Thème de campagne majeur des élections législatives, le pouvoir d’achat interroge notre rapport à l’argent. Depuis Rerum Novarum, la première encyclique sociale, paru au XIXe siècle, jusqu'à aujourd'hui, l'Église a toujours proposé une ligne de crête entre libéralisme et marxisme. Elle défend pour le bien commun le droit à la propriété privée, tout comme le principe de destination universelle des biens. Il y a dans l'Église comme une pudeur autour des questions d'argent. Mais pour le père Stalla-Bourdillon, ancien aumônier des parlementaires, dans la perspective des élections, c’est indispensable d’en parler, cela faisant partie du quotidien de chacun.
Les individus perçoivent que l'économie est en train d'échapper à ceux qui prétendent la diriger. En cause, le libéralisme économique qui "absorbe ou entraîne de façon incontrôlée et incontrôlable, dans une sorte de spirale". Le père Stalla-Bourdillon dénonce un système économique qui finit par accaparer la totalité des aspects de l'existence des hommes.
L'argent est devenu une finalité, non plus un moyen. Il n'est plus au service de l'Homme, pire, il l'abîme, regrette le père Stalla-Bourdillon. C'est la limite de la société libérale. L'argent prend le pouvoir parfois, et cela en fait une question éthique. La logique libérale s’inscrit dans "une extension tous azimuts du domaine d'un marché". En s’imposant dans tous les domaines de la vie,"ça blesse l'être humain dans sa dignité. Et la valeur de l'être humain ne peut plus être mesurée".
L’argent est utile, rappelle le théologien, mais lorsque les Hommes se mettent au service de l’argent, l'agent les dominent et l’économie devient incontrôlable.
On est comme absorbé ou entraîné de façon incontrôlée et incontrôlable, dans une sorte de spirale, où on finit par voir que l'argent lui-même, qui est ce par quoi nous devrions pouvoir réguler notre vie économique, est en train de nous échapper.
L'Église pose quelques repères pour éclairer les consciences sur le sujet de l'argent et de son rôle dans la société. Dans sa doctrine sociale, l'Église défend la notion de destination universelle des biens. Cela signifie que "l'ensemble des biens viennent au service du bien de la communauté" explique le père. Si la propriété privée est défendue dans le sens ou chacun se voit remettre la garde d’un bien, "Il ne devient pas un bien individuel". Dans cette logique, la doctrine sociale de l'Église dit encore "Le devoir de la part des propriétaires est de ne pas laisser improductifs les biens possédés, mais de les destiner à l'activité productive, notamment en les confiant à ceux qui ont le désir et les capacités de les faire fructifier".
Dieu a destiné la terre et tout ce qu'elle contient à l'usage de tous les hommes et de tous les peuples, de sorte que les biens de la création doivent équitablement affluer entre les mains de tous, selon la règle de la justice inséparable de la charité.
Le pouvoir des marchés produit des injustices et des déséquilibres très profonds. Le pape François blâme ce monde dominé par une dictature de la finance et un fétichisme de l'argent. "Si on ne contrôle pas avec une conscience le sens du partage, le sens et la valeur des réalités et des choses, elle nous est imposée de l'extérieur, par une logique qui échappe à l'homme et qui finit par le dévorer lui-même", avance le père Stalla-Bourdillon. Le contexte politique de l’après dissolution a mis en lumière les vulnérabilités de notre société “des fragilités économiques, culturelle et sociale”, décrient par le théologien et qui sont pour lui le signe qu’il faut tourner la page, pour "penser une nouvelle société". Point de vigilance, il appelle à ne pas céder à "l'illusion de penser que la France peut se refermer sur elle-même. La France est inscrite dans un paysage international, engagés par des lois, par des principes, par des engagements, et que ceux-là devront invariablement être tenus".
Pour revenir à la source de ce qui inspire la doctrine sociale de l’église, le père cite une parole de Jésus de l'Évangile selon Saint-Matthieu 6:24. "Nul ne peut servir deux maîtres, vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l'argent."
Nul ne peut servir deux maîtres : ou bien il haïra l’un et aimera l’autre, ou bien il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’Argent.
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