutôt que d'investir le thème de l'identité et de l'habiter avec un regard progressiste et révolutionnaire." 

Une longue histoire de trahison de la gauche

Pour Samuel Gryzbowski, cette trahison de la gauche remonte à 1791, et aux cahiers de doléances. "Je vous parle de 1791, parce qu'ils n'ont pas accédé à la revendication principale des cahiers de doléances de Bretagne et des Pays de Loire, qui était le partage des terres agricoles." Pour Samuel Gryzbowski c'est là, la première trahison de la gauche :"Les élites révolutionnaires, autour de Robespierre, ont choisi de vendre  les terres agricoles qui avaient été confisquées par les révolutionnaires aux nobles, et de les vendre aux enchères. Ce qui a donc profité à la bourgeoisie de province et à la bourgeoisie des villes, qui a donc acheté ces terres pour créer une nouvelle rente".

Du point de vue paysan, du point de vue rural, on est passé d'une rente noble à une rente bourgeoise. Mais donc, ça n'a pas changé leur expérience et surtout leurs conditions d'oppression.

Mais pour Samuel Grzobowski, ce phénomène n'a pas changé la situation paysanne, qui était toujours aussi mauvaise. "Du point de vue paysan, du point de vue rural, on est passé d'une rente noble à une rente bourgeoise. Mais donc, ça n'a pas changé leur expérience et surtout leurs conditions d'oppression." Samuel Grzobowski souhaite revaloriser le travail des paysans et les remettre au cœur de l'organisation sociale. Pour lui, la gauche ne met plus assez en avant ces métiers essentiels, nécessaires à vie de tous. "prenons nos responsabilités et mobilisons cet imaginaire que nous avons rejeté à tort, qui créer justement ce sentiment d'exister". Samuel Gryzbowski appelle à un retour à l'essentiel, à la terre. Pour lui, c'est autour de ces métiers que s'organise la vie des individus. 

Il faut construire les territoires autour des "biorégions"

Pour Samuel Gryzbowski, le territoire tel qu'il est aujourd'hui construit ne respecte pas les enjeux de la nature. Pour lui, la découpe du territoire doit s'adapter au besoin naturel. "Il y a une proposition qui existe, qui émerge et qui est portée notamment par les écologistes aujourd'hui de construire notre territoire autour de biorégions et celles-ci sont respectueuses notamment de l'organisation de l'eau". Samuel Gryzbowski souhaite adapter le découpage territorial en fonction des différents besoins locaux. Il évoque aussi la singularité de chaque producteur local : "ces terroirs là renvoient  justement à cette singularité qui rend les habitantes et les habitants dignes".

Les régions administratives aujourd'hui ne tiennent pas compte de ces frontières de l'eau. Elles sont souvent construites, départements, cantons, arrondissements, à cheval sur ces frontières et donc du coup ne respectent pas en fait la terre, ne tiennent pas  compte de ses propriétés. 

L'identité singulière de chaque région doit être respectée ainsi que le savoir-faire de chacun. Pour Samuel Grzbowski, le lien à une identité locale est indispensable afin de "personnaliser" son travail. "Si vous les renvoyez à une métropolisation de Lyon, vous les rendez subordonnés, inférieurs à leurs conditions." 

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