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Écologie intégrale : combattre "notre comportement de prédateur"

RCF, le 9 avril 2024 - Modifié le 2 septembre 2024
TémoinOlivier Bouillez : « A l’origine de la crises socio-environnementale, nos comportements prédateurs »

Que ce soit vis-à-vis de la nature ou des êtres humains, "nous avons un comportement de prédateur". Après une longue carrière dans l'industrie, Olivier Bouilliez en a pris conscience en lisant Laudato Si', l'encyclique du pape François sur l'écologie. Aujourd'hui référent Écologie intégrale pour le diocèse de Grenoble-Vienne, il formule le vœu que chacun puisse avoir conscience des conséquences de ses actes...

"Nous avons un comportement de prédateur, soit des ressources de la terre soit des ressources qui sont les hommes qui sont à côté de nous" ©Unsplash"Nous avons un comportement de prédateur, soit des ressources de la terre soit des ressources qui sont les hommes qui sont à côté de nous" ©Unsplash

 

En 2024 en France, les deux tiers des diocèses catholiques ont désormais un référent à l'Écologie intégrale ou une équipe en charge des questions écologiques. Le diocèse de Grenoble-Vienne est particulièrement dynamique. Il bénéficie d’une forte mobilisation de la part des clercs et des fidèles. Parmi eux, Olivier Bouilliez. Depuis quatre ans, ce laïc est référent à l’Écologie intégrale pour son diocèse. C’est grâce à l’encyclique du pape François, Laudato Si’, qu’il a réussi à lier sa vie de croyant et ses préoccupations pour l’écologie. 

 

Nous avons un comportement de prédateur, soit des ressources de la terre soit des ressources qui sont les hommes qui sont à côté de nous. Pour notre intérêt égoïste finalement ! 

 

Sensible à la question des ressources

Dans le parcours d’Olivier Bouilliez, la conscience écologique et la foi étaient là depuis longtemps mais elles n’ont pas toujours été liées l’une à l’autre. Chrétien engagé, il a longtemps aidé, avec son épouse, à l’accompagnement des couples au sein de son diocèse. En parallèle, au cours de sa longue carrière d’ingénieur dans l’industrie, il a pu prendre conscience de la rareté des ressources. Ce que, petit-fils d’agriculteurs, il a appris dès l’enfance.

Mais c’est l’encyclique Laudato Si’ du pape François, en 2015, qui lui a permis de franchir une étape décisive. Et de placer ses préoccupations environnementales au cœur de sa vie de foi, et vice-versa. "C’est Laudato Si’ probablement qui a commencé à le faire ce lien, témoigne-t-il. Je n’avais jamais formalisé comme ça le fait qu’économiser la terre, économiser la ressource, c’était en lien complètement direct avec le soin de la création que le Père nous a confiée."

Ce qui l’a le plus marqué dans l’encyclique du pape ? Que "nous avons un comportement de prédateur, soit des ressources de la terre, soit des ressources qui sont les Hommes qui sont à côté de nous. Pour notre intérêt égoïste finalement !" Et que c’est là "la cause fondamentale de l’ensemble des crises". Olivier Bouilliez le dit humblement, tout cela, "il a fallu du temps pour l’intégrer et arriver à la synthétiser".

 

Un engagement à 360 degrés

Ça lui a paru "naturel" de répondre à l’appel de son diocèse en 2018 et de s’engager pour l’écologie intégrale. Pourtant, un engagement comme celui-ci n’est pas rien. C’est mener de front réflexion et action. Un investissement à 360 degrés qui va de la relecture de la Bible, sur laquelle Olivier Bouilliez a "beaucoup travaillé", à la mise en place d’actions concrètes.

Que signifie prendre soin de la création comme Dieu le demande dans la Genèse ? Que signifie aimer son prochain quand on prend conscience de la façon dont on consomme ? "Est-ce que c’est aimer mes petits-enfants et les enfants de mes petits-enfants – j’espère qu’ils pourront en avoir – que de leur laisser un cadre de vie complètement dégradé ?" Depuis qu’il a pu faire ce lien entre texte biblique et engagement écologique, Olivier Bouilliez "ne fait que creuser" ces questions. Aujourd’hui, il est "intimement convaincu" qu’on ne peut passer à côté de ces considérations.

En tant que référent à l’Écologie intégrale, Olivier Bouilliez cherche avec son équipe à "sensibiliser" les fidèles, notamment grâce au label Église verte. "Ça a démarré, mais doucement, tempère-t-il. On est aujourd’hui à une vingtaine de communautés engagées dans le label Église verte au bout de cinq ou six ans." Ce label liste tout que l’on peut faire en paroisse pour entrer dans une démarche écologique. L’intérêt pour Olivier Bouilliez c’est qu’il "permet à une paroisse de se poser les bonnes questions…"

 

Et si chacun agissait "en conscience"… ?

Certes, le label Église verte c’est des aspects pratiques comme baisser le chauffage, changer les ampoules classiques par des LED, trier les déchets… Mais surtout, "les premières questions, insiste Olivier Bouillez, c’est : Est-ce que dans notre liturgie, dans notre spiritualité, on regarde la création comme un don de Dieu ? Est-ce qu’on respecte la création ? Est-ce qu’on loue le Seigneur pour la création ?" 

S’il y a une chose que ce référent Écologie intégrale souhaite, c’est que chacun puisse agir "en conscience". Au moins ça. Savoir par exemple que prendre sa voiture a un impact sur le climat. Et ne pas éluder les conséquences de ses propres actions. Comme le dit Olivier Bouilliez : "Faire le lien avec notre mission de savoir s’occuper de nos frères et d’aimer nos frères." Ainsi, "quand je change mon téléphone portable et que je viens encore envoyer des enfants au Congo dans des mines illégales, ce n’est pas très cohérent tout ça !"

 

On le sait, les valeurs des écolos entre guillemets, étiquetés écolos politiques, et de l’Église ne sont pas forcément alignées, mais il y a quand même un tronc commun énorme !

 

L’Église et les écologistes, "un tronc commun énorme"

Parmi les différents courants de l’écologie politique, l’écologie intégrale est définie comme un concept chrétien, il inclut en particulier la relation à Dieu. Or, qui dit écologie intégrale, dit penser en dehors de la communauté des croyants. "L’Église n’est pas hors-sol, elle vit dans la communauté des Hommes", souligne Olivier Bouilliez. Aussi, lui et son équipe se sont-ils posé la question : "Notre communauté est-elle en lien avec la communauté des Hommes ?"

Concrètement, cela signifie pour les catholiques savoir dialoguer avec les associations écologiques locales. "On le sait, les valeurs des écolos entre guillemets, étiquetés écolos politiques, et de l’Église ne sont pas forcément alignées, mais il y a quand même un tronc commun énorme !" Le diocèse s’est donc rapproché par exemple de l’association La Fresque du climat. Elle propose un atelier où il faut placer des cartes les unes à côté des autres, pour former un schéma montrant l’enchaînement complexe des causes et des conséquences du réchauffement climatique.

Participer à un atelier de la Fresque du climat c’est voir de près la gravité de la crise. Où donc trouver l’espérance après ça ? Pour Olivier Bouilliez, la mise en action, c’est la version laïque de l’espérance. "Agis comme si tout dépendait de toi et prie comme si tout dépendait de Dieu, aime-t-il citer. Je crois qu’il y a ça dans mon action pour l’écologie, c’est qu’il faut le faire avec l’espoir que ça servira à quelque chose même si la cause peut paraître désespérée de temps en temps. Il faut aussi avoir l’espoir que Dieu agit encore aujourd’hui..."

 

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